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    La teneur de l'écorce terrestre est d'environ 0,1 ppm (partie par million), soit un gramme par tonne d'écorce terrestre, ce qui paraît énorme ! Environ 50 % de la production mondiale d'argent provient des mines de plomb, 25 % de mines de cuivre et 15 % de mines d'or. Seulement 17 % vient de mines exclusivement d'argent.

    Concasseur de roches, à gauche, relié à une mine d'argent, à droite. © Steeve Ford Elliot, Wikimedia commons, CC 2.0
    Concasseur de roches, à gauche, relié à une mine d'argent, à droite. © Steeve Ford Elliot, Wikimedia commons, CC 2.0

    La production totale mondiale voisine les 15 500 tonnes dont 550 pour l'Europe. Le Mexique est le principal producteur avec 2 500 tonnes (Peñoles 1 000 t et Immsa 350 t), suivi de près par le Pérou avec 2 000 tonnes et puis avec 1 500 tonnes on a les États-Unis (la moitié dans le Nevada), la Russie et le Canada. Les réserves minières mondiales sont estimées à 250 000 tonnes d'argent.

    La production secondaire mondiale est estimée à 4 700 tonnes dont 1 300 t aux États-Unis, 850 t au Japon, 450 t en Allemagne. Cette production vient essentiellement des stocks (l'Inde par exemple aurait un stock d'argent allant jusqu'à 160 000 tonnes... mais les investisseurs stockent tous les métauxmétaux bien cotés en Bourse) et du recyclagerecyclage, en particulier de la photographiephotographie, ce qui, avec l'apparition du numériquenumérique a diminué fortement.

    La production minière française était de 2,8 tonnes d'argent, des mines d'or de Salsigne, mineraiminerai contenant 20 g Ag/t, et la mine du Bourneix a produit 118 kgkg d'argent, en 1996. Production française à partir de minerais de Pb et Zn importés : 202 tonnes. Le recyclage de vieux déchetsdéchets d'argent usagé : 140 tonnes.

    Consommation : 781 tonnes. Importations de métal brut (1992) : 802 t. Exportations de métal brut (1992) : 293 t. (Données de la Société Française de Chimie)

    La mise en exploitation du Cerro Rico (actuellement Bolivie) par les Espagnols en 1545 va entraîner un énorme bouleversement dans l'économie européenne moderne en conduisant à la faillite la plupart des mines d'argent du vieux continent.

    Gravure : exploitation minière.
    Gravure : exploitation minière.

    Gisement : de la découverte à l'exploitation

    L'exploitation des ressources du sous-sol implique une série d'opérations et de multiples difficultés. Pour mener à bien leur exploitation, les mineurs firent appel à des solutions techniques qui évoluent au cours des âges.

    Après la découverte d'un gisementgisement par observation et prospection des affleurementsaffleurements, les recherches se poursuivent par des travaux souterrains : galeries et puits qui suivent le filonfilon. Les chantiers prennent alors la forme du gisement et forment des salles ou des grandes fissures inclinées. Le minerai, dans tous les cas dans l'histoire, fait l'objet d'un premier tri sur place. Le stérile est abandonné en remblais, ce qui limite l'effondrementeffondrement et diminue le transport. Les mineurs utilisent le pic, le burin et le marteau, ils recourent à la taille au feufeu en roche très dure. Au XVIIe siècle apparaît la poudre noire, explosif à base de charbon, salpêtre et soufresoufre, puis, à partir de 1860 la perforation mécanique. Le transport se fait à dosdos d'homme, à la brouette puis par roulage ou treuillage.

    L'aérage se fait par des puits et on utilise les courants d'airair qui se créent entre l'intérieur et la surface. Les eaux d'infiltration sont canalisées, pompées mais demeurent un problème. Le minerai doit subir un traitement préalable appelé minéralurgie : trier et enrichir le minerai, voire séparer les différents minerais. Tri à la main, concassage sur des enclumes en pierre, lavage sur des plans inclinés en boisbois furent le lot des travailleurs jusqu'aux machines du XIXe siècle. Au XXe siècle, de nouveaux modes d'enrichissement par voie chimique apparaissent : la flottation, la cyanuration, etc.

    À une teneur satisfaisante, le minerai peut enfin subir les opérations pour obtenir le métal pur : c'est la métallurgie. Plusieurs mines françaises ont rouvert, non pas pour l'exploitation mais pour la recherche tant en histoire qu'en archéologie.

    La mine mythique de Potosi, un peu d'histoire politique et minière. Voici quelques dates clés de l'histoire d'un pays qui a perdu les deux tiers de son territoire et une grande partie de ses richesses minières, il ne reste que la misère :

    • 900 à 1200 : civilisations de Tiahuanaco (Tiwanaku) ;
    • 1544 : découverte des mines d'argent de Potosi ;
    • 1555 : Potosi, décrétée ville impériale par Charles Quint ;
    • Environ de 1750 : déclin de l'exploitation des mines d'argent de Potosi ;
    • 1781 : immense révolte indienne ;
    • 1810-1820 : guérilla rurale contre les troupes espagnoles ;
    • 1824 : victoire décisive du maréchal SucreSucre à Ayacucho ;
    Carte de la Bolivie en 1825.
    Carte de la Bolivie en 1825.
    • 1825 : création de la république de Bolivar (ex-haut Pérou) ;
    • 1879-1883 : guerre du Pacifique. La Bolivie perd définitivement son accès à la mer ;
    • 1901 : guerre de l'Accre avec le Brésil. La Bolivie perd une grande partie de son territoire ;
    • début XXe siècle : l'exploitation de l'étainétain remplace celle de l'argent ;
    • 1932-1935 : guerre du Chaco avec le Paraguay. La Bolivie perd 200.000 km².

    Bolivie : les mines du Cerro Rico surplombant la ville de Potosí

    Et une petite histoire très brève de la ville et de la mine : les mines du Cerro Rico - la « riche colline » qui surplombe la ville de Potosí, en Bolivie - sont encore en activité. C'est l'histoire d'une ville mais aussi d'un colonialisme sauvage qui est aujourd'hui indissociable de la tragédie de Potosí. Encore plus de 12 000 mineurs dont 2 000 enfants descendent chaque jour travailler dans des conditions épouvantables.

    Potosí, Bolivie. © Google earth
    Potosí, Bolivie. © Google earth

    Potosí, cette ville, située à 4 090 mètres, a donc été créée en 1545. Le précieux métal, pendant 300 ans de contrôle colonial, a servi à financer l'Espagne, et ses extravagances au prix des pires atrocités. Dès le début, les mines ont nécessité le recrutement de milliers d'esclaves indigènesindigènes et africains. Les conditions de travail de ces « mitayos » : travailler par rotation de douze heures, soit manger, travailler et dormir sous terre quatre mois d'affilée. Ils devaient se couvrir les yeuxyeux à la sortie et mouraient après quelques années en raison de la silicosesilicose et des accidentsaccidents de travail. Entre 1545 à 1825, plus de huit millions sont morts...

    L'argent était, quant à lui, acheminé en Espagne par bateau. En 1672, Potosí comptait plus de 80 églises et 200 000 habitants, une des plus grandes villes du monde ; au XIXe siècle, cette population a chuté à 10 000 habitants et les luttes pour l'indépendance entraînèrent le pillage de ses richesses vers l'Europe, en même temps, la production du Cerro Rico commençait à chuter.

    Voir aussi

    Le travail des enfants au XIXe siècle

    Potosí : mine d'argent, souffrance de plomb (Risal, Réseau d'information et de solidarité avec l'Amérique latine).
    Potosí : mine d'argent, souffrance de plomb (Risal, Réseau d'information et de solidarité avec l'Amérique latine).

    Extraits - légèrement modifiés - d'un reportage parmi les mineros de Potosí, en Bolivie, esclaves d'une exploitation minière d'argent qui n'en rapporte d'ailleurs plus beaucoup, par Irène Caselli (source : Il Manifesto/Le Courrier, CH, avril 2005. Traduction et adaptation : Luca Benetti).

    « Alberto a 29 ans et se lamente... Nous sommes à 100 mètres sous terre, dans une galerie qui ne dépasse pas un mètre cinquante de hauteur, creusant des trous dans la roche avec un petit scalpel. Il travaille depuis l'âge de 16 ans dans une mine d'argent de Potosí, en Bolivie. La plupart de ses collègues ne résistent pas plus de dix ans avant de succomber à la silicose. Potosí est un nom que les passionnés d'Amérique latine connaissent bien. L'histoire de l'Occident est étroitement liée à cette petite ville bolivienne, qui fut la plus riche de tout le continent. Le contrastecontraste entre la population, indigène et pauvre, et l'architecture, coloniale et raffinée, est saisissant. Cette montagne regorgeait d'argent pur, alors qu'elle n'est aujourd'hui plus qu'un trou béant chargé de sueur et de sang.

    Les Espagnols recrutaient chaque année 12 000 indigènes pour travailler dans les mines d'argent. En 1573, la ville comptait 120 000 habitants. Autant que Londres, davantage que Madrid, Paris ou Rome. Les fêtes y duraient des mois entiers, des dizaines d'églises et de palais étaient décorés de matériaux précieux.

    Pendant l'administration espagnole, 80 esclaves par jour perdaient la vie dans les mines. Ceux qui ne mouraient pas d'un accident décédaient de pneumoniepneumonie à cause de l'écart thermique entre l'intérieur de la montagne et l'extérieur. À plus de 4 000 mètres d'altitude, il fait froid toute l'année.

    Les conditions de travail sont meilleures aujourd'hui et il y a moins d'accidents. Mais les mineurs qui travaillent dans les zones les plus pénibles finissent par mourir, mais 90 % des 8 000 mineurs font ce travail car ils n'ont pas d'alternative, on y gagne moins de 50 euros par mois. Si la famille a besoin d'argent, il est possible de travailler 20 heures par jour ! Les plus jeunes, à la mine, n'ont que 8 ans (voir bibliographie sur le travail des enfants à la mine)).

    Le guide, après nous avoir équipés d'un casque et d'une lanterne, nous amène au marché : dynamite, mèches, cigarettes, feuilles de coca et boissons. Les mineurs, pour pallier le manque d'énergieénergie, mâchent des feuilles de coca toute la journée. Cela permet d'éliminer la fatigue et de couper l'appétit.

    Aujourd'hui, on extrait surtout de l'étain, du zinczinc et de la poudre d'argent. Mais seul 60 % du raffinageraffinage est effectué sur place. Le reste se fait en Europe car la Bolivie manque de fonds et de main-d'œuvre spécialisée pour valoriser ses propres ressources. Sur un murmur de la ville, on peut lire une phrase du cubain José Marti : « L'éducation est le seul moyen pour s'affranchir de l’esclavage. » Beaucoup de Boliviens pensent que leur pays est esclave des multinationales étrangères en particulier. Un article de fond du journal El Potosí affirme que les élus politiques devraient écouter davantage le peuple, surtout les indigènes, autrement la situation risque d'exploser, comme en 2003... »

    Quelques mines françaises

    • La mine d'argent de Castel-Minier (Ariège, Aulus-les-Bains)

    Il s'agissait d'une grande exploitation avec ses ateliers de traitement de la galène argentifère et un château datant du XIVsiècle. C'était un gisement de plomb argentifère et de zinc dans des dolomiesdolomies et des schistesschistes paléozoïquespaléozoïques. La minéralisation concernait trois filons.

    Castel-Minier fut, d'après les textes, une des plus importantes mines d'argent du royaume de France. Se trouvent réunis ici, les zones d'extraction, les ateliers de préparation et une fonderie de plomb et d'argent, à savoir l'ensemble de la chaîne opératoire. Le Castel-Minier permettra une étude approfondie du réseau souterrain, étendu et bien conservé, des ateliers de surface et du mode de vie des mineurs au XIVe siècle.

    La prospection géophysique a été conduite par le laboratoire de géophysique appliquée de l'université de Paris 6 sous la direction de Nicolas Florsch, professeur de géophysique. Cette phase a mis en évidence une activité de transformation et de production de ferfer, en plus de l'activité minière et métallurgique propre au non ferreux.

    • Les mines du Fournel dans les Alpes (massif des Écrins)

    Elles font la même démarche. Ces mines ont été redécouvertes vers 1990 en piteux état et ont donné lieu à un chantier archéologique de grande ampleur qui se poursuit aujourd'hui. Le secteur minier est situé sur le territoire de la commune de l'Argentière-la-Bessée dans la partie aval du Vallon du Fournel, juste avant la vallée de la Durance.

    Le filon principal est encaissé dans des quartzitesquartzites, découpé en panneaux orientés NE-SO, inclinés vers le sud-est de 15 à 40°, et disposés en marches d'escalierescalier, entre 1 050 et 1 700 mètres d'altitude. Il se poursuit sous le niveau du torrenttorrent. Sa minéralisation est concentrée dans une bande de 0,50 à 1,50 mètre d'épaisseur.

    Le minerai est presque exclusivement de la galène argentifère titrant 2 ‰ au maximum, mélangé à du quartzquartz et de la barytine, de la pyritepyrite, de l'azurite, de la malachite, des traces d'arsenicarsenic, de blendeblende, de géochronite, tétraédrite, boulangérite...

    • Le district minier de Sainte-Marie-aux-Mines (massif vosgien)

    Il est un des plus importants districts argentifères de France. On y dénombre actuellement plus de 1 000 entrées de galeries et orifices de puits. Les gneissgneiss de Sainte-Marie-aux-Mines, dont certains sont d'âge précambrienprécambrien, sont classés en deux groupes, les gneiss à biotitebiotite et sillimanite et les gneiss variés qui chevauchent les premiers.

    Sainte-Marie-aux-Mines, bourse aux minéraux.
    Sainte-Marie-aux-Mines, bourse aux minéraux.

    Les filons se sont constitués à partir de fractures provoquées par des mouvements de l'écorce terrestre dans les gneiss variés qui contiennent les filons les plus intéressants. Des solutions hydrothermales ont circulé dans les fractures en dissolvant les éléments métalliques contenus dans les anciens gneiss. En se rapprochant de la surface et en se refroidissant, les substances dissoutes ont précipité, se concentrant dans les fractures qui sont devenues des filons. Six formations constituent ces dépôts :

    1. calcitecalcite à hématitehématite et quartz calcédonieux ;
    2. surtout cuprifère : cuivre gris, chalcopyrite, cubanite et bismuthbismuth ;
    3. arsenic natif, arséniures ;
    4. galène, blende, cuivre gris ;
    5. fluorinefluorine et barytine, dans le haut des filons ;
    6. carbonates d'argent, à l'origine de la célébrité de Sainte-Marie-aux-Mines.

    Le dépôt de ces minéralisations serait d'âge tertiaire, contemporain de l'effondrement du fossé rhénanfossé rhénan. La production totale d'argent a été estimée à plusieurs centaines de tonnes, la mine la plus riche ayant été Saint-Guillaume au bois de Saint-Pierremont.

    Le muséum d'Histoire naturelle de Paris conserve d'anciens échantillons et la collection systématique du musée de Minéralogie de l'école des Mines de Paris une cinquantaine d'espècesespèces minérales provenant de Sainte-Marie ainsi que les minérauxminéraux nouveaux décrits à Sainte-Marie-aux-Mines. Les minéraux d'argent sont représentés par l'argent natif en touffes, filaments, ou encore dendritesdendrites formées d'empilements d'octaèdres parfois allongés. D'autres minéraux d'argent sont les argents rouges : proustite, pyrargyrite, l'argent corné ou cérargyrite, l'argent vitreux ou argentite. D'autres minéraux argentifères, plus rares, sont représentés par la xanthoconite, la myargyrite, l'argentopyrite, la dyscrasite, la polybasite, l'aramayoite, la pearcéite, la dervillite, la matildite, la pavonite. Par ailleurs, l'argent se trouve dans la galène, 0,06 % à 0,1 % d'argent, et le cuivre gris, principaux minerais d'argent au plan économique. Parmi les nouvelles espèces minérales décrites à Sainte-Marie-aux-Mines, citons le sulfosel appelé dervillite : Ag2 As S2 (Weil 1941).

    • Les mines de Melle dans les Deux-Sèvres

    L'exploitation s'est déroulée entre 602 et 995. Le minerai est de la galène argentifère. La numismatique montre un monnayage mellois en argent entre 768 et 1189.

    Melle, logo des mines.
    Melle, logo des mines.

    Une des particularités des mines de Melle est d'avoir été ouverte au feu en faisant exploser la roche avec des bûches dressées contre les parois. La mine prend alors des formes très arrondies qui sont typiques. Après l'abattage, le minerai est sorti pour être concassé, lavé et calibré. Le minerai subit plusieurs fontesfontes jusqu'à l'obtention de l'argent : une première fusionfusion donne du plomb argentifère, puis la coupellation sépare le plomb de l'argent qui sera coulé en lingot et envoyé à l'atelier monétaire. Charles le Chauve, en 864, limite à dix le nombre d'ateliers battant monnaie dans tout l'empire dont Melle. Les monnaies frappées à Melle sont le denier et l'obole.