Sur Titan, le cycle du méthane ressemble en partie au cycle de l'eau sur Terre, de sorte que l'on peut se demander si une forme de vie, différente de celle sur notre Planète, est possible sur le plus grand satellite naturel de Saturne ? C'est à cette question, et à bien autres aussi, que devra répondre la mission Dragonfly de la Nasa qui sera lancée avant la fin de cette décennie.


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    En janvier 2005, la sonde Huygens de l'ESA, l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne, s'était posée avec succès à la surface de TitanTitan, la plus grosse lune de SaturneSaturne. Exploit technique sans précédent, c'était aussi la première fois que se découvrait la surface de ce monde dont l'épaisse couche atmosphérique rend très difficile son observation, que ce soit depuis la Terre ou en orbite. La sonde Cassini, qui l'a survolée des dizaines de fois, a rapporté plus de questions que de réponses !

    Dans le courant de la décennie 2030, la Nasa a prévu d'envoyer un drone pour explorer ce monde unique dans le Système solaire. Ce drone sera lancé en 2026 et devrait rejoindre le plus gros satellite de Saturne en 2034. L'exobiologie de Titan est au centre de la mission de Dragonfly qui devrait renforcer de façon significative nos connaissances sur l'histoire de l'origine et l'évolution de la vie sur Titan et sur Terre. Le 19 juillet, l'équipe scientifique de Dragonfly a publié Science Goals and Objectives for the Dragonfly Titan Rotorcraft Relocable Lander dans The Planetary Science Journal. L'auteur principal de l'article est JasonJason Barnes, chercheur principal adjoint de Dragonfly et professeur de physiquephysique à l'Université de l'Idaho.

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    Titan et la Terre sont les deux seuls objets du Système solaire à posséder une atmosphèreatmosphère riche en azoteazote. Mais le second élément le plus abondant dans celle de Titan est le méthane et non pas l'oxygèneoxygène comme c'est le cas pour l'atmosphère terrestre. On lui connait également un système météorologique comme celui de la Terre à la différence que l'eau est remplacée par du méthane.

    Elizabeth Turtle du Laboratoire de physique appliquée de l'Université Johns Hopkins (APL) et responsable scientifique de Dragonfly détaille la mission aux objectifs ambitieux. © APL, Youtube

    Le méthane peut-il remplacer l’eau dans le cycle de la vie ?

    Cette analogieanalogie avec la Terre est remarquable dans le sens où elle peut renseigner les scientifiques sur de nombreux aspects de la Terre primitive. En effet, la chimiechimie primitive à l'œuvre sur Titan peut fournir des indices sur l'origine des matériaux (les fameuses briques du vivant) qui donneront naissance à la vie sur Terre, il y a environ 3,45 milliards d'années. C'est d'autant plus intéressant que les conditions qui régnaient sur Terre lorsque la vie est apparue sont inconnues. Tous les indices de la vie primitive terrestre au delà de 3,5 à 3,8 milliards d'années ont été effacés par la tectonique des plaques et les convulsionsconvulsions multiples de la croûte terrestrecroûte terrestre.

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    Pourquoi chercher sur Titan les origines de la vie terrestre ?

    Beaucoup de composés chimiques prébiotiquesprébiotiques qui se sont formés sur la Terre primitive sont également formés dans l'atmosphère de Titan, et les scientifiques souhaitent voir jusqu'où Titan est vraiment allé sur la voie de la chimie prébiotique. L'atmosphère de Titan pourrait être un bon analogue de ce qui s'est passé sur Terre primitive. De nombreux scientifiques se demandent si Titan pourrait accueillir une forme de vie qui, pour cette fois, serait très différente de celle de la Terre qui s'appuie sur l'eau comme solvantsolvant

    La chimie prébiotique au centre de la mission Dragonfly

    La mission Dragonfly étudiera la chimie prébiotique, l'habitabilité de Titan et cherchera des biosignatures chimiques potentielles passées ou présentes de Titan à partir de la « vie telle que nous la connaissons », à savoir à base d'eau et d'une forme de « vie potentielle », c'est-à-dire différente de ce celle que nous connaissons qui pourrait utiliser des hydrocarbureshydrocarbures liquides comme solvant.

    « Titan représente l'utopie d'un explorateur, a déclaré le coauteur Alex Hayes, professeur agrégéprofesseur agrégé d'astronomie au College of Arts and Sciences et cochercheur de Dragonfly. Les questions scientifiques que nous avons pour Titan sont très larges parce que nous ne savons pas encore grand chose de ce qui se passe réellement à la surface. Pour chaque question à laquelle nous avons répondu lors de l'exploration de Titanexploration de Titan depuis l'orbite de Saturne par la mission Cassini, nous en avons gagné dix nouvelles ».

    S’inspirer des activités opérationnelles des rovers martiens

    Dragonfly passera sur Titan une journée complète (équivalent à 16 jours terrestres) en un seul lieu pour mener des expériences et des observations scientifiques, puis s'envolera vers un nouvel endroit. En fonction des leçons tirées de l'emplacement précédent, l'équipe scientifique dirigera Dragonfly vers un autre site. Une stratégie d'exploration qui s'inspire des leçons apprises avec les rovers martiens de la Nasa qui sont opérés de cette façon avec le succès que l'on sait.

    La faible gravitégravité de Titan (environ un septième de la Terre), une atmosphère épaisse (quatre fois plus dense que celle de la Terre) et de faibles ventsvents en font un endroit idéal pour un véhicule aérien. Seule incertitude, pleurera t-il du méthane lors la mission ?


    Dragonfly : la Nasa va partir en mission vers Titan sur les traces des origines de la vie

    Article de Rémy DecourtRémy Decourt publié le 28 juin 2019

    Les véhicules aériens d'exploration robotiquerobotique ont la cote auprès de la Nasa. Après l'hélicoptèrehélicoptère de Mars 2020Mars 2020, qui sera lancé l'année prochaine à destination de Mars, la Nasa a donné son feufeu vert au drone Dragonfly pour l'exploration de Titan. Ce drone sera lancé en 2026 et devrait rejoindre le plus gros satellite de Saturne en 2034. L'exobiologie de Titan est au centre de la mission de Dragonfly qui devrait renforcer de façon significative nos connaissances sur l'histoire de l'origine et l'évolution de la vie sur Titan et sur Terre. 

    Pour la quatrième mission de son programme d'exploration New Frontiers, la Nasa avait le choix entre deux missions ambitieuses. Une mission de retour d'échantillons de la comètecomète 67P/Churyumov-Gerasimenko -- celle-là même qui a été survolée par la sonde européenne Rosetta et visitée par l'atterrisseur Philae entre 2014 à 2016 -- ou l'envoi d'un drone sur Titan, principal satellite de Saturne, sur lequel avait atterri la sonde Huygens de l'Agence spatiale européenne en janvier 2005.

    La Nasa a finalement sélectionné le drone Dragonfly d'Elizabeth Turtle du Laboratoire de physique appliquée de l'Université Johns Hopkins (APL). L'annonce a été faite hier soir, jeudi 27 juin. Cette mission a comme principaux objectifs de chercher des processus chimiques prébiotiques communs à Titan et à la Terre et des indices d’une vie éteinte, voire en activité. Comme Titan est analogue à la Terre primitive mais en beaucoup plus froid, Dragonfly pourrait fournir des indices sur la façon dont la vie a pu se développer sur notre Planète.

    Ce drone, de plus de deux mètres d'envergure muni de huit hélices, embarquera quatre instruments. Il sera alimenté en énergieénergie par un générateurgénérateur thermoélectrique à radio-isotopeisotope (RTG), comme l'est actuellement le rover Curiosity sur Mars. Il sera capable de visiter et d'explorer ainsi des dizaines de sites distants chacun de plusieurs dizaines de kilomètres. Au total, Dragonfly volera plus de 175 kilomètres, soit près du double de la distance parcourue à ce jour par l'ensemble des rovers martiensrovers martiens.

    L'atmosphère de Titan étant 4 fois plus dense que celle de la Terre et sa gravité y étant 7 fois plus faible, ce mode d'exploration aérien inédit est idéal. Son lancement est prévu en 2026 et une arrivée sur Titan en 2034 pour une mission de 2,7 années. Huit années seront nécessaires à la sonde pour parcourir les 1 milliard 400 millions de kilomètres qui nous séparent de Titan.

    Comprendre l'origine et l'évolution de la vie sur Titan et la Terre

    Parmi les sites qui seront explorés par Dragonfly, la Nasa a annoncé qu'il se posera dans les dunes équatoriales de Shangri-La, qui ressemblent aux dunes linéaires de Namibie en Afrique australe. Il se rendra aussi dans le cratère d'impact de Selk, où l'on trouve des traces de l'eau à l'état liquideétat liquide, des substances organiques -- les moléculesmolécules complexes qui contiennent du carbonecarbone, combinées avec de l'hydrogènehydrogène, de l'oxygène et de l'azote -- et de l'énergie, qui constituent la recette de la vie.

    La vue de Titan envoyée par la sonde européenne Huygens le jour de son atterrissage, le 14 janvier 2005. © ESA/Nasa/JPL/<em>University of Arizona</em>
    La vue de Titan envoyée par la sonde européenne Huygens le jour de son atterrissage, le 14 janvier 2005. © ESA/Nasa/JPL/University of Arizona

    « Avec la mission Dragonfly, la Nasa réalisera à nouveau ce que personne d'autre ne peut faireVisiter ce monde océanique mystérieux pourrait révolutionner ce que nous savons de la vie dans l'universunivers, a déclaré l'administrateur de la Nasa, Jim Bridenstine. Cette mission de pointe aurait été impensable il y a encore seulement quelques années. Mais nous sommes maintenant prêts pour le vol extraordinaire de Dragonfly. »

    Thomas Zurbuchen, administrateur adjoint de la Nasa pour la science, a quant à lui, déclaré que « Titan ne ressemble à aucun autre endroit du Système solaire, et Dragonfly ne ressemble à aucune autre mission. Dragonfly visitera un monde rempli d'une grande variété de composés organiques qui sont les blocs de constructionconstruction de la vie et qui pourrait nous renseigner sur l'origine de la vie elle-même », a-t-il conclu lors de l'annonce de la sélection de la mission.