Jusqu'à présent, toutes les simulations numériques conduisaient à la formation de plusieurs lunes de Saturne de la taille de Titan, qui étaient toutes rapidement avalées par la géante ou survivaient, laissant donc au moins deux satellites de grandes tailles. Pour la première fois, un scénario permet à Titan d'apparaître dans les simulations tout en échappant, seul, à la destruction.
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Construire la cosmogonie du Système solaire ne nécessite pas seulement de rendre compte de la formation des planètes mais aussi de leurs lunes et des anneaux qu'elles pourraient posséder. L'origine de la Lune de la Terre, tout autant que celles de Saturne et de ses anneaux, interroge. On aimerait bien comprendre notamment comment cette géante gazeuse a acquis son satellite TitanTitan.
Rappelons que c'est la plus grande lune de SaturneSaturne et la deuxième plus grande lune de notre Système solaire après GanymèdeGanymède, la lune de JupiterJupiter, qui est plus grande de seulement 2 %. Avec un rayon d'environ 2.575 kilomètres, Titan est non seulement d'environ 50 % plus grand que notre Lune mais aussi plus grand que la planète Mercure.
Pour expliquer sa naissance, les planétologues font généralement intervenir une formation en quelque sorte in situ de Titan dans un disque d'accrétion contenant poussières et surtout gaz autour de la jeune Saturne, de façon analogue à la genèse des planètes dans le disque protosolaire autour du jeune SoleilSoleil. Cette sous-nébuleusenébuleuse saturnienne, comme les chercheurs l'appellent, serait même à l'origine des autres lunes de Saturne telle Encelande et Japet. Pour la petite histoire, si Titan fut découvert par Christian HuygensChristian Huygens, TéthysTéthys, DionéDioné, RhéaRhéa et Japet le furent par Jean-Dominique CassiniJean-Dominique Cassini qui les nomma Sidera Lodoicea (« les étoilesétoiles de Louis ») en l'honneur du roi Louis XIV.
Mais ce scénario avait un problème. Les simulations numériquessimulations numériques sur ordinateursordinateurs conduites jusqu'à présent pour reproduire la formation de Titan, soit échouaient à produire un corps céleste de si grande taille, soit en produisaient plusieurs qui survivaient, en claire contradiction avec les observations. En fait, pour être plus précis, de grandes lunes se formaient bien de taille comparable à Titan mais elles finissaient toutes par être englouties rapidement par la géante gazeuse.
La physique du disque d'accrétion mieux modélisée
Mais, aujourd'hui, deux astrophysiciensastrophysiciens japonais, Yuri Fujii, professeur à l'Université de Nagoya, et Masahiro Ogihara, professeur à l'Observatoire national d'astronomie du Japon (NAOJ), annoncent avoir trouvé une solution à cette énigme qui fait l'objet d'un article publié dans Astronomy and Astrophysics Letters et disponible également sur arXiv.
Le disque d'accrétion de la sous-nébuleuse se comporte comme un gaz, avec une température et une pressionpression mais aussi du rayonnement et des sources d'opacité pour ce rayonnement, qui influe sur la distribution des températures dans le disque. Les astrophysiciens ont mieux pris en compte les sources d'opacité pour le transfert radiatif sous la forme de poussières glacées et silicatées. Au final, les simulations étaient mieux à même de rendre compte des effets du gaz sur les lunes en formation dans les calculs qui tenaient évidemment compte aussi des forces d'attraction gravitationnelles présentes entre tous les corps.
Les chercheurs ont alors découvert qu'il existait une sorte de zone de sécurité, une région en forme d'anneau autour de Saturne, dans laquelle une planète de la taille de Titan pouvait se former, migrer vers l'extérieur sous l'effet de la pression d'un gaz plus chaud que dans les précédentes simulations, mais rester dans cette zone alors que les autres, plus proches de Saturne, finissait par être avalées.
Pour la première fois, une simulation numérique conduisait automatiquement à l'existence d'une seule lune géante comme Titan autour de Saturne. Mais les astrophysiciens sont prudents. Il n'est pas encore possible d'en conclure que c'est bien de cette façon que le satellite s'est formé.
Pour le savoir, il faudrait sans doute observer un grand nombre d'exolunes autour d'exosaturnes et découvrir qu'à chaque fois ou presque, il n'existe pour chaque exosaturne qu'une exotitan. Nous n'en sommes pas encore là dans un avenir proche.
Ce qu’il faut
retenir
- Jusqu'à présent, toutes les simulations numériques conduisaient à la formation de lunes de Saturne de la taille de Titan, qui étaient toutes rapidement avalées par la géante ou survivaient laissant donc au moins deux satellites de grandes tailles.
- Pour la première fois, un scénario permet à Titan d'apparaître dans les simulations tout en échappant, seul, à la destruction.
- Les chercheurs ont découvert qu’il existait une région en forme d’anneau autour de Saturne dans laquelle une planète de la taille de Titan pouvait se former, migrer mais rester dans cette zone alors que les autres, plus proches de Saturne, finissait par être avalées.
- Cependant, il n’est pas encore possible d’en conclure que c’est bien de cette façon que le satellite s’est formé.