Il découvre une mandibule d'Homo Erectus dans le carrelage de chez ses parents !

C'est en rendant visite à ses parents qu'un dentiste a fait cette étonnante découverte. Dans une dalle du nouveau carrelagecarrelage qui vient d'être posé il y a peu dans la maison, il remarque une forme qui lui est particulièrement familière : la coupe d'une mandibulemandibule d'origine humaine, où plusieurs dents sont nettement visibles.

La premier dinosaure a été découvert par William Buckland, génie et... fou extravagant ! On raconte qu'il aurait mangé le cœur du roi Louis XIV ! Retracez son histoire dans Chasseurs de Science. © Futura

Intrigué, il prend une photo pour la poster sur InternetInternet, sentant que cette découverte fortuite peut être potentiellement d'un intérêt majeur pour la recherche scientifique. Et effectivement, l'image attire rapidement l'attention de plusieurs chercheurs, qui contactent le dentiste pour en savoir plus.

Une dalle de carrelage qui provient d’une carrière de travertin en Turquie

Ensemble, ils commencent à remonter la piste de l'origine du carrelage, qui est fait de travertintravertin, une roche sédimentaireroche sédimentaire calcairecalcaire. L'objectif étant de dater approximativement l'âge de la roche et donc, de la mandibule. Car le travertin, qui est très communément utilisé pour la production de dalles et de blocs pour la construction, peut en effet se former très rapidement par précipitation et cristallisation de minérauxminéraux carbonatés à partir d'une eau chaude très riche en calcaire, un peu comme le tuftuf.

Bloc de travertin utilisé pour la construction d'un mur. © Ustill, Wikimedia Commons, CC by-sa 2.0 DE

On trouve ainsi des travertins de tous les âges, à l'intérieur desquels il n'est d'ailleurs pas rare de trouver des fossilesfossiles d'animaux et de plantes. Alors bien sûr, la mandibule aurait moins d'importance scientifique s'il se trouvait qu'elle était incluse dans un travertin de quelques centaines ou milliers d'années seulement.

Travertins formés récemment dans les montagnes Jemez au Nouveau-Mexique. Les restes de plantes, d'animaux, voire d'humains, qui tombent alors dans l'eau peuvent être piégés et fossilisés alors que la roche se forme. © Christopher Michel, Wikimedia Commons, CC by 2.0

Un individu qui appartiendrait à une espèce plus ancienne qu'Homo sapiens

Mais les chercheurs se rendent vite compte que ce n'est pas le cas. La dalle vient en effet d'une carrière située dans l'ouest de la Turquie, dans le bassin de Denizli, où les roches calcaires ont été précédemment datées et sont depuis longtemps connues pour leur richesse en fossiles de mammouthsmammouths, rhinocérosrhinocéros, girafesgirafes, chevaux, cerfs, reptilesreptiles et tortuestortues. Le travertin utilisé pour recouvrir le sol de la maison aurait ainsi entre 1,8 et 0,7 million d'années. De fait, la mandibule aurait appartenu à une espèce d’Hominini plus ancienne qu'Homo sapiensHomo sapiens ! De quoi renforcer l'intérêt des scientifiques. Car plus on remonte dans le temps, plus les restes fossiles d'origine humaine deviennent rares, et donc précieux.

Ce n’est pas la première fois que des restes d’Hommes préhistoriques sont retrouvés dans du carrelage

Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'un reste humain fossilisé est retrouvé dans le travertin de Denizli. En 2002, les employés d'une manufacture de carrelage ont découvert un morceau de crânecrâne, alors qu'ils étaient en train de couper à travers un bloc de calcaire pour réaliser des dalles. Le fragment retrouvé a été analysé et attribué à un individu Homo erectus. L'Homme de Kocabas serait ainsi le premier spécimen de cette espèce découvert en Turquie.

Réplique du crâne de l'Homme de Kocabas, retrouvé dans une dalle de travertin provenant du bassin de Denizli en Turquie. Il aurait appartenu à un individu Homo erectus. © Erturac, Wikimedia Commons, CC by-sa 4.0

L'étude du crâne révélera d'ailleurs des lésions caractéristiques de la tuberculosetuberculose, et permettra d'affirmer l'existence de cette maladie déjà chez les premiers Hommes. Dans le Washington Post, qui relate la découverte, les scientifiques en charge de cette étude indiquent qu'ils ont alors fouillé les autres blocs débités dans la manufacture, à la recherche du reste potentiel du squelette, mais en vain. Si rien ne permet d'affirmer que le reste du squelette s'est également retrouvé piégé dans le travertin, il est cependant tout à fait envisageable qu'il ait été débité en tranches et que ces fragments sont désormais exposés dans le sol d'une multitude de cuisines et de salles de bains. Le reste du carrelage de la maison des parents du dentiste fait d'ailleurs l'objet de toutes les attentions, plusieurs dalles présentant des traces suspectes.

Observez le sol de votre salle de bains, on ne sait jamais !

Les chercheurs envisagent maintenant de scanner la dalle de carrelage pour en sortir une image 3D de la mandibule afin de l'étudier avec plus de précision. La recherche de fragments d'ADNADN pourrait en apprendre beaucoup plus sur l'individu en question, tout comme l’analyse de l’émail des dents.

Parions qu'à la suite de cette découverte, nombreux sont ceux qui vont soudainement s'intéresser de près au carrelage de leur maison. Peut-être renferme-t-il des traces inédites de nos lointains ancêtres ? Qui sait ?