Un récent article résume l'état de l'art concernant le potentiel hépatotoxique de certains compléments alimentaires tout en pointant les dysfonctionnements de cette industrie.
au sommaire
Encore un pavé dans la mare des compléments alimentaires. Il y a deux semaines, nous vous avertissions, dans le podcast Futura Santé, sur le flou régnant autour de ces innombrables pilules : peu de preuves d'efficacité et des effets indésirables mal connus, entre autres. La méfiance à leur égard ne faiblit pas tandis qu'un nouvel article publié dans Critical Review in Toxicology résume ce qui est actuellement connu par la science concernant les liens entre compléments alimentaires et hépatotoxicité.
Quelques rappels sur les compléments alimentaires
Les compléments alimentaires sont des produits destinés à compléter l'alimentation normale (ce qui, hors cas pathologiquepathologique et alimentation végétariennevégétarienne ou végétalienne, n'est pas nécessaire en France) et sont composés d'un concentré de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique. Ils peuvent être utilisés pour corriger une carence, maintenir un apport approprié de certains nutriments (par exemple, la vitamine B12 dans le cadre d'une alimentation végétarienne ou végétalienne) ou pour supporter une fonction physiologique.
Depuis les années 1980, l'intérêt pour ces substances s'est accru de façon exponentielle, si bien qu'aujourd'hui, neuf personnes sur dix ont déjà consommé des compléments alimentaires dans leur vie, notamment de la vitamine C, D et du magnésium. Dans le milieu du sport, le complément alimentaire le plus consommé semble être la créatine selon des données marketing. Les fabricants de compléments alimentaires ont des obligations : indiquer le nom des nutriments, recommander la posologie adaptée et avertir sur les effets d'un éventuel mésusage. Pourtant, de nombreuses études reportent des irrégularités vis-à-vis du dosagedosage, ce qui a de quoi inquiéter.
Quels compléments sont à risque ?
Les auteurs de cet article pointent du doigt de nombreux compléments alimentaires : extrait de thé vert, rooibos, cannabidiolcannabidiol (plus connus sous le nom de CBD), et curcumacurcuma. Tous ces compléments ont déjà fait l'objet soit de signalements inquiétants concernant des cas cliniques d'hépatotoxicité, soit d'études toxicologiques robustes démontrant clairement leur caractère hépatotoxique. Les mécanismes biochimiques conduisant à endommager le foiefoie ne sont pas toujours connus et le risque est sans doute sous-estimé, notamment à cause de fausses croyances répandues dans la population conduisant à ne pas signaler d'éventuels effets indésirables. En effet, ces produits sont souvent considérés comme naturels et par extension, sains, ne pouvant pas causer de dommages collatéraux. Bien sûr, la responsabilité n'incombe pas qu'au consommateur mais surtout au manque de rigueur et à l'opacité de l'industrie des compléments alimentaires.
Quel futur pour l'industrie des compléments alimentaires ?
Il semble difficile d'envisager un avenir pérenne pour l'industrie des compléments alimentaires sans une refonte de son fonctionnement et de ses obligations. Tout d'abord, comme cela est sans cesse relevé, les fabricants devraient avoir très clairement démontré l'efficacité de leurs produits dans des indications précises au lieu de surfer sur des allégations marketing hasardeuses qui ne sont généralement pas supportées par des études cliniquesétudes cliniques correctement menées. Il y a une grande pénurie d'essais cliniques sérieux concernant ces produits et cela devrait être corrigé.
D'autre part, les auteurs rappellent que dans le but d'éviter le cas d'hépatotoxicité, les fabricants de compléments alimentaires devraient prêter plus d'attention à la qualité de leur processus de fabrication afin d'éviter un surdosage des composés ou leur contaminationcontamination par des substances toxiques, et être exemplaires concernant le recensement des cas d'effets indésirables causés par leurs substances. Sans ces mesures, les compléments alimentaires continueront d'être ce qu'ils sont actuellement : des substances dont l'efficacité et la sûreté sont incertaines.