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La surpêchesurpêche provoque des dégâts considérables sur les mers, lacs et rivières à travers le monde, et menace maintenant purement et simplement de très nombreuses espècesespèces. Ces effets se superposent à ceux du réchauffement climatiqueréchauffement climatique et de la pollution que nous analyserons dans le chapitre suivant.
Les chiffres de production mondiale de poissonpoisson, que nous avons évoqués dans le chapitre précédent, ne permettent de voir qu'une partie de la situation extrêmement préoccupante du prélèvement de poissons dans la mer.
Tout d'abord, le poisson sert aussi à nourrir... le poisson d’élevage. Il convient donc de rajouter 22 millions de tonnes aux 156 consommées par les Hommes, pour arriver aux statistiques officielles de 178 millions de tonnes.
Trop de pêche et trop d'animaux marins gâchés
Ce chiffre pourtant colossal, est en fait très sous-estimé, car il est très difficile d'évaluer les quantités réelles prélevées dans les mers et océans. Tout d'abord les poissons ramenés dans les ports ne représentent qu'une partie de ce qui est réellement pêché, car les filets remontent nombre de mammifèresmammifères marins, tortuestortues, oiseaux de mer, poissons trop petits, trop gros, abîmés, hors quotas, sans valeur économique ou commerciale, peu comestibles, etc. Tout cela est rejeté dans la mer, la plupart du temps mort ou grièvement blessé, ce qui malheureusement finit par représenter entre 30 et 50 % de la pêchepêche.
Au total, ce sont des dizaines de milliers de tonnes de poissons et autres animaux marins gâchés chaque année. N'arrivant pas aux ports, ils ne rentrent dans aucune statistique, même s'ils servent à nourrir les poissons ou les mouettes. Pourtant, il n'y a qu'à observer les nuées de mouettes qui accompagnent les chalutiers pour comprendre qu'elles sont bien nourries !
De plus, la pêche artisanale pour autoconsommation ou approvisionnement des marchés locaux, la pêche de loisir ou touristique, et bien entendu la pêche clandestine ne sont presque jamais comptabilisées. Sans oublier la faible fiabilité des pays en guerre, fortement corrompus ou à état défaillant, dont la rigueur statistique n'est pas la première préoccupation...
Enfin, il faut se rendre compte qu'une bonne partie de la pêche mondiale s'effectue au sein d'un monde sans foi ni loi. En effet, à 800 kilomètres des côtes, on ne trouve pas beaucoup de policierspoliciers, mais de nombreux bateaux immatriculés dans des paradis fiscaux, avec des équipages internationaux dépourvus de protection sociale, parfois réduits à l'état d'esclaves. Ce n'est pas la pêche hors quotas qui les impressionne beaucoup, et, dans ce cas, ils ne se précipitent pas pour faire enregistrer rigoureusement la totalité de leur cargaison.
Les auteurs d'une étude parue en 2016 dans la revue scientifique Nature ont tenté de contourner le problème de la sous-déclaration en recoupant les données avec celles estimées via d'autres sources d'information : les études nutritionnelles, la consommation de fuelfuel par les bateaux de pêche, etc. Ils estiment ainsi à au moins 32 millions de tonnes annuellesannuelles la sous-déclaration !
Des ressources halieutiques menacées
Pour prendre la mesure de ce chiffre, notons qu'on a « officiellement » pêché 96 millions de tonnes de poisson en 2018. La pêche réelle aurait donc été de l'ordre de 130 millions de tonnes, plus tout ce qui a été rejeté mort dans la mer sans être entré dans un port ! Les auteurs insinuent que le « vrai » chiffre pourrait en fait approcher les 200 millions de tonnes, soit deux fois plus que les statistiques officielles ! Croire qu'on peut prélever une telle quantité de ressources halieutiques sans s'occuper sérieusement du renouvellement, et sans dépeupler la mer, est une opinion bien naïve ! Le poisson de mer est en fait tellement menacé qu'il est proche d'être condamné.
D'ailleurs, le fait que le chiffre officiel des prises ne bouge plus depuis 20 ans, autour de 90 millions de tonnes, est bien un signe de non-renouvellement de la ressource. Car au cours de ces décennies les méthodes de pêche se sont fortement améliorées, en particulier on racle les fonds marins de plus en plus profondément. De plus, beaucoup d'experts estiment que la sous-déclaration a tendance à diminuer, en particulier dans les zones Atlantique Nord-Ouest et Sud-Est et Pacifique Ouest.
Si l'on déclare prendre autant de poisson, mais avec des méthodes beaucoup plus agressives et sophistiquées, et des déclarations plus honnêtes, cela veut bien dire qu'il y en a moins dans la mer. Il est donc pertinent de s'interroger sur l'évolution du chiffre réel.
Le déclin est vraiment et fortement amorcé, et on ne peut qu'être navré par l'incapacité de la communauté internationale à empêcher la disparition mondiale du poisson. Songeons qu'il y a aujourd'hui plus de deux millions de bateaux de pêche en activité, dont 70 % en Asie. Mais ce chiffre ne veut rien dire car les chalutiers industriels, qui ne représentent que 1 % de cette flotte, ramènent la moitié des prises...
Dans les eaux continentales des pays à gouvernement faible, comme ceux de la côte ouest de l'Afrique, la situation est particulièrement dramatique car aucun pouvoir ne possède une flotte de garde-côtes capable de faire respecter les lois et les accords internationauxaccords internationaux, et que la disproportion des forces est absolument considérable.
Les pays riches signent des accords de pêche avec les gouvernements locaux, ils ont été estimés en 2014 à 400 millions de dollars par an par l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agricultureagriculture (FAOFAO). Une fois ces accords signés, c'est un peu la loi de la jungle dans ces eaux très poissonneuses et très peu surveillées. Songeons qu'un chalutier européen peut ramasser jusqu'à 250 tonnes de poissons par jour. En comparaison, il faudrait un an à 56 bateaux traditionnels africains pour capturer le même volume. Sans parler des centaines de « bateaux usines » chinois ou coréens qui opèrent en toute impunité, sans permis ou dans des zones interdites.
Dans cette région, le poisson représente une importante source de protéinesprotéines et génère des revenus et des emplois pour quelque sept millions de personnes. L'épuisement des stocks de poisson a des répercussions extrêmement préoccupantes sur la sécurité alimentaire et l'économie de pays qui comptent parmi les plus vulnérables du monde.
Des méthodes de pêche de plus en plus sophistiquées
Maintenant, on attrape le poisson avec des technologies extrêmement sophistiquées qui ne lui laissent plus aucune chance : sonar, radar, énormes chaluts qui raclent les fonds marins, dragues, sennes, et même, dans certaines régions du monde, pêche électrique, au cyanure, aux explosifs, etc. Toutes méthodes que les autorités ont le plus grand mal à prohiber, même quand elles sont motivées pour le faire. Car, rappelons en plaisantant, « le gendarmegendarme est hydrophobehydrophobe » : il s'aventure fort peu à quelques centaines de kilomètres des côtes !
Résultat logique de cette véritable course aux armements : aujourd'hui, on estime que 29 % des 600 espèces de poissons et crustacéscrustacés sont en passe de s'éteindre, et que 90 % de la population des grands poissons (thonthon, makaire, requin, cabillaud et flétan) a déjà disparu.