La découverte de nombreux fossiles d’une nouvelle espèce de plante à fleurs remet en question les théories admises. Elle suggère que les angiospermes ont pu apparaître quelque 50 millions d’années plus tôt que prévu. De quoi relancer le débat…


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    Celles que les spécialistes appellent les angiospermes -- comprenez les plantes à fleurs -- représentent plus de 90 % des espèces végétales terrestres. Pourtant leur origine reste floue. Elle est généralement datée de quelque 130 millions d'années. Cependant, certains indices laissent penser que les plantes à fleurs sont plus âgées.

    Jusqu'à présent, aucun fossile n'avait permis de confirmer cette hypothèse. Mais la découverte d'une nouvelle espèce fossilisée, baptisée Nanjinganthus dendrostyla, suggère que des plantes ont pu fleurir au Jurassique ancien, il y a plus de 174 millions d'années.

    Un fossile de <em>Nanjinganthus dendrostyla</em> montrant son ovaire (en bas au centre), ses sépales et ses pétales (sur les côtés) et son sommet en forme d’arbre. © Fu and al., Académie chinoise des sciences
    Un fossile de Nanjinganthus dendrostyla montrant son ovaire (en bas au centre), ses sépales et ses pétales (sur les côtés) et son sommet en forme d’arbre. © Fu and al., Académie chinoise des sciences

    Une plante à fleurs à l’origine de toutes les autres ?

    Les chercheurs ont étudié plus de 250 spécimens trouvés sur un affleurement rocheux de la région de Nankin (Chine). Une abondance de fossiles qui leur a permis de les observer en haute résolution, sous différents angles et avec divers grossissements. De quoi reconstituer les caractéristiques de Nanjinganthus dendrostyla.

    Ils ont ainsi établi que la plante présentait un réceptacle invaginé en forme de coupe et un toittoit ovarien qui, ensemble, enfermaient ovules et graines. Une caractéristique qui la distingue d'autres angiospermes trouvées dans la région et datant du Jurassique moyen. La question qui se pose à présent est de savoir si les angiospermes sont monophylétiquesmonophylétiques -- c'est-à-dire qu'il a existé des souches de type Nanjinganthus dendrostyla qui ont donné naissance à toutes les espèces ultérieures -- ou polyphylétiquespolyphylétiques. Dans ce dernier cas, Nanjinganthus dendrostyla pourrait ne représenter qu'une impasse évolutive.


    Les plantes à fleurs prennent de l’âge : 100 millions d’années de plus...

    L'histoire des plantes à fleurs vient de vieillir de 100 millions d'années d'un coup ! Des grains de pollenpollen d'angiospermes ont été trouvés dans des roches datant du TriasTrias moyen, dans le nord de la Suisse. Ils s'ajoutent à d'autres éléments prouvant que l'apparition de ce groupe n'a pas eu lieu au CrétacéCrétacé

    Article de Quentin MauguitQuentin Mauguit paru le 06/05/2017

    La planète compte à ce jour plus de 230.000 espèces de plantes à fleurs, dont un grand nombre joue un rôle considérable dans notre économie. En effet, la majorité des espèces végétales cultivées dans le monde appartiennent à ce groupe. Ne l'oublions pas, qui dit fleurs dit aussi fruits. Ce taxontaxon, qui a conquis tous les milieux terrestres, est donc riche, mais quand est-il apparu ?

    Actuellement, la plupart des spécialistes estiment que les angiospermes ont fait leur apparition au Crétacé inférieur, voici 140 à 135 millions d'années, ce que nous savons grâce à la découverte de grains de pollen fossilisés. À partir de cette époque, d'autres restes fossiles ont été trouvés pour toutes les ères géologiquesères géologiques qui ont suivi, et ce de manière ininterrompue. Ils forment ainsi une ressource exploitée par de nombreux géologuesgéologues ou paléontologuespaléontologues, par exemple pour dater les roches qu'ils rencontrent. Cependant, des analyses moléculaires et certaines découvertes remettent cette datation en doute.

    Elles viennent de se voir confirmées, puisqu'un ancêtre des angiospermes actuelles a vécu voilà 247 à 245 millions d'années, d'après des grains de pollen mis au jour en Suisse. Ce groupe vient donc de vieillir de 100 millions d'années ! La nouvelle a été présentée dans la revue Frontiers in Plant Science par Peter Hochuli (université de Zurich) et Susanne Feist-Burkhardt.

    Les grains de pollen sont des gamétophytes, car ils renferment les gamètes mâles des plantes à fleurs. Selon les espèces, ils mesurent entre 7 et 150 µm de long. Ils sont initialement contenus dans des anthères, aux extrémités des étamines (à l'image). © Jeremy Vandel, Flickr, cc by 2.0
    Les grains de pollen sont des gamétophytes, car ils renferment les gamètes mâles des plantes à fleurs. Selon les espèces, ils mesurent entre 7 et 150 µm de long. Ils sont initialement contenus dans des anthères, aux extrémités des étamines (à l'image). © Jeremy Vandel, Flickr, cc by 2.0

    Des grains de pollen aux caractéristiques sans équivoque

    Six types de grains de pollen différents ont été trouvés dans deux carottescarottes prélevées dans le nord de la Suisse, à Weiach et Leuggern. Ils reposaient à environ 900 m de profondeur, dans des roches datant donc du Trias moyen, précisément de l'Anisien. Après avoir été extraits, les grains ont été observés à l'aide d'un microscope confocal à balayage lasermicroscope confocal à balayage laser qui offre un rendu tridimensionnel. Ils présentent les caractéristiques propres aux plus vieilles angiospermes, à savoir une paroi végétale perforée de trous et parcourue par un unique sillon.

    Il ne s'agit pas de la première découverte de ce type pour les deux chercheurs, qui ont visiblement eu du mal à se faire entendre auparavant. En 2004, ils avaient déjà découvert des grains de pollen datant du Trias moyen. Ils reposaient dans des sédimentssédiments extraits du fond de la mer de Barents, au sud du Svalbard, soit à plus de 3.000 km de la Suisse. La structure de tous ces grains de pollen suggère que la pollinisation était accomplie par des insectes, probablement par des coléoptèrescoléoptères. En effet, les abeilles seraient apparues 100 millions d'années plus tard.

    Il reste maintenant à savoir si ces découvertes vont être reconnues, auquel cas l'histoire évolutive des angiospermes va changer. Cependant, il est vrai qu'une question embarrassante se pose : comment expliquer un trou de 100 millions d'années, jusqu'au Crétacé inférieur, dans les enregistrements fossiles ?