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L'ingénieur Shanhui Fan au centre est le leader du projet. Derrière, ses deux doctorants impliqués dans le projet, Aaswath Raman (à gauche) et Eden Rephaeli (à droite). © Université de Stanford
Et s'il suffisait de réexpédier le rayonnement solaire vers l'espace pour refroidir les immeubles, l'intérieur des voitures ou des maisons ? L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergieAgence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) estime à 5 % le surcoût annuel de la climatisationclimatisation des automobilesautomobiles. Par ailleurs, la plupart des systèmes d'air conditionnéair conditionné utilisent de puissants gaz à effet de serre, comme les hydrofluorocarbures (HFC).
Les bâtiments chauffent parce qu'ils absorbent le rayonnement solaire. L'idée de réfléchir les rayons solaires peut faire sourire, pourtant elle est plutôt ingénieuse. Des chercheurs de l'université Stanford (Californie) ont développé un dispositif qui pourrait bien remplacer les climatiseurs énergivores. La structure a un double effet : d'une part, elle réfléchit le plus possible les rayons solaires, et d'autre part, elle réémet vers l'espace la chaleurchaleur accumulée dans les bâtiments.
Le dispositif remplit deux fonctions. Une première couche réfléchit la lumière du soleil pour maintenir la structure fraîche (en jaune). Une seconde couche rayonne la chaleur du bâtiment vers l'extérieur dans une longueur d'onde telle qu'elle n'est pas piégée dans l'atmosphère par les gaz à effet de serre (en violet). © Eden Rephaeli et al., Nano Letters
Ingénieux sur le papier, mais difficile à mettre en œuvre en pratique. Le dispositif doit refléter un maximum de lumière solaire. S'il n'en réfléchit pas assez, il absorbera trop de rayonnement et le réémettra sous forme de chaleur, ce qui inhiberait à terme l'effet de refroidissement recherché. Le dispositif doit aussi être capable d'évacuer la chaleur du bâtiment, qui se trouve sous forme d'infrarougeinfrarouge. Or, il doit émettre dans une bande infrarouge spécifique, qui n'interagit pas avec l'atmosphère. En effet, une grande partie du rayonnement infrarouge n'est pas transparenttransparent à l'atmosphère, c'est d'ailleurs le moteur de l'effet de serre. Le défi est donc de taille.
Émission transparente pour l’atmosphère
Le dispositif développé par l'équipe du chercheur Shanhui Fan répond à ces deux critères. C'est un miroirmiroir à large bandeà large bande, efficace pour renvoyer le rayonnement solaire et émettre également un rayonnement thermique dans la gamme de longueurs d'ondelongueurs d'onde requise pour ne pas être perturbée par l'atmosphère. Les scientifiques de Stanford ont réussi car ils se sont tournés vers des matériaux photoniques structurés.
Ces derniers sont conçus pour améliorer ou supprimer la réflexion de la lumièrelumière à certaines longueurs d'onde. « Nous combinons l'émetteur thermique et le réflecteur solaire en un seul appareil, le rendant à la fois plus performant et beaucoup plus robuste », explique Aaswath Raman, un doctorant travaillant sur le projet. Le matériaumatériau en question est constitué de quartz et de carbure de silicium : ce sont les composés les plus réfléchissants connus. En utilisant ces matériaux nanophotoniques, les chercheurs ont été capables de supprimer de façon significative l'absorption du rayonnement solaire.
Aussi efficace que les panneaux solaires actuels
D'après les résultats publiés dans les Nano Letters, la puissance de refroidissement avoisinerait 100 wattswatts. C'est la même puissance que pour les panneaux solaires actuels, qui ont un rendement de 10 %. Théoriquement donc, ce dispositif pourrait remplacer les panneaux solaires sur les toitstoits d'immeubles qui servent à générer l'électricité pour les climatiseurs. Avec seulement 10 % de son toit couvert de panneaux de refroidissement, une maison familiale typique pourrait ainsi combler 35 % de ses besoins en air conditionné pendant les heures les plus chaudes de l'été.
Il s'agit d'une technologie passive, le dispositif ne nécessitant aucune énergie. Si l'on en croit les chercheurs, les matériaux qui constitueraient l'appareil ne sont pas très coûteux. Ils pourraient être produits par lithographie ou par d'autres techniques de fabrication à faible coût. En attendant, l'équipe vient de recevoir un prix de 400.000 dollars (un peu plus de 300.000 euros) pour construire un prototype à échelle réelle et tester son efficacité en vue de le commercialiser.