Sur sa route qui le rapproche des flancs du mont Sharp, Curiosity traverse des paysages semés de cailloux qui menacent l’intégrité de ses six roues motrices. Pour que le rover se rende sur le prochain site candidat à forer, ingénieurs et scientifiques de la mission songent à lui faire emprunter une route qui paraît moins périlleuse.

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    En bientôt 18 mois et quelque 530 sols (jours martiens) d'exploration, Curiosity a déjà parcouru 4,89 kilomètres à travers les paysages désolés de l'immense cratère Gale (155 km de diamètre), jonché d'innombrables cailloux et de roches de toutes tailles, parfois très acérés. Les roues en aluminium du rover essuient, depuis les trois derniers mois de 2013, un nombre croissant de coups, petits trous et autres égratignures superficielles. Souhaitant éviter des dommages plus importants sinon la casse, les ingénieurs examinent les cartes de la région réalisées avec les images aériennes capturées avec la sonde spatiale Mars Reconnaissance OrbiterMars Reconnaissance Orbiter (MRO), afin d'esquisser de nouvelles pistes, beaucoup moins périlleuses, qui le conduiront à terme vers les premiers contrefortscontreforts du mont Sharp, encore distant de plusieurs kilomètres.

    À présent, CuriosityCuriosity se dirige vers le prochain site candidat à forer, nommé KMS-9, que les scientifiques ont sélectionné d'après ses caractéristiques géologiques identifiées avec les spectromètres de l'orbiteur MRO. « À KMS-9, nous observons trois types de terrains exposés dont les surfaces sont relativement peu poussiéreuses », explique Katie Stack, membre de l'équipe scientifique du California Institute of Technology (Caltech). « Cette région est attirante, car nous pouvons voir des unités de terrains différents de ce que Curiosity a visité jusqu'à présent. L'une d'elles présente des stries orientées toutes dans la même direction. Une autre est lisse, sans stries. » Elle ajoute que « nous ne savons pas encore ce que c'est ». Mais le chemin n'est pas de tout repos pour les ingénieurs.

    Sur cette photographie réalisée par la caméra HiRise de l'orbiteur MRO, on peut voir les traces laissées dans le sillage du rover Curiosity au cours de son périple qui le rapproche des flancs du mont Sharp. Cliquez sur l’image pour l’agrandir et observer les fines traces noires. © Nasa, JPL-Caltech

    Sur cette photographie réalisée par la caméra HiRise de l'orbiteur MRO, on peut voir les traces laissées dans le sillage du rover Curiosity au cours de son périple qui le rapproche des flancs du mont Sharp. Cliquez sur l’image pour l’agrandir et observer les fines traces noires. © Nasa, JPL-Caltech

    Dilemme sur la route à suivre par Curiosity

    Curiosity, qui a progressé de 264,7 mètres sur Mars depuis le début de la nouvelle année, est actuellement confronté à un dilemme. Suivre, en dépit des terrains rocailleux, la route initialement prévue, ou tenter une voie secondaire qui paraît plus sereine et lisse ? En effet, constatant sur son chemin l'existence de ce qui ressemble à un passage entre deux masses rocheuses -- petits monticules -- d'une hauteur estimée à un mètre, le rover s'est arrêté plusieurs jours, piqué par la curiosité. Baptisé DingoDingo Gap, ce creux est une véritable tentation pour toute l'équipe, mais avant de prendre une décision, « il vaut mieux aller vérifier de plus près », prévient Jim Erickson, chef du projet Curiosity au JPLJPL. « Nous allons jeter un coup d'œilœil par-dessus la dune dans la vallée immédiatement à l'ouest pour voir si le terrain est aussi bien que les analyses des images orbitalesorbitales le laissent entendre. »

    Survolés régulièrement par MRO, ingénieurs et scientifiques de la mission Mars Science Laboratory (MSL) disposent en appui de nombreuses images en haute résolutionrésolution capturées avec la caméra HiRise (High Resolution Imaging Science Experiment)) de toute la région du grand cratère d'impact. Soit une mosaïque de 140 carrés de 1,5 km de côté. Déposé le 6 août 2012 dans l'aire dite de Yellowknife, le rover a depuis traversé celles de Mawson et de Coeymans. Il progresse désormais dans celle de Kimberley, où le site KMS-9 attire l'attention.

    Mosaïque de 16 images capturées avec la caméra de navigation (NavCam) de Curiosity, le 30 janvier (sol 528). Le passage Dingo Gap est envisagé comme nouvelle route vers le prochain site de forage KMS-9. Les vallées de l’ouest s’étalent en contrebas de ce petit promontoire. Les dunes rocailleuses à gauche et à droite mesurent un mètre de hauteur. © Nasa, JPL, MSSS

    Mosaïque de 16 images capturées avec la caméra de navigation (NavCam) de Curiosity, le 30 janvier (sol 528). Le passage Dingo Gap est envisagé comme nouvelle route vers le prochain site de forage KMS-9. Les vallées de l’ouest s’étalent en contrebas de ce petit promontoire. Les dunes rocailleuses à gauche et à droite mesurent un mètre de hauteur. © Nasa, JPL, MSSS

    Curiosity mis à l’épreuve… sur Terre

    Culminant à 5.500 m au-dessus du plancherplancher poussiéreux et rocailleux que sillonne le rover, le mont Sharp -- Aeolis Mons -- et ses empilements de couches géologiques sont sa destination ultime pour mener ses investigations. En attendant, plusieurs tests exécutés sur Terre par le double de Curiosity veillent à vérifier toutes ses possibilités de forages. « Ces tests nous mettent en confiance pour les opérations que nous sommes susceptibles de réaliser lorsque Curiosity sera sur les pentes du mont Sharp », commente Daniel Limonadi, ingénieur en chef des systèmes d'échantillonnageéchantillonnage du bras du robotrobot. Parallèlement, des solutions aux problèmes posés par les six roues motrices sont activement recherchées et expérimentées pour minimiser l'usure.

    À l'autre bout de la planète, non loin aussi de la ligne équatoriale, le vaillant Opportunity (Mars Exploration Rover), qui vient de fêter ses dix ans d'exploration et près de 40 km parcourus sur Mars, continue de travailler sur un site très intéressant où affleurent des roches riches en minérauxminéraux hydratés comme la smectite ferrique, sur le rebord du cratère EndeavourEndeavour. Quant au caillou apparu, non sans surprise, à ses côtés voici quelques semaines, sa nature très différente des roches observées jusque-là par les scientifiques intrigue encore.