Depuis plusieurs mois, le premier avionneur mondial est dans la tourmente. Les avions conçus par Boeing connaissent de nombreuses avaries depuis le mois de janvier 2024, impactant l’image de la firme, acculée entre problèmes techniques, procès et pertes financières massives.


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    Les premiers mois de l'année 2024 ont été sombres pour le constructeur américain Boeing. Problèmes techniques et accidentsaccidents, procès, chute en bourse... Le premier avionneur mondial traverse une phase particulièrement délicate, exacerbée par une série d'incidents particulièrement spectaculaires, provoquant la méfiance des clients et des investisseurs. Mais qu'est-ce qui peut justifier de tels problèmes pour un fabricant de cette ampleur ? Retour sur plusieurs pistes et éléments pouvant expliquer les difficultés traversées par Boeing depuis le début de l'année 2024.

    Fraudes et défauts de fabrication chez le premier avionneur du monde

    Le cœur du problème débute en 2018, avec le vol 610 opéré par LionLion AirAir depuis l'Indonésie. Treize minutes après son décollage depuis l'aéroport Soekarno-Hatta de Jakarta, l'un des nouveaux 737 MAX de la compagnie s'abîme en mer de JavaJava, tuant tous ses passagers et son équipage.

    Quelques mois plus tard, le 10 mars 2019, un 737 MAX de la compagnie Ethiopian Airlines se crashe, six minutes après son décollage de l'aéroport Bole, d'Addis-Abeba. De nouveau, l'intégralité des personnes à bord meurt, portant à 346 le nombre de morts. Ces deux incidents majeurs poussent les compagnies aériennes à travers le monde à suspendre les vols de 737 MAX récemment livrés par Boeing.

    Le scandale éclate rapidement : un système de stabilisation, le MCAS (Maneuvering Cheracteristics Augmentation System)), provoquait sur les deux vols l'entrée de mauvaises commandes ayant fait piquer les 737 MAX vers le sol. Des enquêtes permettent de déterminer que Boeing avait connaissance de ce « vice caché », l'ayant sciemment dissimulé à ses clients et investisseurs. Depuis 2019, Boeing a ainsi perdu 32 milliards de dollars, dû à des annulations de commande, des retards de production ou encore des frais juridiques.

    C'est en 2024 que le nombre d'incidents repart à la hausse pour Boeing. En janvier, un 737 MAX-9 d’Alaska Airlines perd une portion de son fuselagefuselage, six minutes après le décollage. Si l'appareil se pose sans encombres, la multinationale est rapidement pointée du doigt. Les mois suivants, des problèmes plus ou moins graves se succèdent. En mai, un 767 utilisé par la compagnie FedEx atterrissait à Istanbul sans que son train avant se soit déployé.

    Le même mois, un 787-9 d'Air France était dérouté vers un aéroport du Canada après qu'une odeur de chaud a surgi dans la cabine après quelques heures de vol. Toujours en mai, un 747 reliant l'Indonésie à l'Arabie saoudite était contraint à rebrousser chemin après qu'un moteur a projeté des étincelles lors du décollage. En juin, un 737-900 de la compagnie japonaise ANA devait amorcer un atterrissage d'urgence après une chute de la pressionpression en cabine, à 3 000 mètres d'altitude.

    La chute d’un empire ?

    La série noire ne s'arrête donc pas pour le constructeur américain, épinglé par les autorités pour les manquements constatés sur les appareils Boeing. La Federal Aviation Administration (FAA) américaine s'engageait dès janvier 2024 à enquêter sur la production et la maintenance des avions fabriqués par Boeing.

    En 2019, de nombreux 737 MAX se sont retrouvés cloués au sol après les crashs de Lion Air et Ethiopian Airlines. © SounderBruce, <em>Wikimedia Commons</em>, CC BY SA 4.0 
    En 2019, de nombreux 737 MAX se sont retrouvés cloués au sol après les crashs de Lion Air et Ethiopian Airlines. © SounderBruce, Wikimedia Commons, CC BY SA 4.0 

    Plusieurs thèses viennent expliquer les incidents observés ces derniers mois. Premièrement, des problèmes de conception et de manufacture. La pandémiepandémie de Covid-19Covid-19 a impacté durablement les processus de production depuis 2020, avec un retour à la normale relativement tardif. Ces problèmes de production ne se ressentent qu'une fois l'avion mis en service, à l'instar du 737 MAX d'Alaska Airlines ayant perdu une partie de son fuselage en vol. Certains pointent aussi des défauts de maintenance à travers le monde.

    Une fois qu'un avion quitte la ligne de production pour intégrer la flotte d'une compagnie, il est alors de la responsabilité de la firme de maintenir l'appareil opérationnel. Si les processus de maintenance sont exhaustifs et se font sous la direction des avionneurs, il existe des variables pouvant expliquer différentes méthodes de maintenance entre l'Europe ou l'Asie.

    Malgré les événements de ces derniers mois, les avions restent les moyens de transport les plus sûrs au monde. Et si certains incidents subis par Boeing paraissent particulièrement impressionnants, aucun mort n’est à dénombrer. Pour le fabricant américain, des mesures sont prises pour améliorer les contrôles techniques et les tests de sécurité lors de la conception des avions puis de la maintenance. Au cours des prochaines semaines, Boeing devrait plaider coupable dans le cadre du procès initié après le crash des 737 MAX en 2018 et 2019, selon le Département de la Justice des États-Unis.