Depuis son apparition, le Web a connu plusieurs moutures. Le Web1 diffusait de l’information à l’internaute. Le Web 2.0 lui a donné un rôle plus actif comme avec les réseaux sociaux. Le Web 3.0, pour sa part, voudrait imposer un nouveau modèle potentiellement indépendant des grandes structures à la Google ou Facebook. Découvrons avec davantage de détails ces trois formes du Web qui en réalité, sont appelées à coexister durant longtemps…


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    On ne le sait pas toujours, mais Internet existait bien avant le Web. Il a été conceptualisé dès 1969, a connu diverses formes avant de voir le jour officiellement en 1983 avec l'avènement de TCP/IP, protocole de communication entre systèmes disparates.

    Pour sa part, le Web a vu le jour en 1991 sous l'impulsion du chercheur Tim Berners-LeeTim Berners-Lee (au CernCern à Genève). Ce système proposait de pouvoir créer aisément des pages d'informations, et d'établir des liens entre divers serveurs d'Internet.

    Le Web a pris son véritable essor en 1993 grâce à un logiciel développé par Marc Andreessen. Grâce à Mosaic, il est devenu possible de « naviguer » aisément sur le Web au travers d'une interface graphique/souris. Mosaic a été l'ancêtre de GoogleGoogle Chrome, Firefox, MicrosoftMicrosoft EdgeEdge et autres logiciels tels que Safari ou Opera.

    Le logiciel Mosaic qu’a développé Marc Andresseen a permis au Web de prendre son essor dès 1993. Il est l’ancêtre de navigateurs tels que Chrome ou Safari. © <em>National Center for Supercomputing Applications</em>
    Le logiciel Mosaic qu’a développé Marc Andresseen a permis au Web de prendre son essor dès 1993. Il est l’ancêtre de navigateurs tels que Chrome ou Safari. © National Center for Supercomputing Applications

    Le Web1

    La première version du Web est aujourd'hui appelée le Web1 et il est courant de considérer que son règne s'est étendu de 1993 jusqu'au début des années 2000.

    Mosaic est rapidement devenu un logiciel fort populaire auprès de la communauté universitaire. En septembre 1994, une version améliorée, Netscape Navigator a ouvert le Web au grand public. Dès le début de l'année 1995, on comptait une dizaine de milliers de sites Web : la Maison Blanche, la NasaNasa, l'Encyclopedia Britannica, le Louvre... Un premier annuaire s'est imposé, Yahoo!

    Ce qui caractérise le Web1 est que nous avons affaire à des pages statiques. Les internautes d'alors sont pour l'essentiel des consommateurs d'information, ils lisent le contenu des pages et découvrent la magie de l'hypertexte : on clique sur un lien et on est envoyé vers une page d'un autre site.

    Globalement, ce Web originel a pour but essentiel d'aider tout un chacun à trouver plus aisément de l'information. Les serveurs se contentent d'envoyer des pages aux utilisateurs. Les internautes sont avant tout des lecteurs et les pages ne leur demandent habituellement pas de fournir du contenu complémentaire à ce qui leur est proposé.

    Il est à noter que dans cette époque pionnière, la publicité est absente du Web, et les tentatives de monétiser le Web sont même perçues de façon négative.

    L'applicationapplication phare du Web1 est le navigateurnavigateur qui permet d'accéder aux pages et d'utiliser les liens hypertextes. Comme Google propose l'algorithme le plus performant pour analyser ces pages, elle va peu à peu devenir l'entreprise dominante de cette première phase.

    Le Web 2.0

    C'est une Web designer, Darcy DiNucci, qui a inventé le terme Web 2.0 en 1999. Le terme lui-même est devenu célèbre à l'occasion de la 1re conférence sur le Web 2.0 en octobre 2004, organisée par Tim O'Reilly, John Battelle et Dale  Dougherty. Le point clé de ce nouveau Web est que l'utilisateur devient un fournisseur de contenus et non plus seulement un lecteur/spectateur.

    Dans ce document – ici en version française – Tim O’Reilly définit les tenants et aboutissants du Web 2.0. © Tim O'Reilly
    Dans ce document – ici en version française – Tim O’Reilly définit les tenants et aboutissants du Web 2.0. © Tim O'Reilly

    Le Web 2.0 est parfois appelé « Web social participatif ». Les outils mis à la portée des utilisateurs leur permettent d'interagir avec les sites Web et de créer du contenu ou d'y contribuer. Ce contenu n'est plus statique, mais dynamique. Ainsi :

    • l'encyclopédie Wikipédia est nourrie par ses utilisateurs qui écrivent des articles, lesquels peuvent être amendés/complétés par d'autres utilisateurs ;
    • des sites de vidéo comme Youtube ou Dailymotion accueillent des vidéos postées par les internautes eux-mêmes ;
    • les blogsblogs sont créés par toutes sortes de chroniqueurs estimant qu'ils ont des choses à dire sur un sujet. Leurs textes peuvent faire l'objet de commentaires/-réponses de la part de leurs lecteurs ;
    • les réseaux sociauxréseaux sociaux tels que MySpace ou FacebookFacebook présentent des informations mises en ligne par leurs usagers. Chacun peut créer son propre contenu et mobiliser son propre réseau. Ceux qui consultent ce contenu peuvent y contribuer en indiquant leur sentiment (un clic sur le bouton « J'aime »), ou une note d'appréciation/un vote. Des communautés se forment et elles évoluent selon leur propre agenda.

    En parallèle à l'essor de ce Web 2.0, l'arrivée de l'Internet mobilemobile facilite cette interaction des usagers avec les sites.

    Le Web 2.0 a pris son essor vers 2004 et c'est celui qui est encore le plus en usage aujourd'hui.

    Facebook est un exemple typique d’une application Web 2.0 : ce sont les utilisateurs qui en fournissent le contenu. © Facebook
    Facebook est un exemple typique d’une application Web 2.0 : ce sont les utilisateurs qui en fournissent le contenu. © Facebook

    Le Web 3.0

    Le terme Web 3.0Web 3.0 (Web3) a été inventé en 2014 par Gavin Wood, cofondateur d'EthereumEthereum et promoteur de la cryptomonnaiecryptomonnaie Polkadot. À la base de ce nouveau modèle se trouvent :

    • la blockchainblockchain, un type de registre décentralisé inauguré par les cryptomonnaies, mais utilisable dans d'autres formes d'applications ;
    • des applications indépendantes reposant sur ces blockchains (les smart contractssmart contracts).

    À l'origine du Web3, il y a un constat : le Web1 comme le Web 2.0 reposent sur une même architecture centralisée : celle des serveurs des géants de la Silicon ValleySilicon Valley, Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft soit les GAFAM, qui gèrent les données de leurs utilisateurs. Ces sociétés ont ainsi reproduit dans le monde d'Internet le modèle classique de l'informatique. Il en résulte diverses situations que l'on peut juger non optimales. Les géants du Web stockent des myriadesmyriades d'informations sur leurs usagers, afin de pouvoir les monétiser. La compétition est étouffée car plus un opérateur accumule de la richesse et plus il peut rendre difficile l'émergenceémergence de nouveaux concurrents.

    Gavin Wood et les autres promoteurs du Web3 soutiennent la vision d'une nouvelle architecture décentralisée avec des échanges d'utilisateur à utilisateur stockés sur une série de blockchains. En d'autres termes, avec le Web 3.0, c'est le réseau des ordinateursordinateurs connectés entre eux qui devient le serveur.

    Techniquement, le Web 3.0 se caractérise par trois critères :

    • il repose sur des smart contract, soit du code en « Open SourceOpen Source » susceptible d'être amélioré par tout un chacun sans avoir à payer des flux de royalties à des entreprises comme Microsoft ;
    • comme l'a voulu le créateur du BitcoinBitcoin, c'est le réseau lui-même qui garantit l'intégritéintégrité des communications, lesquelles sont stockées sur une blockchain partagée et consultable par tous ;
    • tous les utilisateurs peuvent bénéficier des applications du réseau sans obtenir l'autorisation d'une organisation centrale qui contrôle les services.

    Dans son mode optimal, le Web 3.0 repose sur un Web sémantiqueWeb sémantique qui suppose d'amener les ordinateurs à décoder le langage humain et à tenter de le comprendre. L'intelligence artificielleintelligence artificielle intégrée en parallèle à la structure décentralisée permet d'accumuler une mine de données et d'alimenter ainsi l'apprentissage des machines. Le Web 3.0 suppose également des graphismes en 3 dimensions comme dans les projets actuels de métavers ou dans un grand nombre de jeux vidéojeux vidéo. Enfin, il est accessible par toutes sortes d'appareils connectés, ce qui inclut l'IoT - Internet des ObjetsInternet des Objets.

    Si certains éléments du Web 3.0 sont d'ores et déjà disponibles, d'autres sont encore en cours de développement. Ainsi, la reconnaissance de la parole doit encore accomplir de grands progrès avant d'être considérée comme fiable.

    Uniswap est un bon exemple d’application du Web3 : elle ne repose pas sur un serveur central mais sur la communauté de ses utilisateurs qui peuvent librement l’utiliser pour échanger des cryptomonnaies entre elles, sans même avoir à fournir d’identité officielle. © Uniswap
    Uniswap est un bon exemple d’application du Web3 : elle ne repose pas sur un serveur central mais sur la communauté de ses utilisateurs qui peuvent librement l’utiliser pour échanger des cryptomonnaies entre elles, sans même avoir à fournir d’identité officielle. © Uniswap

    Une part d'utopie semble reposer sur ce Web 3.0 et elle n'est pas sans rappeler les débuts d'Internet où certains voulaient croire que le Web était voué à être gratuit ou encore qu'il allait aider à un rapprochement des  peuples. Il est donc probable que la réalité du Web 3.0 soit moins extraordinaire que les prédictions.

    Des obstacles importants se dressent bel et bien sur la route du Web 3.0. Il se trouve que les performances des blockchains sont structurellement faibles par rapport à l'architecture en serveur. D'énormes ressources sont consacrées à tenter de trouver des solutions à ce problème - comme le Lightning NetworkLightning Network pour le réseau Bitcoin. De plus, la décentralisation des applications est plutôt mal perçue au niveau des gouvernements car elle soulève mille questions :

    • Comment contrôler les informations qui circulent sur un Web qui n'est régi que par des smart contracts et donc des programmes autonomes ?
    • Comment être certain que l'intelligence artificielle qui est à la base des smart contracts ne recèle pas des failles que certains pourraient exploiter au détriment des internautes, comme cela s’est déjà souvent produit dans l’univers de la cryptomonnaie ?
    • Comment réprimer des délits commis par le détournement d'un code dont a priori personne ne revendique la possession ?

    Jack Dorsey, le cofondateur de TwitterTwitter a une vision plus terre à terre : il veut croire que le Web 3.0, loin de démocratiser Internet, va déplacer le pouvoir de sociétés comme Facebook vers des fonds de capital-risque, car il reste encore et toujours nécessaire de soutenir financièrement les expériences rendues possibles par ce nouveau modèle.