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Le point de départpoint de départ de ce travail est la tentative de résoudre une énigme de biochimiebiochimie. L'ADNADN présente - heureusement - une tolérance assez grande aux rayons ultravioletsultraviolets. A fortes doses et surtout à des fréquences élevées (les UVB étant plus dangereux que les UVA), ce rayonnement peut induire une modification chimique de l'ADN. La lumièrelumière agit, plus précisément, sur deux des quatre bases azotéesbases azotées, ces moléculesmolécules portées par le brin d'ADN et dont la succession forme le code génétiquecode génétique. Il s'agit de la thyminethymine et de la cytosinecytosine. Une mutation peut se produire ensuite, lors d'une copie du gènegène, quand une mauvaise base est intégrée face à cette lésion.
Mais face aux rayons UV qui traversent l'atmosphèreatmosphère et parviennent jusqu'aux organismes terrestres, les chromosomeschromosomes résistent plutôt bien, faute de quoi la vie serait toujours cantonnée au fond des océans...
Les études menées sur les bases isolées avaient mis en évidence des mécanismes expliquant assez bien cette « photostabilité », c'est-à-dire la résistancerésistance de ces molécules aux rayonnements lumineux. Mais ces mécanismes ne semblent pas efficaces au sein même du brin d'ADN. Là résidait l'énigme. Il doit donc exister un autre phénomène à l'origine de la photostabilité de l'ADN.
C'est ce qu'ont cherché à comprendre Nina Schwalb et Friedrich Temps, de l'Institut de chimiechimie physiquephysique à l'université de Kiel (Allemagne), à l'aide d'un laserlaser capable d'envoyer des impulsions dont la duréedurée se mesure en femtosecondesfemtosecondes. En testant de multiples configurations d'ADN de synthèse, ces deux chercheurs ont mis en évidence, pour la première fois, une variabilité de la réaction du brin d'ADN selon la succession des bases. En d'autres termes, les différentes régions du code génétique ne sont pas toutes aussi résistantes à la lumière UV. « L'ADN atteint sa grande photostabilité grâce à sa structure en double hélice, conclut Friedrich Temps. Les interactions entre les bases successives et les liaisons hydrogèneliaisons hydrogène entre les deux brins jouent un rôle essentiel. »
Un œil neuf sur l'ADN
Les différences tiennent au temps total de la réaction physique. Sous l'effet de l'impulsion laser, les molécules absorbent de l'énergieénergie et l'évacuent ensuite en réémettant des photonsphotons : c'est le mécanisme classique de la fluorescence. Nina Schwalb et Friedrich Temps ont réussi à mesurer précisément ce délai et observent qu'il varie beaucoup selon la séquence de bases concernée. Le minimum est de 100 femtosecondes mais il peut être des milliers de fois plus long.
Première applicationapplication possible : repérer une séquence génétique à l'aide d'un laser, c'est-à-dire beaucoup plus rapidement qu'en faisant appel aux méthodes chimiques habituelles. Les chercheurs imaginent des possibilités plus vastes s'il s'avère possible de mieux comprendre les phénomènes en jeu et de relier les séquences génétiques à des propriétés physiques. A long terme, expliquent-ils, il sera peut-être possible, à l'aide d'une impulsion laser, d'échanger une base contre une autre, par exemple pour réparer une mutation.
La possibilité d'utiliser la molécule d'ADN pour réaliser des nanostructures ayant déjà été explorée, les deux chercheurs allemands voient bien d'autres opportunités supplémentaires. « Il pourrait être même possible dans certaines circonstances de fabriquer des transistors avec de l'ADN qui travaillerait grâce à leurs liaisons hydrogène... »
Ces applications sont certes très hypothétiques mais elles illustrent bien les changements conceptuels qui apparaissent inévitablement lorsque des scientifiques d'un autre domaine - les physiciensphysiciens ici, en l'occurrence - investissent un secteur réservé jusque-là à d'autres, ici les biochimistesbiochimistes...