Avec les conteneurs maritimes transformés en fermes indoor, Guillaume Fourdinier et Gonzague Gru, fondateurs de la start-up Agricool, veulent amener les produits frais, sans pesticides, au cœur des villes et au plus près des consommateurs. Modulaires, ces conteneurs permettent de développer la technologie de l’aéroponie et de répondre à la demande des citadins. Et comme circuit court, il est difficile de faire mieux.
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De quelques fraisesfraises cultivées dans un appartement, Agricool est passée à la start-up de 65 salariés qui révolutionne la FoodTech avec son idée de conteneurs maritimes transformés en fermes indoor de production de fruits et légumes distribués ensuite localement au cœur des villes.
D’où est partie l’idée d’Agricool ?
Guillaume Fourdinier : Gonzague Gru et moi-même sommes fils d'agriculteurs du Pas-de-Calais. Nous avons été nourris avec une alimentation locale permanente que nous n'avons pas retrouvée à notre arrivée en ville pour nos études. Tout est parti de là. L'offre locale de fruits et légumes n'étant pas suffisante par rapport au nombre important d'habitants d'une ville, il faut les importer, malheureusement souvent de très loin, 1.500 kilomètres parfois, avec forcément une conséquence sur la fraîcheur, la qualité et la valeur nutritionnelle en finalité. Les initiatives comme « La Ruche qui dit Oui » ou les AMAP (Associations pour le maintien d'une agriculture paysanneAssociations pour le maintien d'une agriculture paysanne, ndlr) vont dans ce sens mais manquent de producteurs pour satisfaire la demande. D'où notre idée de cultiver des fruits et herbes aromatiquesaromatiques dans des conteneurs, en proximité des villes.
L’offre se limite pour le moment à cinq produits, pourquoi ?
G. F. : Nous ne réfléchissons pas en termes d'offre mais plutôt de demande. Quel est le besoin en fruits et légumes des habitants d'une ville et donc comment les produire qualitativement et localement. Nous avons commencé par cultiver des fraises dans un appartement avant de trouver l'idée du conteneur. Il permet non seulement d'être placé dans les villes mais aussi de développer l’aéroponie, une forme de culture hors-sol qui approvisionne la plante en eau et en éléments nutritifs, en circuit fermé, donc avec une consommation d'eau réduite de 95 % par rapport à un système traditionnel. Cultivés sans pesticides, les fruits et herbes aromatiques sont cueillis directement à maturité, distribués le jour même à quelques kilomètres, ce qui réduit fortement l'impact carbonecarbone du transport.
Ne craignez-vous pas de mettre encore plus en difficulté une agriculture rurale déjà à la peine ?
G. F. : Notre volonté est justement de soutenir l’agriculture dite traditionnelle et non de la remplacer. D'ailleurs, nous échangeons très régulièrement avec des producteurs de fraises, ce qui nous permet à la fois d'apprendre d'eux et de ne pas « réinventer la roue » parfois. Eux sont challengés un peu dans leurs méthodes de production. C'est très enrichissant. Sachant qu'en France, plus de 26 m² de terres agricoles disparaissent chaque seconde et à l'inverse 70 % de la population devrait vivre en ville à l’horizon 2050, nous avons intérêt à travailler ensemble.
Que pensez-vous du mouvement de la FoodTech ?
G. F. : Je trouve le terme un peu galvaudé, du fait notamment qu'y sont intégrés autant les entreprises de livraison de repas que des nouveaux modèles agricoles, c'est un spectrespectre très large... Cela dit, c'est plutôt une bonne chose que des personnes se mobilisent en faveur de l'alimentation et qu'elles soient soutenues dans leur entreprise. Beaucoup de bonnes idées sont en train de prendre racine comme par exemple les nouvelles protéinesprotéines avec Ynsect et Innovafeed, ou ceux qui luttent contre le gaspillage alimentaire avec Phenix et Too Good To Go. À chacun son projet, son histoire et sa solution, mais si ça peut contribuer à rendre le monde meilleur, tant mieux !
Est-ce que la technologie est un bon vecteur pour y parvenir ?
G. F. : Je suis convaincu que la technologie, utilisée à bon escient, est en effet un bon outil. C'est ce qui nous a permis d'être les premiers au monde à créer ce type de fermes indoor modulaires et de diviser notre consommation d'énergieénergie par 10 en 5 ans. Alors oui, malheureusement, ces technologies sont encore un peu coûteuses, ce qui a un impact sur les prix. C'est d'ailleurs pour ça que nous avons choisi de travailler avec la grande distribution : passer de la niche à la norme pour que le plus grand nombre puisse bénéficier de ces produits frais. Mais, comme l'ordinateur qui donne désormais accès à l'éducation pour tous, si nos technologies se démocratisent, elles pourront aussi permettre pourquoi pas un jour de lutter contre la malnutrition partout dans le monde !