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L'affaire remonte à 2001, quand Guillaume Tena (connu sous le pseudonyme Guillermito) identifie puis publie dans des forums spécialisés, un certain nombre d'articles décrivant les faiblesses d'un logiciel antivirus français qui, selon son éditeur, est capable d'arrêter 100% des virus.
Tegam, éditeur de l'antivirus en question, n'a pas apprécié les critiques de ce chercheur et a donc déposé plainte contre X. Mis en examen pour "contrefaçon et recel de contrefaçon", Tena se voit reprocher la publication d'un Proof of Concept (Exploit) "reprenant et copiant une partie de la structure/code de l'antivirus" (désassemblage), violant ainsi l'article 335.2 du code de la propriété intellectuelle.
L'avocatavocat de Tegam a conclu que "le délit de contrefaçon par reproduction du logiciel était caractérisé dans la mesure où les modifications sur l'antivirus n'étaient pas effectuées par un simple utilisateur à des fins de compatibilité pour une utilisation personnelle, mais étaient réalisées par un internaute qui les communique à des tiers". Or, la publication d'exploits ou de Poof of Concept est chose courante dans le monde de la sécurité, puisqu'ils permettent de confirmer l'existence d'un bugbug ou d'une faille de sécurité, et d'évaluer les risques réels qu'encourent les internautes utilisant un produit vulnérable. L'expert informatique désigné par le juge d'instruction aurait indiqué pour sa part, dans son rapport d'expertise, que "Guillaume Tena disposait de compétences indiscutables en matièrematière virale et anti-virale, et avait dénoncé avec pertinence les failles de cet antivirus".
Après deux années de procédures judiciaires, la charge de "recel de contrefaçon" a été annulée par le juge d'instruction. Le chef de "contrefaçon de logiciels" quant à lui, sera jugé au Tribunal de Grande Instance de Paris, le 5 octobre 2004 à 13h30 (31ème Chambre /1, Tribunal de Grande Instance de Paris, 4 Boulevard du Palais, 75100 Paris).
Une éventuelle condamnation de Guillermito pourrait tuer la recherche et la divulgation des failles de sécurité en France, une recherche déjà "bridée" avec l'article 46 de la Loi pour la confiance dans l'économie numériquenumérique (Loi n° 2004-575 du 21 Juin 2004- JO n° 143 du 22 Juin 2004).
La révélation d'une faille de sécurité nécessiterait alors, non seulement un "motif légitime", mais aussi l'accord préalable de l'éditeur ou du constructeur, une situation inimaginable et inacceptable dans tout autre domaine de recherche scientifique Imaginez le scandale si une société pharmaceutique portait plainte contre un chercheur biologiste ayant révélé, par exemple, qu'un médicament commercialisé n'était pas aussi efficace que ce que prétendait le laboratoire produisant ce médicament.
Nous espérons que le jugement du 05 Octobre 2004 sera favorable à Guillaume Tena et au full-disclosure, ce qui évitera l'instauration d'une sécurité passive en France.
Par La rédaction © K-OTik.COM
Addendum, par Jean-Pierre LouvetJean-Pierre Louvet - Futura-Sciences
Guillermito est un participant actif du groupe de news fr.comp.securité.virus et dans lequel divers intervenants ont souvent critiqué le principe de l'antivirus Viguard ou les affirmations de Tegam. Tegam proclame que son antivirus n'a pas besoin de mise à jour car il n'utilise pas de base de signatures virales. Au contraire il se fonde sur la détection de structures ou de comportements suspects, ce qui lui aurait permis de détecter plusieurs virus ou vers importants dès leur apparition. Selon Tegam il arrêterait donc 100% des programmes malveillants.
On comprendra aisément que nous n'ouvrions pas ici de discussion sur ce sujet, même en restant sur un plan strictement technique. Par contre on notera que Guillermito n'est pas poursuivi pour affirmations mensongères, mais uniquement pour avoir fouillé dans les arcanes de ce programme.