L'industrie automobile fait face à un nouveau défi. Après le scandale du dieselgate, un « electric gate » se profile à l'horizon. La ruée vers la voiture électrique cache-t-elle un désastre environnemental annoncé ? Entre promesses de décarbonation et réalités techniques, le chemin vers une mobilité propre s'annonce semé d'embûches.

 


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    L'Union européenne a fixé l'objectif ambitieux de mettre fin à la vente de voitures thermiques neuves d'ici 2035. Cette décision s'inscrit dans une stratégie globale visant la neutralité carboneneutralité carbone. D'un autre côté, la transition vers le tout-électrique soulève de nombreuses interrogations. L'ingénieur Laurent Castaignède, dans son ouvrage La ruée vers la voiture électrique, met en lumièrelumière les défis et les paradoxes de cette révolution automobileautomobile.

    Les défis colossaux de l'électrification massive

    La conversion du parc automobile à l'électricité représente un défi titanesque. Selon l'Agence internationale de l'énergie, le nombre de véhicules électriques pourrait être multiplié par huit d'ici 2030, atteignant 250 millions d'unités. Cette croissance exponentielle soulève de sérieuses questions quant à la disponibilité des ressources nécessaires.

    L'extraction des métauxmétaux critiques, essentiels à la fabrication des batteries, constitue un enjeu majeur :

    Ces matériaux, bien qu'abondants, sont souvent peu concentrés dans le sous-sol. Leur extraction nécessitera des investissements colossaux et une consommation d'énergie considérable. De plus, leur répartition géographique inégale fait craindre l'émergenceémergence de nouveaux monopoles, à l'instar de l'OpepOpep pour le pétrolepétrole.

     Après le <em>Dieselgate</em>, un <em>Electric-gate</em> se profile à l'horizon : le risque est grand de recharger les voitures électriques avec de l'électricité produite à partir de gaz naturel ou de charbon. © DR
     Après le Dieselgate, un Electric-gate se profile à l'horizon : le risque est grand de recharger les voitures électriques avec de l'électricité produite à partir de gaz naturel ou de charbon. © DR

    L'illusion du « tout propre »

    L'idée reçue selon laquelle les voitures électriques seraient intrinsèquement « propres » mérite d'être nuancée. La question de l'origine de l'électricité utilisée pour recharger ces véhicules est cruciale. Même dans des pays comme la France, réputée pour son électricité décarbonée, la réalité est plus complexe.

    Laurent Castaignède souligne que la disponibilité d'électricité bas-carbone pour de nouveaux usages n'est effective que 30 % du temps en France. Cette proportion pourrait même diminuer à l'avenir. Ainsi, le risque est grand de recharger les voitures électriques avec de l'électricité produite à partir de gaz naturel ou de charboncharbon, notamment en période hivernale.

    Pays

    Proportion d'électricité bas-carbone

    Disponibilité pour nouveaux usages

    France

    70 %

    30 %

    Allemagne

    40 %

    20 %

    Le paradoxe de l'autobésité électrique

    Un autre aspect préoccupant est la tendance à l'alourdissement des véhicules. L'électrification, loin de favoriser la sobriété, accentue ce phénomène d'« autobésité ». Les progrès techniques sont utilisés pour proposer des véhicules toujours plus imposants, au détriment de l'efficacité énergétique.

    Cette course au gigantismegigantisme est particulièrement visible avec l'essor des SUV électriques. Ces véhicules, bien que zéro émissionémission à l'usage, nécessitent plus de ressources pour leur fabrication et consomment davantage d'énergieénergie en circulation. Laurent Castaignède propose des mesures radicales pour endiguer ce phénomène :

    1. Limiter la vitessevitesse des véhicules de plus de 1,5 tonne à 90 km/h.
    2. Plafonner la vitesse de tous les véhicules à 130 km/h.
    3. Encourager la production de voitures plus légères et économes.

    Vers un inévitable « electric gate » ?

    Face à ces constats, Laurent Castaignède met en garde contre un possible « electric gate », un scandale qui pourrait éclater avant 2035. L'ingénieur prédit que nous réaliserons alors l'échec de l'électrification massive : une empreinte carbone des transports qui ne baisse pas, une pollution qui diminue peu et un gaspillage intenable des ressources métalliques.

    Pour éviter ce scénario catastrophe, une véritable transition écologique devra passer par :

    • Des voitures électriques plus légères ;
    • Une réduction du nombre de véhicules en circulation ;
    • Une « démobilité » organisée ;
    • Une diminution des distances quotidiennes.

    En définitive, la voiture électrique ne sera qu'un élément d'une solution plus globale. Il est urgent de repenser nos modes de déplacement et d'aménagement du territoire pour construire une mobilité véritablement durable. Le défi est immense, mais c'est à ce prix que nous pourrons éviter le murmur vers lequel nous fonçons actuellement.