Pour viser la neutralité carbone à l'horizon 2050, l'industrie automobile est dans l'obligation de se réinventer et de s'adapter afin d'être en phase avec le plan Climat de l'Union européenne qui stipule la fin des ventes de véhicules thermiques. Mais ce n'est qu'une étape de la transition énergétique et vers cette nécessaire mutation qui ne concerne pas seulement les constructeurs.
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La fin de la vente des voitures thermiques programmée pour 2035 représente une étape fondamentale vers l'objectif d'atteindre la neutralité carbone des transports en Europe d'ici 2050. Toute la filière automobileautomobile va devoir s'adapter, tout en convainquant les automobilistes de basculer avec elle dans cette transition énergétiquetransition énergétique. Il y a encore du pain sur la planche.
Alors que le Conseil de l'Union européenne vient d'adopter le texte concernant la fin des ventes de voitures thermiques neuves sur l'ensemble de son territoire à compter de 2035, tout reste encore à faire pour réussir cette transition énergétique désormais inévitable.
À l'occasion de la première édition du salon européen de la mobilité décarbonée, Drive to Zero, à Paris, des acteurs du secteur automobile ont pu exprimer leurs visions, leurs attentes, mais aussi leurs craintes. Pour l'Avere-France (l'association nationale pour le développement de la mobilité électrique), il est ainsi fondamental que les Français soient mieux informés sur les infrastructures mises à leur disposition dans le cadre de la transition énergétique.
Déployer les infrastructures nécessaires
Son président Antoine Herteman l'a rappelé : « Savoir combien il y a de bornes publiques disponibles, c'est essentiel pour le grand public. On était il y a cinq jours à 95 755. Nous proposons également le taux de disponibilité de ces bornes, à savoir si elles marchent ou pas. Il est aujourd'hui d'environ 85 %, ce qui est finalement ni bon ni mauvais, mais pas aussi catastrophique que ce que certaines fake news racontaient, comme quoi la plupart des bornes seraient en fait en panne. Enfin, nous allons bientôt proposer un nouvel indicateur prix, pour savoir combien cela me coûtera de recharger mon véhicule ».
Joël Balandraud, le maire d'Evron, en Mayenne, s'inquiète malgré tout du fait que certaines populations soient naturellement exclues : « Il faut bien réaliser que, chez moi, la première voiture est souvent achetée (d'occasion) 4 000 ou 5 000 euros. Avec l'installation des ZFE, si je suis un jeune étudiant mayennais qui doit régulièrement se rendre à Nantes, je ne pourrai plus y circuler, sauf à construire des parkings en périphérie par exemple. Donc, face à ce défi de transition énergétique, il va falloir se donner de la souplesse et du temps ».
Développer le marché des véhicules électriques d'occasion
De son côté, Diane Strauss, la directrice de l'ONG Transport & Environment en France, cite différents leviers sur lesquels se focaliser pour accélérer l'accessibilité aux voitures électriques : « Pour les plus modestes, le futur dispositif de leasing social en est un. Nourrir le marché de l'occasion avec des véhicules électriques issus de flottes professionnelles pourra en être un autre. Enfin, il faut produire des véhicules qui répondent aux besoins de ménages, concentrés sur les segments A et B (citadines), alors que les constructeurs se focalisent pour le moment sur le segment C (berlines compactes) sur lequel ils sont directement en compétition avec les Chinois ».
Sandrine Bouvier, directrice e-Mobility chez Stellantis, explique que la production de son groupe sera tout électrique bien avant 2035 et qu'il est important d'anticiper cette transition nécessaire : « Nous produisons déjà une douzaine de véhicules électriques en France. On est aussi en train de faire la transition de nos usines de moteurs thermiquesmoteurs thermiques vers l'électrification. C'est une véritable transition de fond qui est en cours ». Pour répondre aux besoins des automobilistes, une baisse des prix est aussi indispensable : « Il faut savoir par exemple que 40 % du prix d'un véhicule électrique neuf repose sur sa batterie. On travaille donc sur ça et on pense pouvoir baisser le prix des batteries de 40 % dès 2024. Pour la mobilité urbainemobilité urbaine et les déplacements en ZFE [zones à faibles émissionsémissions, ndlr], on a déjà l'AMI ou encore la Fiat 500 électrique qui sont très accessibles ».
Accompagner la transformation des filières périphériques
Les constructeurs ne sont pas les seuls concernés par cette transition, c'est aussi le cas de tous les autres métiers de l'automobile, comme l'explique Fabien Derville, président de Mobivia (groupe regroupant Norauto, Midas, etc.) : « L'inquiétude peut aussi être un formidable stimulant. Je me dis que, si tous les jours, on fait le métier le mieux possible pour répondre aux besoins des citoyens, alors nos enseignes continueront d'exister demain ».
Sur le front de l'emploi, Xavier Horent, délégué général de Mobilians (l'ex-Conseil national des professions de l'automobile) se veut pragmatique, « sinon, on ira dans le murmur du réel et ça sera violent. Les importations chinoises représentent aujourd'hui 20 % sur le segment du véhicule 100 % électrique, contre 1 % à l'époque du tout thermique. Il est aussi "urgentissime" que l'Europe soit clairvoyante sur le besoin et la source de production de son électricité. Il faut donc être clairvoyant et réaliste, tout en restant ambitieux pour que la France soit leader en termes de décarbonation de son économie ».
Il reste un peu plus de dix ans aux professionnels pour proposer une offre adaptée et accessible à tous, dans cette course vers la mobilité zéro carbonecarbone.