Souriez, vous êtes filmés. Si les caméras-piétons étaient jusqu’ici réservées aux policiers, leur port devrait bientôt être exploité par les agents de tous les transports publics de France. Mais comment ces images seront-elles utilisées ? Aurez-vous le droit de contester ? Même si ce dispositif est censé favoriser la transparence des actions des forces de l'ordre et renforcer la confiance du public, il pose des questions sur la protection de votre image. 


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    « Rien ne justifie la violence ! » Voici le message que la RATP a tenu à faire passer dans une grande campagne lancée en avril pour lutter contre les agressions envers ses agents. Insultes, menaces, crachats ou encore agressions physiquesphysiques : en 2023, le service de transports en commun francilien comptabilisait plus de 1 200 agressions sur ses machinistes, agents de station, agents de contrôle ainsi que sur le groupe de protection et de sécurité de ses réseaux. Mais les agents ne sont pas les seuls à être victimes d'incivilités. Chaque jour, la SNCF recense 16 agressions verbales ou physiques envers ses employés, ce qui représenterait 6 000 actes de violence enregistrés en 2023, qui auraient également donné lieu à plus de 430 arrêts de travail.

    Pas le temps de lire ? Découvrez cette actu au format audio dans notre podcast Vitamine Tech, animé par Adèle Ndjaki. © Futura

    Alors, pour prévenir toute incivilité, une mesure-phare a été retenue par les autorités : le port par les agents de caméras-piétons. Si les forces de l'ordre ont l'autorisation d'en porter depuis un décret du 23 décembre 2016, les agents de la SNCF et des services de transport de toute la France pourraient, dans quelques mois, avoir eux aussi la permission d'utiliser ce dispositif mobilemobile permettant de filmer lors des interventions. Ce projet commence à prendre forme après qu'une expérimentation a été menée dans toute la France, sur la base du volontariat, depuis 2020. En tout, 2 700 agents de la SNCF auraient été équipés de ces mini-caméras de vidéosurveillance.

    Des contrôleurs en faveur des caméras-piétons

    Plus que satisfaite, l'entreprise ferroviaire révèle les résultats de cette expérience via un sondage réalisé en interne : 96 % des agents volontaires, sur les quatre années d'expérimentation, se disent en faveur de la pérennisation du dispositif, tandis que 95 % expliquent que la mise en route de la caméra a « permis d'apaiser ou de contenir les situations conflictuelles ». Par ailleurs, 85 % des agents estiment que le dispositif « a permis d'éviter un outrage ou une agression ». Ces résultats positifs ont donc poussé la SNCF et la RATP à mandater l'Union des transports publics et ferroviaires, l'UTPF pour porter un projet de loi à l'Assemblée Nationale, afin d'étendre l'utilisation des caméras-piétons à l'ensemble des transports publics. Les nouvelles élections législatives ont ralenti le projet, mais l'UTPF ne compte pas s'arrêter là et une nouvelle proposition de loi pourrait être examinée dès janvier.

    En gare comme dans les trains, les agents pourraient bientôt être équipés de caméras-piétons. © SNCF
    En gare comme dans les trains, les agents pourraient bientôt être équipés de caméras-piétons. © SNCF

    Caméras-piétons : une règlementation stricte

    Les caméras-piétons pourraient à l'avenir prévenir certaines incivilités et donc protéger les agents travaillant sur les lignes de transport. Mais de l'autre côté, les usagers, eux, sont-ils protégés ? Leur image sera-t-elle exploitée sans leur autorisation ? Déjà, il y a des règles : par exemple, les agents ne peuvent pas filmer en continu, le dispositif ne peut être déclenché que lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident. Les images et les sons enregistrés sont conservés durant 6 mois et détruits après le délai écoulé, sauf dans le cas où ils seraient utilisés dans le cadre d'une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire. Et puis, personne ne devrait être pris par surprise, le port de la caméra devant être apparent, un signal visuel et sonore indiquant le moment où elle commence à enregistrer et chaque individu concerné devant être averti à l'oral, sauf circonstances particulières. Par contre, les agents doivent, certes, prévenir qu'ils filment mais ils n'ont techniquement pas besoin de votre autorisation pour le faire. Enfin, ces vidéos n'ont pas vocation à être rendues publiques.

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    Ces règles définies par la loi seraient, en réalité, des garanties pour les citoyens et les utilisateurs, car les vidéos constituent des preuves qui peuvent accompagner des dépôts de plainte. C'est ce que nous pouvons voir avec les États-Unis, dont les forces de l'ordre ont adopté un dispositif similaire il y a plus de dix ans. Et résultat : certaines études suggèrent que les caméras corporelles peuvent offrir des avantages, tandis que d'autres ne montrent aucun impact ou des effets négatifs possibles. Si en 2020, une étude réalisé par la police de Boston, au Massachussets, marquait une diminution significative dans le recours à la force par la police dès l'activation de ces petits appareils, une autre étude réalisée en 2017 par la police de Washington, DC, ne note aucun effet du dispositif en ce qui concerne le recours à la force par ses agents, ni pour le nombre de plaintes des citoyens. Alors en ce qui concerne la France, affaire à suivre...