Alors que le ministère de la Justice américain a porté plainte en août contre TikTok pour « violation généralisée des lois sur la protection de la vie privée des enfants », une nouvelle plainte accuse la plateforme chinoise d'être nocive pour les jeunes et de délibérément mettre en place des mécanismes pour qu'ils deviennent accros au réseau social. Addiction, mauvaise image de soi, problème de santé… TikTok fait-il exprès d'être nocif pour ses intérêts ?
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TikTokTikTok en 2024, c'est plus d'un milliard d'utilisateurs actifs mensuels dans le monde. Lancée en septembre 2016, la plateforme, créée par la firme chinoise ByteDance, est devenue l'une des applicationsapplications les plus populaires à travers le globe en quelques années. En 2023, elle est même l'application la plus téléchargée au monde, devant InstagramInstagram. Partage de vidéos de courte duréedurée, contenus divertissants, actualités ou promotion de produits et de marques, TikTok a réussi avec le temps à conquérir le cœur du jeune public. En effet, d'après les statistiques issues de Statistat, près de la moitié des utilisateurs de la plateforme auraient entre 10 et 29 ans.
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Mais le succès fulgurant de TikTok s'accompagne aussi d'un florilège de critiques et d'alertes. Considéré par divers psychologues spécialisés sur la question des troubles psychiques chez les jeunes comme étant une appli toxique et addictive pour les enfants et les adolescents, le réseau social chinois se targue depuis plusieurs mois de mettre en place des outils visant à limiter le temps passé sur le réseau par les jeunes. En 2023, la plateforme lance d'ailleurs une fonctionnalité qui impose une limite de temps d'écran d'une heure par jour aux mineurs. Ambitieux, alors qu'il semblerait qu'en moyenne, au niveau mondial, les enfants de 4 à 15 ans restent environ 75 minutes par jour à consommer cette appli star. Et attention, ce chiffre est encore plus élevé aux États-Unis avec 87 minutes par jour en moyenne !
Une plainte déposée contre TikTok
Si TikTok avait la volonté de montrer sa bonne foi pour réduire les effets néfastes d'une utilisation excessive de sa plateforme, eh bien, c'est raté ! Treize États américains, ainsi que le District de ColumbiaColumbia, ont déposé une plainte contre le réseau social, qu'ils accusent de créer délibérément une dépendance chez les jeunes. Selon des documents internes cités dans la plainte, TikTok serait au courant que sa plateforme entraîne des problèmes de sommeil et d'image de soi chez ses jeunes utilisateurs, sans que rien ne soit mis en place pour l'éviter.
À travers cette plainte, ces États dénoncent ainsi certaines caractéristiques de conception du réseau social, qui arriveraient à rendre addict la jeunesse, comme par exemple son algorithme hyperpersonnalisé. D'après eux, TikTok utiliserait les informations qu'elle recueille chez ses jeunes utilisateurs pour alimenter leurs algorithmes, ce qui lui permettrait non seulement d'adapter le contenu à leurs intérêts, mais aussi de stimuler leur engagement. Cependant, la plainte fait état de communications internes affirmant que l'utilisation compulsive était « endémiqueendémique » sur la plateforme et que les enfants regardent TikTok du fait que leur algorithme est « vraiment bon ».
Des mesures inefficaces
Les plaignants expliquent aussi que les différentes mesures prises par le géant chinois pour réduire le temps d'utilisation des mineurs seraient volontairement inefficaces, à l'instar de son système de vérification de l'âge, qui peut très facilement être contourné. Car les documents fournis à la justice démontreraient d'une part, que l'entreprise avait constaté que la fonction de limitation de temps ne réduisait que d'une minute et demie le temps moyen passé par les adolescents sur l'application et que, d'autre part, TikTok avait l'intention de se débarrasser de cette fonctionnalité, dans l'hypothèse où elle parviendrait à fait baisser de 10% sa fréquentation par les jeunes.
La plateforme, déjà accusée de manigancer pour rendre ses utilisateurs accros, est également critiquée car elle ne serait pas un endroit sûr pour les enfants et les adolescents. Déjà, parce que la modération y est jugée assez bancale. La plainte souligne que TikTok sait qu'il y a des taux de « fuites » importants de contenus qui enfreignent ses règles communautaires, des contenus qui ne sont pourtant pas supprimés ni modérés par le réseau social : les plaignants notent que les taux de « fuite » incluent environ 36 % de contenus qui normalisent la pédophilie et 50 % de contenus qui glorifient les agressions sexuelles sur mineurs, ce qui est en soi terrible, mais assez commun en réalité, puisque c'est un problème que d'autres médias sociaux comme Meta et SnapchatSnapchat connaissent également sur leurs plateformes. Dans le cas de l'application chinoise, toutefois, cette affaire risque de l'affaiblir davantage aux États-Unis, puisqu'elle risque déjà d’être interdite sur le sol américain en raison de dangers présumés pour la sécurité nationale.
Un culte de la beauté voué par TikTok
Les États à l'origine de cette plainte pointent aussi du doigt les impacts négatifs que les filtres faciaux de TikTok peuvent avoir sur les utilisateur·ice·s. Il est reproché au réseau social de « donner la priorité aux belles personnes » tout en sachant, en interne, que le contenu de la plateforme pourrait « perpétuer un standard de beauté étroit ». TikTok pourrait ainsi avoir un mauvais impact sur l'image corporelle de ses jeunes utilisateur·ice·s, à un âge où l'estime de soi n'est pas au plus haut. Alors est-ce le début de la fin pour TikTok aux États-Unis ? II est encore trop tôt pour le dire.
De l'autre côté, le porteporte-parole de TikTok, Alex Haurek, nie toutes les accusations. « Malheureusement, cette plainte sélectionne soigneusement des citations trompeuses et sort des documents obsolètes de leur contexte pour dénaturer notre engagement envers la sécurité de la communauté », affirme-t-il. Le mot d'ordre est donc de rester sur ses gardes. Plus que jamais il faut pouvoir être attentif à la façon dont les plus jeunes utilisent tous les réseaux sociauxréseaux sociaux.