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La Terre connaît plusieurs pénuries. L'une d'elles, celles des adresses IP, aurait été impossible à comprendre en 1980... © Nasa
Il y a actuellement plus de deux milliards d'internautes sur la planète mais les adresses IP (Internet Protocol), c'est-à-dire les numéros identifiant chaque accès, sont aujourd'hui 4,3 milliards. C'est le nombre de numéros différents qui ont déjà été accordés par l'IANA (Internet Assigned Numbers AuthorityInternet Assigned Numbers Authority), un organisme faisant partie de l'Icann (Internet Corporation for Names and Numbers), gestionnaire de l'Internet mondial. Elle ne les distribue pas au détail mais par blocs de 16.777.216 (soit 224 pour les amateurs d'arithmétique). Attribués aux grandes zones géographiques de la Toile mondiale, ces numéros sont ensuite répartis entre les fournisseurs d'accès à Internet (ou FAI). Il y a davantage d'adresses distribuées que d'internautes à cause des réseaux locaux, où les ordinateurs sont repérés par leurs propres numéros IP.
Comme le système de numérotation du téléphone ou des plaques d'immatriculation, celui d'Internet a une limite. Le protocole actuel, appelé IPv4 (version 4, donc), prévoit des adresses à quatre octetsoctets, soit quatre nombres de 0 à 255, soit 32 bits en tout. Le nombre de combinaisons est donc de 232, soit 4,3 milliards...
La saturation tant annoncée est bel et bien là. Une entreprise, Hurricane Electric (qui, justement, fournit les solutions pour passer d'IPv4 à IPv6IPv6 et pour qui cette saturation représente un juteux marché, comme on va le voir) réalise depuis quelque temps un décompte censément en temps réel des adresses IP libres. Un coup d'œilœil sur le compteur montre que l'on serait aujourd'hui sous les dix millions, ce qui ne représente que quelques mois voire quelques semaines, voire quelques jours disent certains. La fin du monde virtuel n'est pas pour 2012 mais pour 2011 !
L’IPocalypse n’est pas pour demain
Il est assez étonnant que l'on en soit arrivé à une telle extrémité car la nécessité d'aller au-delà de la numérotation d'IPv4 est un impératif identifié depuis les années 1990 et la solution a été trouvée à cette époque. Une nouvelle version du protocole IP, IPv6 (la v5 concernait un autre développement), définie comme la précédente par l'IETFIETF (Internet Engineering Task Force) a été mise au point.
La numérotation passe de 4 à 16 octets, soit à 2128, soit plus de 3 x 1038, donc des centaines de milliards de milliards de milliards de milliards. De quoi avoir de la marge et même connecter nos voituresvoitures, lave-vaisselle, appareils photo, machines à laver, téléviseurs, chaudières, téléphones, tablettes tactilestablettes tactiles, cadres photo connectés, etc. « J'imagine que si on trouvait une façon d'attacher une adresse IP à chaque atomeatome on pourrait commencer à avoir des problèmes » a plaisanté Rod Beckstrom, président de l'Icann, dans des propos rapportés par l'AFP.
Mais voilà : à part ce grand bol d'airair, IPv6 n'apporte pas grand-chose de mieux qu'IPv4 alors que le passage de l'un à l'autre exige de nombreuses modifications de matériels au sein du réseau mondial, des routeursrouteurs en particulier. L'investissement a été retardé, on peut le dire, jusqu'au dernier moment. En ces temps de peurs millénaristes et d'annonces de catastrophes économiques ou écologiques, il arrive même que cette échéance ne soit pas prise au sérieux.
Certains s'inquiètent vraiment. « Le grand réservoir qui distribue les adresses va être à sec dans les semaines qui viennent », expliquait la semaine dernière à l'AFP Lorenzo Colitti, ingénieur chez GoogleGoogle. La solution d'urgence est de partager des adresses IP entre plusieurs personnes. En France, on souhaite bon courage aux fins limiers de l'Hadopi... C'est pourtant ce qui va se passer. Dans la plupart des cas, une adresse IP étant accordée temporairement, le système peut fonctionner. Il n'y aura pas d'« IPocalypse », selon l'heureuse expression qui fait florès sur le Web.
En coulisses, on commence à s'activer. Un grand test est prévu le 8 juin 2011 : le World IPv6 Day. Il réunit des grands pourvoyeurs de trafic : Google, FacebookFacebook, Yahoo!, Akamai et Limelight Networks (Akamai gère un ensemble de serveursserveurs, où les pages Web sont dupliquées et les requêtesrequêtes détournées en fonction de l'état du trafic et Limelight Networks gère des réseaux de fibres optiquesfibres optiques à l'échelle mondiale). Pendant 24 heures, ces géants passeront en mode IPv6. Un vrai débarquement...