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Les Chinois, comme dans ce cybercafé, sont de plus en plus nombreux à apprécier Internet. © Triciawang / Flickr - Licence Creative Common (by-nc-sa 2.0)
Au cours d'une réunion sur l'Internet chinois, 2008 IP Address Resource Seminar, Li Kai, directeur du CNNIC (China Internet Network Information Center), a jeté un pavé dans la mare en expliquant que son pays risquait une pénurie d'adresses IP en 2010, « dans 830 jours ». La Chine, gros consommateur d'accès Internet, aurait déjà affecté 80% de son quota. Si rien n'est fait, les 20% d'adresses restantes risquent donc d'être utilisées rapidement pour être attribuées aux nouveaux internautes, une population à croissance rapide.
Le réseau chinois - comme dans le reste du monde, d'ailleurs - est en effet pour l'essentiel conforme à la norme IPv4, qui code les adresses sur 32 bits (soit quatre nombres de 0 à 255, que l'on présente en les séparant par des points). Au total, le nombre d'adresses différentes est de 232, soit 4.294.967.296, c'est-à-dire 4,29 milliards. Au tout début des années 1980, lorsqu'a été adopté ce protocole Internet (IP, Internet Protocol), Internet s'appelait encore Arpanet et un tel nombre semblait astronomique.
Chaque ordinateurordinateur relié à Internet doit disposer d'une telle adresse, qui peut être définitive (cas des serveursserveurs Web par exemple) ou provisoire et utilisée seulement pendant le temps de la connexion (cas des particuliers). Si on en restait à IPv4, lorsque 4.294.967.296 ordinateurs seraient connectés, le 4.294.967.297ème se verrait refuser l'accès et devrait attendre qu'une adresse provisoire se libère quelque part. Même s'il n'existe pas 4,29 milliards d'internautes, la saturation est effectivement proche car le nombre de matériels connectés est très élevé. Et l'on voudrait aussi relier au Web nos téléviseurs, nos voituresvoitures, nos appareils photo et pourquoi pas les réfrigérateurs ou les machines à laver.
« Pure spéculation »
La solution est connue depuis longtemps et simple comme bonjour, du moins dans son principe. Il suffit de coder les adresses avec davantage de chiffres. C'est ce qui a été fait pour le successeur de IPv4, baptisé IPv6IPv6 (le terme IPv5 était alors déjà utilisé pour un protocole expérimental). L'évolution n'est pas nouvelle puisque cet IPv6 a été officiellement adopté en 1995. Avec un codagecodage sur 128 bits, il permet donc 2128 adresses différentes, soit 3,4×1038, ou, si l'on préfère, dix millions de milliards de fois le nombre estimé d'étoilesétoiles dans l'universunivers visible (de l'ordre de 1022).
Mais ce protocole, qui ne modifie pas que le codage des adresses, impose des changements importants de matériels et de logicielslogiciels chez tous les acteurs d'Internet et fait craindre quelques incompatibilités. Les entreprises concernées (les fournisseurs d'accès, au premier chef) rechignent à se lancer les premières et on assiste à une sorte de course de lenteur. L'organisme dirigeant Internet, l'Icann, a adopté IPv6 en 2004 pour ses serveurs principaux (« racines »).
Chaque pays ayant reçu une certaine dotation en adresses de la part des instances dirigeantes d'Internet, le problème ne se pose pas de la même manière dans le monde. Il est particulièrement aigu en Chine où l'essor économique de ces dernières années conduit à multiplier les accès.
La question est donc réellement posée mais la réponse est connue. Il faut que les acteurs chinois d'Internet accélèrent le déploiement des réseaux IPv6. Un article de l'agence ChinaTechNews, qui reprend des propos tenus par un responsable d'un réseau de télévision (autant dire une voix officielle), affirme que l'affirmation d'une pénurie en 2010 est une « pure spéculation ». Les réseaux chinois seraient déjà largement équipés en matériels compatibles avec IPv6 et le nouveau protocole commencera sa carrière tranquillement, dès que les adresses IPv4 se feront rares. Que le reste du monde se rassure, donc.