Cela fait huit ans que les services de police utilisent discrètement et hors de tout cadre légal un logiciel de reconnaissance algorithmique pour la vidéosurveillance. Ce logiciel provenant d’une société israélienne serait déjà déployé sur une centaine de villes françaises.
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Ce scandale vient d'être dévoilé par le média Disclose. Depuis maintenant huit ans, les services de la police française utilisent un logiciel de reconnaissance pour la vidéosurveillance de façon totalement illégale. Baptisé Vidéo Synopsis, l'outil en question provient de la société israélienne Briefcam. L'IAIA qu'elle contient permet d'analyser les images des caméras et identifier les situations qui sortent de la normalité. Ce n'est pas tout, elle peut également suivre un véhicule en ayant relevé sa plaque d'immatriculation, ou bien une personne ciblée.
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Mieux encore, le logiciel dispose d'options encore plus intrusives, avec la reconnaissance des visages, l'évaluation de l'âge, du genre et de la taille de l'individu ciblé. S'il est également doté de capacité d'analyse en temps réel, ses algorithmes peuvent tout aussi bien traiter très rapidement des heures de vidéosurveillance à la recherche d'éléments précis. Si son utilisation se fait hors du cadre légal, l'autre souci, c'est que le déploiement de Vidéo Synopsis n'est pas anecdotique. Testé à la direction départementale de la sécurité publique de Seine-et-Marne dès 2015, l'outil a été déployé progressivement dans d'autres départements et plusieurs unités spécialisées de la police.
L’IA de l'outil appelé Vidéo Synopsis va identifier les personnes automatiquement et il est ensuite possible de les filtrer par critères, par exemple suivre une personne portant un pull bleu. © Briefcam
La police hors la loi
En tout, plus d'une centaine de communes en France disposent de ce logiciel selon la société israélienne. Le hic, c'est que cette utilisation de Vidéo Synopsis est largement en dehors des clous de la loi française et européenne. C'est ce qui explique que le ministère de l'Intérieur est toujours resté très discret sur l'exploitation de cet outil. S'il a été expérimenté durant deux ans au préalable, Disclose révèle, qu'il n'y a pas eu d'enquête sur son impact concernant la protection des données. De même, la Cnil semble n'avoir jamais été mise dans la boucle, ce qui est pourtant une obligation. Les forces de l'ordre sont donc totalement hors la loi lorsqu'elles exploitent ce logiciel.
En France, au niveau réglementaire, il faut savoir que très rares sont les cas où la reconnaissance faciale est autorisée. Et pourtant, l'État a cherché à ouvrir les vannes pour utiliser ces caméras dopées à l'IA, avec la loi dite JO 2024 qui a été votée, puis validée par le Conseil constitutionnel en mai dernier. Elle autorise jusqu'en 2025 l'expérimentation de la vidéosurveillance algorithmiquealgorithmique pour détecter les événements potentiellement à risques. Reste toujours à savoir de quels événements il peut s'agir. L'intention de cette loi était d'aller bien plus loin, avec le recours à la reconnaissance faciale en temps réel. Mais face aux levées de boucliers et parce que la loi venait contredire une disposition du 14 juin du Parlement européen sur l'interdiction de cette pratique, les élus ont finalement renoncé à cette idée. Mais, il y a la loi et la pratique, et cette affaire de logiciel israélien montre que, finalement, le mal est déjà fait. Disclose précise, en effet, que selon une source policière, l'outil serait utilisé « sans contrôle ni réquisition judiciaire ». Autrement dit, les services de police peuvent faire appel à ce logiciel pour n'importe quelle raison et sans aucune autorisation préalable. L'enquête du média commence à faire réagir les autorités et notamment la Cnil, qui vient justement d'annoncer qu'elle « initie une procédure de contrôle vis-à-vis du ministère de l'Intérieur » suite à cette révèlation.