Vladimir Poutine a dévoilé la nouvelle doctrine de l’emploi de l’arme nucléaire russe. En cas de frappe massive sur la Russie, celle-ci pourrait être employée en riposte contre l'Ukraine et les États qui soutiennent ce pays. Coup de bluff du Kremlin ou vraie menace ?


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    Tremblez peuples d'Occident ! Les missilesmissiles nucléaires russes sont pointés sur vous ! C'est en substance la déclaration que souhaitait faire passer à l'opinion occidentale Vladimir Poutine, ce mercredi en évoquant la nouvelle doctrine russe du recours à l'arme nucléaire. Le discours intervient alors que l'Ukraine demande à employer des armes occidentales à longue portée pour frapper des infrastructures militaires sur le territoire russe. En conséquence, le maître du Kremlin a expliqué que des frappes massives en Russie à partir de drones, de missiles de croisière et autres vecteurs aériens, engageraient éventuellement l'emploi de l'arme nucléaire en réponse. Pire encore, le pays se réserve le droit d'envisager une frappe sur un État doté de l'arme nucléaire qui soutiendrait l'agresseur.

    Cette mise à jour de la doctrine russe s'adresse donc avant tout aux quelques pays membres de l'Otan qui en disposent et notamment la France. Ils pourraient donc être éventuellement ciblés même s'ils n'ont pas menacé la Russie militairement.

    Comme à son habitude, le Président russe joue sur la peur. Une façon d'inciter les populations à faire pressionpression sur leurs gouvernements afin qu'ils lâchent l'aide à l'Ukraine contre son envahisseur.

    Mais ce discours viril autour de la nouvelle doctrine nucléaire russe « reste à nuancer », selon Héloïse Fayet, chercheuse à l'Institut français des relations internationales (Ifri), experte en matièrematière d'armement nucléaire. Selon elle, une attaque nucléaire sur l'Occident a vraiment peu de chances d'arriver. D'abord, cette révision doctrinaire était connue et a été décidée il y a plusieurs mois. Et celle-ci apparaît comme une réaction défensive de la part du Kremlin. Autrement dit, Moscou est plutôt inquiet de la situation. Sa méthode qui consistait à brandir à répétition des menaces de l'usage de l'arme nucléaire, qu'elle soit tactique ou non pour faire peur, n'a pas fonctionné. Et pour cause ! L'affaiblissement escompté du soutien à l'Ukraine par les pays occidentaux n'a pas eu lieu.

    En cas de bombardement massif avec des armes conventionnelles en Russie, frapper un pays de l’Otan soutenant l’Ukraine et disposant de l’arme nucléaire serait envisageable selon la nouvelle doctrine russe. © TASS
    En cas de bombardement massif avec des armes conventionnelles en Russie, frapper un pays de l’Otan soutenant l’Ukraine et disposant de l’arme nucléaire serait envisageable selon la nouvelle doctrine russe. © TASS

    Faire peur aux populations

    Alors Vladimir Poutine montre les muscles et ajoute ce critère de frappe nucléaire d'un pays allié à l'Ukraine. Un message qui pourrait toutefois conduire l'Otan à revoir sa décision de ne pas riposter de façon non-nucléaire en cas d'usage de cette arme par la Russie. Mais en réalité, un vrai conflit nucléaire n'est pas un scénario envisagé par le Kremlin et les alliés le savent étant donné sa puissance destructrice de parts et autres.

    Encore une fois, cette menace par voie de presse s'adresse essentiellement aux populations occidentales pour engendrer de la peur. Une stratégie qui pourrait fonctionner, même si l'on ne sait pas ce que Vladimir Poutine veut signifier par frappe massive. D'ailleurs, cette mention d'attaque massive était déjà présente dans la doctrine datant de 2020, soit deux ans avant l'invasion de l'Ukraine. Et puis, frapper « nucléairement » l'Ukraine serait contreproductif si l'on prend en compte les prétentions initiales qu'avait énoncées Moscou pour « libérer » le pays du soi-disant joug de l'Occident.

    Il faut également rappeler que la crédibilité de la dissuasion russe est entachée par une série d'échecs lors d'essais avec son arme nucléaire « ultime », le fameux missile Satan 2. Un missile mis en avant dès 2022, mais dont l'excès de communication se retourne finalement contre lui en raison de l'échec des dits tests. Ceci dit, mis à part cette communication ratée, la Russie dispose d'un énorme arsenal nucléaire qui doit être pris très au sérieux. Il faut également se souvenir que dans toute cette histoire, le pays qui a agressé l'Ukraine est la Russie et non l'inverse, d'où le fait qu'il faut considérer que la réaction du Kremlin est la preuve d'une certaine inquiétude.