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« Ce message s'autodétruira dans cinq secondes ». Les fans de la série « Mission Impossible » connaissent par cœur cette phrase qui ponctue l'introduction de chaque nouvel épisode. Et l'on ne peut s'empêcher d'y songer en découvrant ce concept de circuit électronique capable de s'autodétruire sur commande. Il est le fruit de travaux menés au Palo Alto Research Center (Parc)), le fameux centre de recherche et développement appartenant à Xerox basé en Californie (États-Unis) où ont été conçues une bonne partie des innovations qui ont donné naissance à l'informatique grand public : l'interface graphique avec les icônes ou encore le Wysiwyg (what you see is what you getwhat you see is what you get, « ce que vous voyez est ce que vous obtenez »).
Le projet, piloté par Gregory Whiting, a été conduit dans le cadre d'un programme initié par la Darpa, l'agence de recherche et développement de l'armée américaine. Baptisé VAPR (Vanishing Programmable Resources), il consiste à mettre au point des systèmes électroniques susceptibles de « disparaître d'une manière contrôlée ». En l'occurrence, l'idée est de faire en sorte qu'un système d'armement ou un équipement électronique militaire sensible tombé entre de mauvaises mains puisse être détruit à distance de façon à le rendre inutilisable ou empêcher la récupération de ses données.
L'équipe du Parc a récemment présenté son procédé d'autodestruction que l'on peut voir filmé au ralenti dans deux vidéos tournées par IDG News et LiveScience. Les circuits électroniques en siliciumsilicium sont incorporés dans un verre trempéverre trempé qui, s'il est chauffé sur un point précis, explose en milliers de morceaux. Dans la démonstration, l'explosion est déclenchée via une photodiode stimulée par un laserlaser. Selon Gregory Withing, la commande pourrait être émise à distance via une connexion sans fil Wi-Fi ou un autre système de communication radio. Dans un reportage réalisé par le blogueur Robert Scoble, le chercheur explique que le procédé fonctionne avec toute sorte de circuits électroniques du commerce à base de silicium.
Lorsqu’il explose, le verre trempé renfermant le circuit électronique se fragmente en milliers de morceaux infimes, ce qui rend impossible toute reconstitution en vue de récupérer les données. © Parc, a Xerox company
Commander l'autodestruction à distance
L'équipe du Parc a eu l'idée de recourir au verre trempé, aussi appelé verre de sécurité en raison de sa propension à se fragmenter en tous petits morceaux en cas d'explosion. Les chercheurs ont modifié la méthode de traitement de ce type de verre afin de pouvoir obtenir une épaisseur inférieure au millimètre. Le procédé dit « d'échange d'ionsions » consiste à plonger un verre dont la composition est riche en ions sodiumsodium dans un bain chaud de nitrate de potassiumpotassium. Les ions potassium, qui sont plus volumineux, cherchent alors à prendre la place des ions sodium, ce qui a pour résultat de créer une forte tension dans le verre. Un choc thermique suffit alors à faire exploser celui-ci.
Selon Gregory Whiting, le procédé permet d'intégrer des circuits silicium sur le verre trempé ou de le fondre directement dans la massemasse. Les essais filmés ont été réalisés avec des verresverres de 250 micromètresmicromètres d'épaisseur, mais les chercheurs indiquent que toutes les tailles seraient envisageables. Selon eux, le principal avantage de leur invention est qu'elle rend impossible toute récupération de données car les débris de verre sont si petits qu'ils fractionnent les bits eux-mêmes.
Le fait de pouvoir commander l'autodestruction à distance est un avantage évident, mais cela crée aussi un risque énorme en cas de piratage. Il faudrait en effet garantir l'invulnérabilité des équipements dotés de circuits et puces électroniques autodestructibles ainsi que celle des systèmes de contrôle qui déclenchent la destruction à distance. La Darpa n'a pour le moment pas indiqué de quelle manière elle comptait exploiter cette innovation.