À bord du Sea Cheeta, le pilote sera un capitaine de navire. Cet avion à effet de sol promet des déplacements sur de longues distances sans la moindre émission de carbone. Vœu pieux ou vraie bonne idée ?


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    C'est à la fois un avion et un navire. Une sorte de bateau-volant qui glisse sans foil au-dessus de la surface de l'eau grâce à l'effet de sol. C'est ce type d'engin que souhaite construire la startup Sea Cheeta basée à Miami, aux États-Unis. Le Sea Cheeta est conçu pour transporter des passagers ou bien du fret en empruntant les voies maritimes côtières et ce... sans la moindre émissionémission de carbonecarbone. La société mise sur une motorisation électrique à hydrogènehydrogène pour y parvenir. Mais ce n'est pas la seule ambition de Sea Cheeta. Pour ravitailler les appareils en hydrogène, elle compte également développer des îlots de production, de stockage et de recharge baptisés « H2Hub ». L'hydrogène produit sur ces îlots serait « vert » c'est-à-dire généré sans utiliser d'énergie fossileénergie fossile. Le projet est ambitieux et séduisant à condition qu'il y ait de vastes étendues d'eau.

    S'ils sont rarissimes, les avions à effet de sol sont loin d'être une nouveauté. En 1947, le milliardaire Howard Hugues avait réalisé un saut de puce avec son gigantesque Spruce Goose. Il n'avait fait qu'un seul vol. Les Soviétiques ont, quant à eux, mis au point des ekranoplans reprenant ce principe de l'effet de sol. Dans tous les cas, ces aéronefsaéronefs utilisent leur aile pour générer, à très basse altitude sur la surface de l'eau, une énorme pressionpression. Cela augmente considérablement la portanceportance et permet de voler plus du double de la distance avec la même quantité d'énergie qu'un avion traditionnel.

    La firme compte produire et stocker de l’hydrogène vert sur des hubs qui serviront de plateformes pour ravitailler les appareils de la flotte. Ces stations seraient développées en partenariat avec la firme H3 Dynamics qui est spécialisée dans la production du carburant. © Sea Cheetah
    La firme compte produire et stocker de l’hydrogène vert sur des hubs qui serviront de plateformes pour ravitailler les appareils de la flotte. Ces stations seraient développées en partenariat avec la firme H3 Dynamics qui est spécialisée dans la production du carburant. © Sea Cheetah

    Pour parvenir à ce résultat, la hauteur au-dessus de l'eau doit correspondre à 5 % de l'envergure de l'appareil. Autrement dit, il s'agit bien d'un vol en « rase-mottes ». Avec de l’hydrogène vert, ce moyen de transport aurait en plus l'avantage de ne générer aucune émission de carbone. L'autre atout de ce type d'engin, c'est qu'il ne s'agit pas vraiment d'un avion. De fait, du moins aux États-Unis, il n'a pas besoin de passer les étapes complexes et longues de certification par les autorités aériennes.

    Gros atouts, carences importantes

    L'appareil imaginé par Sea Cheeta est doté d'une large et épaisse aile avec aux extrémités d'étranges wingletswinglets (ailettes). Deux imposants moteurs électriques carénés sont placés au niveau de l'extrados de l'aile. À l'arrière, il s'agit d'un empennageempennage à double dérive. Sous l’appareil, des deux côtés, on trouve deux gros modules qui serviront sans doute de flotteurs et également à stocker l’hydrogène. Pour le moment, la firme ne précise pas s'il s'agit d'hydrogène gazeux ou liquideliquide. Dans ce dernier cas, l'autonomie pourrait être doublée. À ce jour, la société n'indique aucune date clé dans le développement de ses appareils et des hubs associés.

    Concept du Sea Cheetah. © Sea Cheetah, tous droits réservés
    Concept du Sea Cheetah. © Sea Cheetah, tous droits réservés

    Ce programme semblerait idéal s'il n'y avait pas quelques inconvénients de taille. Le principal repose sur les effets indésirables de la houlehoule et des vaguesvagues qu'il faut pouvoir contrer et anticiper en temps réel. Un autre souci est celui de l'insertion de ce type d'engin dans le trafic maritime. Il peut évoluer très vite et aura des difficultés à s'arrêter face à un navire ou lui céder le passage. Par ailleurs, ce type d'aéronef n'est valable que pour transporter du fret ou des passagers seulement sur des distances relativement courtes et uniquement via des voies maritimes. Pour des longues distances, même s'il est bien plus rapide qu'un navire, la vitessevitesse de croisière reste néanmoins largement inférieure à celle d'un avion de ligne.

    Malgré ces contraintes et des incertitudes sur la viabilité économique de ce mode de transport, il y a déjà de la concurrence sur ce secteur. Ainsi le Viceroy Seaglider de Regent promet de transporter 12 passagers sur des distances allant jusqu'à 300 kilomètres à une vitesse de croisière de 300 km/h. Il est doté de moteurs électriques et la firme a déjà fait voler plusieurs prototypes, alors que Sea Cheeat n'en est encore qu'au stade de la planche à dessins. En définitive, y a-t-il vraiment la place pour plusieurs acteurs ?