En avril 1652, le navigateur hollandais Jan van Riebeeck fonde le premier établissement européen de la pointe sud du continent africain, au pied de la "Montagne de la Table" : c’est la naissance de la ville du Cap. Le cap de Bonne Espérance a été contourné pour la première fois en 1488 par le Portugais Bartolomeu Dias, qui ouvre la route maritime de l’océan Indien. En 1497, Vasco de Gama passe le cap de Bonne Espérance, aborde les côtes du Natal puis fait route jusqu’à Goa, sur la côte ouest de l’Inde. Les Portugais ne s’installent pas au Cap car ils privilégient les escales au Mozambique.


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    En 1616, la Compagnie hollandaise des Indes Orientales (la VOC) impose à sa flotte de se ravitailler dans la baie de la Table, sur la route maritime entre la Hollande et l'Indonésie, et de faire relâche à l'île Sainte-Hélène au retour. L'établissement officiellement fondé en 1652 par le commandant Jan van Riebeeck, est une base de ravitaillement fortifiée : un fort en pierres est édifié en 1666, un jardin de la Compagnie est même aménagé. Des esclaves africains sont importés, une communauté d'agriculteurs et de fermiers (les Boers) se constitue, occupant les meilleures terres des populations locales, les Khoïsans.

    Arrivée de Jan Van Riebeeck au Cap, en 1652 ; par Charles Davidson Bell, XIXe siècle. © Wikimedia Commons, domaine public.
    Arrivée de Jan Van Riebeeck au Cap, en 1652 ; par Charles Davidson Bell, XIXe siècle. © Wikimedia Commons, domaine public.

    L’arrivée des protestants français

    A la révocationrévocation de l’édit de Nantes en 1685, environ deux cents familles françaises de religion protestante, s'installent dans la colonie du Cap à côté des Boers. La majorité de ces protestants francophones sont originaires de régions s'étendant de la Flandre jusqu'à Paris et du Dauphiné au Languedoc en passant par la Provence. Ils reçoivent entre 15 à 30 hectares de terres cultivables et s'installent au nord-est du Cap, dans le « Franschhoek » (le coin des Français). L'occupation des terres par les Européens provoque de violents affrontements avec les Khoïsans qui sont réduits en esclavage. A la fin du XVIIe siècle, la colonie hollandaise du Cap fait appel à des esclaves venus du golfe de Guinée, d'Angola et de Madagascar ; le métissage devient une pratique courante entre Européens et Africains. Les autorités hollandaises espèrent voir les Français s'assimiler à la population des Boers mais ils souhaitent conserver leur langue et leur culture. La Compagnie hollandaise des Indes décide alors d'interdire l'arrivée de pasteurs et d'instituteurs français ; vers 1730, en moins de deux générations, la langue française a disparu.

    Vue de la baie du Cap : bateaux de la Compagnie hollandaise des Indes Orientales (VOC), par Aernout Smit en 1679. Chavonnes Battery Museum, Le Cap (Cape Town). © Chavonnes Battery Museum.
    Vue de la baie du Cap : bateaux de la Compagnie hollandaise des Indes Orientales (VOC), par Aernout Smit en 1679. Chavonnes Battery Museum, Le Cap (Cape Town). © Chavonnes Battery Museum.

    La naissance de la société boer « afrikaner »

    La colonie accentue son développement au XVIIIe siècle : l'urbanisation s'étend autour du Cap et l'importation d'esclaves se poursuit ; vers 1770, la colonie du Cap compte un peu plus de 8000 colons pour 9000 esclaves. Les colons agriculteurs qui ont toujours besoin de nouvelles terres, se heurtent aux Bantous : en 1779 et 1780, se produit la première guerre avec les « Trekboers », paysans hollandais qui ont décidé de migrer vers l'intérieur du pays.

    Un particularisme « afrikaner » s'élabore progressivement, avec une langue spécifique, l'afrikaans, et la constitution d'un système de valeurs propres aux colonisateurs, de religion calviniste, confrontés à un environnement rigoureux, à des populations autochtones hostiles et à des conflits avec les Britanniques. L'afrikaans s'est formé à partir d'une variété dialectale du néerlandais parlé dans le sud de la Hollande ; il se distingue du néerlandais par un système phonologique particulier, résultant de son implantation géographique, par ses emprunts à l'anglais, au français, à l'allemand et aux langues africaines.

    Dans les années 1790, la Société Missionnaire de Londres s'installe au Cap et travaille à l'évangélisation des peuples khoïsans et bantous. D'autre part, la colonie s'émancipe complètement de la tutelle de la VOC : la régression du commerce asiatique, la dette écrasante engendrée par la défense de ses possessions en Asie et au Cap, sonne le glas de la Compagnie hollandaise des Indes Orientales en 1795.

    Baie du Cap vers 1780. © Iziko Museums of South Africa.
    Baie du Cap vers 1780. © Iziko Museums of South Africa.

    La colonisation anglaise

    En 1806, les Boers cèdent définitivement la place à la Grande Bretagne, nouvelle puissance coloniale ; au traité de Paris de 1814, les Britanniques acquièrent officiellement la colonie du Cap. Le premier gouverneur anglais s'installe dans l'ancienne résidence des gouverneurs hollandais, rebaptisé Government House ; elle sert actuellement de résidence au président de l'Afrique du Sud. La ville appelée Kaapstad du temps des Hollandais, devient Capetown. Dans les années 1820, des milliers de colons anglais débarquent au Cap ; en 1822, l'anglais devint la langue officielle de la colonie, ce qui suscite la colère des Boers qui se réfugient dans leur particularisme linguistique (l'afrikaans), leur culture et leur religion calviniste. La Grande-Bretagne abolit l’esclavage en 1834 ; les Boers qui exploitent justement leurs terres grâce aux esclaves, se sentent menacés dans leur identité  et décident de se déplacer vers le nord, au-delà du fleuve Orange. Cette migration appelée le « Grand Trek », se déroule entre 1835 à 1837 et va forger l'identité des Boers. Ils se heurtent aux Zoulous jusqu'en décembre 1838 puis fondent la république du Natal en 1840.

    Illustration du Grand Trek qui débute en 1835 : tableau "The Voortrekkers" par J.R. Skelton vers 1909. © Wikimedia Commons, domaine public.
    Illustration du Grand Trek qui débute en 1835 : tableau "The Voortrekkers" par J.R. Skelton vers 1909. © Wikimedia Commons, domaine public.

    Toutefois, les Britanniques refusent que les Boers aient un accès à la mer et leur enlèvent cette possession maritime stratégique, en annexant le Natal en 1843. Les Boers retournent vers l'intérieur des terres et fondent deux nouvelles républiques : la république du Transvaal en 1852 et l'Etat libre d'Orange en 1854. Avec la création des républiques boers, l'afrikaans devient la langue officielle orale et écrite. La découverte de gisementsgisements de diamants dans le Transvaal en 1867, relance l'expansionnisme anglais : en 1877, les Anglais annexent la république du Transvaal et détruisent définitivement l'empire zoulou en 1879. Les Boers décident d'une guerre de reconquête en 1880 : le premier conflit anglo-boer s'achève par la défaite des Britanniques en 1881 ; deux ans plus tard, Paul Kruger est élu président de la république indépendante du Transvaal.

    Bataille de Majuba, première guerre des Boers, en 1881 ; soldats britanniques défendant Majuba Hill. © Wikimedia Commons, domaine public.
    Bataille de Majuba, première guerre des Boers, en 1881 ; soldats britanniques défendant Majuba Hill. © Wikimedia Commons, domaine public.

    La guerre des Boers

    Comme l'exploitation des mines (diamants et or) est financée par les Britanniques, des milliers de mineurs anglais viennent s'installer au Transvaal. En 1890, le Royaume-Uni fait échouer le projet de Paul Kruger de prendre le contrôle du Bechuanaland (Botswana actuel). En contrepartie, Kruger refuse l'égalité des droits aux mineurs anglais et impose de lourdes taxes aux sociétés étrangères, britanniques et allemandes.

    Mine d'or à ciel ouvert à Johannesburg en 1893, compagnie minière Stanhope Gold Mining and Co. ; photo J. Davis. © Wikimedia Commons, domaine public.
    Mine d'or à ciel ouvert à Johannesburg en 1893, compagnie minière Stanhope Gold Mining and Co. ; photo J. Davis. © Wikimedia Commons, domaine public.

    En 1895, les Britanniques tentent sans succès une nouvelle expédition militaire contre la république du Transvaal ; les relations entre la colonie britannique du Cap et les républiques boers (Transvaal et Orange) se dégradent considérablement. En octobre 1899, Paul Kruger déclare la guerre aux Britanniques qui ouvrent des « camps de concentration » (terme employé pour la première fois) où sont enfermés des femmes et des enfants boers. La guerre se prolonge jusqu'en mai 1902 : le Transvaal et l'Etat libre d'Orange deviennent des colonies britanniques ; en compensation, les Boers disposent d'un gouvernement autonome, l'usage de l'afrikaans est autorisé dans les écoles et les cours de justice, et une subvention est versée pour la reconstruction du pays.

    Carte de l'Afrique du Sud durant la guerre des Boers (1899-1902), par Fabrice Le Goff cartographe géographe. © Fabrice Le Goff.
    Carte de l'Afrique du Sud durant la guerre des Boers (1899-1902), par Fabrice Le Goff cartographe géographe. © Fabrice Le Goff.

    En 1910, la Grande-Bretagne crée l'Union sud-africaine ; les Boers sont désormais appelés « Afrikaners » et constituent un groupe majoritaire parmi les blancs d'Afrique du Sud. Les noirs et les métis qui représentent les deux tiers de la population, sont systématiquement écartés de la vie politique. L'ancien commandant de l'armée boer, Louis Botha, devient premier ministre de l'Union sud-africaine.