Qui sont les Acadiens ? Découvrez l'histoire des habitants de l'ancienne Acadie et de leurs décennies d'errance entre Amérique et Europe, victimes des conflits entre la France et l'Angleterre.

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    L'ancienne Acadie, colonie de la Nouvelle-France, est fondée en 1605 par Pierre Dugua de Mons sur des territoires amérindiens et peuplée par des émigrés venus de l'ouest de la France. Les communautés indiennes et françaises se sont mêlées par le biais des mariages : une part de la population acadienne est de ce fait métissée. Depuis 1613, les Acadiens se situent sur la ligne de front de chaque conflit entre Grande-Bretagne et France. Ils réussissent à survivre en adoptant une attitude de neutralité réfléchie, refusant de prendre les armes pour l'un ou l'autre camp.

    En 1713, la France cède définitivement l'Acadie (devenue Nouvelle-Écosse) à l'Angleterre par le Traité d'Utrecht ; Écossais, Irlandais et Anglais viennent s'installer sur la côte est de la péninsulepéninsule acadienne. Entre 1745 et 1755, un mouvement d'exode de familles acadiennes se produit vers l'île Saint-Jean (île du Prince-Édouard), territoire encore sous le contrôle de la France.

    Vue du port et ville de Louisbourg, Acadie, en 1731. © Wikimedia Commons

    Vue du port et ville de Louisbourg, Acadie, en 1731. © Wikimedia Commons

    La diaspora acadienne

    En juillet 1755, le gouverneur anglais Lawrence oblige tous les Acadiens à prêter serment d'allégeance à la couronne britannique : la population d'origine française refuse et subit alors le « Grand dérangement ». Lawrence prévoit de déporter systématiquement 7.000 Acadiens français et catholiques dans neuf des treize colonies anglaises, du Massachusetts à la Géorgie. La Virginie (qui compte de nombreux émigrés protestants français) refuse d'accueillir les navires qui amènent 1.100 réfugiés catholiques. Ceux-ci sont envoyés en Angleterre et traités comme des prisonniers jusqu'à la fin du conflit franco-britannique, en 1763. En 1758, les Anglais investissent l'île royale (île du Cap-Breton) et l'île Saint-Jean, contraignant 3.500 Acadiens à la déportation vers la France. Une partie parvient à se réfugier à Québec et se fondra dans la population qui vit le long du Saint-Laurent. C'est en Nouvelle-France qu'il y a le plus fort contingent d'Acadiens à la fin du XVIIIe siècle.

    Une fois la paix signée en 1763, Louis XV doit faire face au double problème des réfugiés acadiens en France et de ceux qui se trouvent dans les colonies britanniques d'Amérique. Les Anglais poursuivent la colonisation de l'Acadie avec des colons de Nouvelle-Angleterre ; certains déportés retournent en Acadie britannique et parviennent à faire souche dans le Nouveau-Brunswick. D'autres déportés dans les colonies américaines rejoignent la Louisiane : ils s'installent dans les « bayous » du golfe du Mexique et donnent naissance à la communauté des Cajuns (déformation de « Cadiens »).

    L'Acadie en 1754. © Wikimedia Commons, domaine public.

    L'Acadie en 1754. © Wikimedia Commons, domaine public.

    Que deviennent les déportés Acadiens ?

    En France, une première solution consiste à peupler les colonies que le roi a conservées à la signature du traité de paix franco-anglais de 1763 : des familles acadiennes sont envoyées vers Saint-Pierre-et-Miquelon, les Malouines, la Guyane et Saint-Domingue (actuelle Haïti). Le roi promet aux réfugiés qui arrivent en métropole de leur fournir des moyens de subsistance, en attendant de leur trouver des terres à cultiver disponibles. Cette aide royale est une pension individuelle que chaque membre d'une famille (enfants compris) reçoit pour la nourriture et le logement. Ce sont environ 4.000 Acadiens réfugiés dans le royaume qui perçoivent cette aide et elle sera maintenue jusqu'à la Révolution. Les projets d'installation (dans le Poitou, en Corrèze, en Normandie, en Corse...) sur des terres de qualité médiocre visent à exploiter les Acadiens et sont voués à l'échec. À partir de 1765, quelques familles réussissent à se fixer définitivement sur Belle-Île-en-Mer. Une autre expérience d'implantation mal préparée a lieu près de Châtellerault en 1773 : plus de 1.450 réfugiés acadiens (362 familles) sont déplacés en Poitou pour devenir agriculteurs ; seule une vingtaine de familles feront souche.

    Acadie, site de Miramichi (golfe du Saint-Laurent), établissement français détruit par les Anglais en 1760. © Encyclopédie canadienne, Historica Canada

    Acadie, site de Miramichi (golfe du Saint-Laurent), établissement français détruit par les Anglais en 1760. © Encyclopédie canadienne, Historica Canada

    Les Acadiens de France vont patienter jusqu'à la fin de la guerre d'Indépendance américaine pour être autorisés par Louis XVI à émigrer vers la Louisiane : 367 familles débarquent à la Nouvelle-Orléans au cours de l'année 1785 et viennent retrouver le groupe des Cajuns.

    Après trente années d'errance entre Amérique et Europe, de 1755 à 1785, il subsiste encore un millier d'Acadiens dans le royaume de France qui vont progressivement se fondre dans la population des régions d'où leurs ancêtres étaient partis au début du XVIIe siècle.