Vers le milieu du XVIe siècle, le royaume de France est un ensemble géographique immense d’environ 450.000 km2, dont l’hétérogénéité traduit le long processus de rattachement des grands fiefs au domaine royal, entre Louis XI et François Ier. Le roi conforte sa souveraineté sur le royaume en intégrant progressivement des ensembles territoriaux qui appartiennent à des familles apparentées à la Couronne de France, par transmission du patrimoine lors d’un héritage, d’un mariage ou par décision politique. Au fil du XVIe siècle, le domaine du roi se confond de plus en plus avec le territoire du royaume.
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François Ier va contribuer à l'extension déterminante du territoire de son royaume, en intégrant deux grands ensembles féodaux :
- les importantes possessions de la maison ducale de Bourbon sont incorporées au domaine royal en 1531. François Ier cherche à récupérer ce duché car il représente selon lui, une puissance territoriale et politique inquiétante. Par le biais d'un procès intenté au connétable Charles de Bourbon devant le Parlement de Paris en 1523, une partie du Bourbonnais est mis sous séquestre puis attribué à Louise de Savoie, mère de François Ier, qui revendique ce territoire en tant que petite-fille de Bourbon. Charles de Bourbon demande l'appui de Charles Quint : le duc est considéré comme traître par le roi, ses biens sont définitivement confisqués et rattachés à la Couronne à la mort de Louise de Savoie en 1531 ;
- le duché de Bretagne est lié à la France depuis le mariage de la duchesse Anne avec le roi Charles VIII en 1491, puis avec Louis XII en 1499. La Bretagne est définitivement intégrée au domaine royal par l'édit d'Union de 1532 et devient « pays d’états » (états provinciaux ou assemblée provinciale des trois ordres : clergé, noblesse et tiers-état). Elle est dotée d'un parlement (de justice) siégeant alternativement à RennesRennes ou à Nantes.
La notion de domaine royal
Le domaine royal désigne l'ensemble des terres sur lesquelles s'exerce directement l'autorité du roi ; les juristes royaux distinguent le domaine corporel (terres, forêts, châteaux, biens immobiliers) et le domaine incorporel (droits féodaux, droits régaliens...). Le roi doit vivre des ressources de son domaine : les droits productifs de revenus contribuent à l'entretien du monarque. Cette notion très médiévale s'avère de moins en moins réalisable au XVIe siècle. L'impôt reste en principe une ressource extraordinaire servant essentiellement à financer les guerres mais la taille devenue permanente depuis 1439, est désormais considérée comme un revenu ordinaire qui s'enracine dans la coutume du royaume.
Le domaine royal est inaliénable : le monarque français n'en dispose pas comme bon lui semble car ce n'est pas un patrimoine personnel. En février 1566, l'édit de Moulins réglemente définitivement les aliénations au domaine royal (transmission de la propriété d'un bien ou d'un droit). Les juristes distinguent le domaine fixe qui est l'ensemble des biens et droits acquis par la Couronne à l'avènement du roi et le domaine casuel qui concerne tout bien acquis par le roi depuis son avènement. Un bien acquis durant le règne entre dans le domaine fixe après dix ans d'administration royale.
L'édit de Moulins est considéré comme une source directe du droit français actuel : en effet, si l'on veut revendiquer aujourd'hui un droit de propriété sur un domaine public (mer, rivière, sous-sol...), il faut pouvoir justifier d'un acte de propriété antérieur à cet édit de 1566 !
Le souverain peut toutefois constituer des apanages, c'est-à-dire concéder une terre prélevée sur le domaine royal pour doter ses fils, petits-fils ou frères, à condition qu'elle retourne à la Couronne en l'absence d'héritier mâle en ligne directe. Exemple : en juin 1540, François Ier donne le duché d'Orléans à son fils Charles. L'habitude sera prise de donner le duché d'Orléans au fils cadet du roi (Gaston d'Orléans frère de Louis XIII, Philippe d'Orléans frère de Louis XIV). Les bénéficiaires d'apanages ne peuvent pas les aliéner : ils ne sont pas propriétaires des terres apanagées mais seulement usufruitiers.
Géographie du royaume au XVIe siècle
Existe-t-il déjà des représentations géographiques du royaume de France ? La géographie est née avec le XVIe siècle et la nécessité de représenter les limites du monde connu. La première carte rudimentaire de l'ensemble du royaume date de 1525 : elle est l'œuvre du mathématicienmathématicien cosmographe Oronce Fine qui devient géographe du roi François Ier en 1531. Fine est également le premier à avoir représenté les nouveaux continents sur des mappemondes, en coordonnant les renseignements fournis par les navigateursnavigateurs. En 1544, le géographe allemand Sebastian Münster consacre un chapitre et une carte à la France, dans son ouvrage Cosmographia Universalis.
Des cartes établies par les géographes de François Ier, Henri II et Charles IX paraissent entre 1540 et 1570. En 1595, l'Atlas de Mercator consacre un fascicule complet à la France (les Galliae tabulae geographicae). Dès la deuxième moitié du siècle, les monarques français disposent donc d'outils qui leur permettent d'appréhender l'espace géographique du royaume et l'espace européen.
Pour que les contemporains sachant lire, puissent connaître l'espace géographique français du XVIe siècle, il existe dès 1552 un ouvrage intitulé La guide des chemins de France conçu par le médecin Charles Estienne, qui répertorie les principaux itinéraires et étapes de voyages, d'après les témoignages de marchands et de pèlerins ayant sillonné le royaume. L'auteur estime qu'il faut trois semaines pour traverser la France du nord au sud, à cheval !