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Certaines suspensions d'argileargile ou de silicesilice forment le type de structure décrite à la page consacrée aux colloïdes et se comportent comme des fluides à seuil, mais elles donnent l'impression de se liquéfier au-delà du seuil de contrainte. Il est possible de les maintenir en écoulement en imposant une contrainte inférieure à celle qu'il a fallu appliquer pour briser la structure initiale.
Contrairement à ce qu'on pourrait croire, cet effet est réversibleréversible : en laissant le matériau au repos, la structure initiale se reforme progressivement au cours du temps, et le seuil de contrainte apparent du matériau augmente en conséquence. On dit que ces matériaux sont thixotropesthixotropes.
Cette propriété étrange s'explique par un autre phénomène physique résultant de la petite taille des particules colloïdales : le mouvement brownien, du nom du botanistebotaniste écossais Robert Brown, l'un des premiers à avoir observé et décrit ce phénomène pour des grains de pollenpollen. Du fait de l'agitation thermique, les molécules du liquide entrent en collision avec les particules solidessolides en suspension. La direction et l'amplitude des forces exercées sur la particule et résultant de ces chocs sont imprévisibles si on les considère individuellement. En revanche, la moyenne de la force sur l'ensemble des collisions possibles à un instant donné est reliée à la température du système, laquelle est associée à l'agitation des molécules du liquide. Cette force totale instantanée induit un mouvementmouvement de la particule à travers le liquide d'autant plus important que l'inertieinertie de la particule est faible. Finalement, du fait des variations au cours du temps de la force totale, les particules sont animées de mouvements erratiques qui les conduisent à diffuser plus ou moins largement à travers le liquide.
Forces d’interaction dans la suspension et renfort
Cette agitation est d'autant plus importante que les particules sont de petite taille. Grâce au mouvement brownien couplé aux forces d'interaction entre particules, le réseau d'interactions à l'origine du seuil de contrainte du matériau se renforce progressivement au fil du temps : les particules explorent et atteignent des positions sans cesse plus stables, autrement dit associées à des puits de potentiel plus profonds, ou bien forment un réseau d'interactions de plus en plus étendu. Finalement, la structure est de plus en plus résistante. Durant l'écoulement, ce réseau se brise en partie, mais commence sa reconstruction dès que le matériau est arrêté.
Ce comportement thixotrope est utile en pratique lorsque l'on souhaite disposer d'un fluide très visqueux au repos, mais offrant une très faible résistancerésistance à l'écoulement. C'est en particulier le cas des peintures : l'utilisateur préfère une peinture qui imprègne facilement le pinceau et qui s'étale sans effort sur le murmur, mais aussi qui devient rapidement plus visqueuse dès qu'elle a été étalée, autrement dit au repos, de façon à ce qu'elle ne coule pas sur le mur.
La formulation des bétonsbétons dits autoplaçants a des objectifs analogues : ces matériaux ont une faible viscosité apparente lorsqu'ils coulent, si bien qu'ils sont facilement pompables et épousent bien la forme des coffragescoffrages qui leur donnent leur forme finale. Dès que l'écoulement s'arrête, ils se restructurent rapidement, ce qui permet d'éviter que les particules grossières (sablesable, graviers) ne sédimentent. Les boues de forage offrent un autre exemple de matériau thixotrope : elles sont notamment utilisées pour faciliter le creusement et l'extraction de la roche. Elles doivent par conséquent pouvoir s'écouler facilement lors de leur injection dans le puits et pour la lubrification des outils de forage. Mais il faut aussi qu'elles soient capables de supporter des éléments de roches en suspension lors d'un arrêt du système, ce qui est possible grâce à une augmentation suffisamment rapide du seuil de contrainte au repos.