au sommaire
1 - Historique du projet
En 1985, la guerre froide se termine et la création d'un projet de recherche international favorise le réchauffement des relations entre l'Est et l'Ouest. Les Etats-Unis, la France et l'URSS évoquent la réalisation d'un réacteur expérimental capable de démontrer la faisabilité de la fusion thermo nucléaire. En 1987, l'URSS, les États-Unis, la Communauté Européenne et le Japon signent le démarrage d'une étude conceptuelle : le projet ITER (International Thermonuclear Experimental ReactorInternational Thermonuclear Experimental Reactor) est né.
En 1999, les Etats-Unis se retirent du projet. Les autres membres décident alors de continuer, mais en revoyant à la baisse les objectifs et les dimensions de la machine afin d'en diminuer les coûts. Le nouveau design est terminé en 2001. Symboliquement, le sens du nom « ITER » est modifié : ce n'est désormais plus l'acronyme pour International Thermonuclear Experimental Reactor, mais le mot latin iter, signifiant « le chemin ».
En 2004, la Chine et la Corée du Sud entrent dans la collaboration et les États-Unis rejoignent à nouveau le projet. En juin 2005, c'est le site Français, situé à coté du centre de recherche du CEA de Cadarache, qui est choisit. Fin 2005, l'Inde devient le septième membre du projet ITER. Enfin, le 21 novembre 2006, le traité international ITER, fixant le cadre juridique et financier de la coopération entre les sept partenaires est signé à l'Elysée8. Les premiers travaux de terrassementterrassement débutent en 2007.
2 - Le chantier Iter
En attendant la constructionconstruction des bâtiments, les premiers bureaux temporaires sont installés en 2007 au sein du centre du CEA, à proximité de l'installation Tore Supra. En Avril 2009, les travaux de terrassement sont terminés : 42 hectares de terrain ont été terrassés et 2.5 millions de mètres-cubes ont été déplacés (soit l'équivalent de la pyramide de Khéops ou de 1000 piscines olympiques)9.
En juin 2009, le premier plasma d'Iter était prévu pour 201810. Les phases d'opérations initiales seront réalisées sans tritium - uniquement avec de l'hydrogène ou de l'hélium - ce qui permettra de tester la machine et ses installations, de calibrer les instruments permettant de mesurer les paramètres du plasma et éventuellement d'intervenir directement dans l'enceinte de la chambre à vide. Une fois ces phases préliminaires effectuées, la phase deuterium-tritium, prévue pour l'horizon 2026, pourra démarrer. Il ne sera alors plus possible d'ouvrir le tokamak : toutes les opérations devront être réalisées à distance, grâce à des outils robotiquerobotique de télé-manipulation.
En novembre 2009, le conseil d'Iter, réuni à Cadarache, avait abandonné l'objectif de 2018 pour l'obtention du premier plasma. Il s'est engagé à établir un nouveau calendrier d'ici fin février 2010. Pour cela, un conseil d'administration extraordinaire aura lieu en mars pour adopter le nouveau calendrier. Deux nouvelles dates doivent être retenues, l'une optimiste au plus près de 2018 qui reste une "base de travail", et l'autre plus lointaine. Les travaux d'excavation du bâtiment principal qui accueillera le Tokamak, devraient commencer quant à eux durant l'été 2010.
3 - Les objectifs d'Iter
Afin de rendre compte des performances d'un réacteur, on définit le facteur d'amplification Q comme le rapport de la puissance générée issue des réactions de fusion par la puissance injectée pour maintenir le plasma à température. Lorsque Q=1, il y'a autant de puissance produite que de puissance injectée : c'est le break-even. Lorsque Q est supérieur à 5, la puissance fournie par la fusion compense la puissance injectée : le bilan devient positif et le réacteur devient producteur d'énergie. Lorsque l'énergie fournie par les noyaux d'Hélium (appelés aussi particules alpha) suffit à entretenir le plasma à température, il n'est alors plus nécessaire d'injecter de l'énergie : c'est l'ignition (Q → ꝏ). Ce facteur Q qualifie le bilan énergétique du plasma et ne doit pas être confondu avec le rendement global de l'installation.
Les objectifs principaux du réacteur expérimental Iter sont :
• Obtenir un facteur d'amplification de Q=10 pendant 400 s
• Démontrer un fonctionnement continu pour Q=5
• Démontrer la faisabilité technologique, l'intégration de dispositifs avancés et leur utilisation industrielle, tels que les bobines supraconductrices ou des outils de télé-manipulation dans l'environnement du réacteur.
Les dimensions d'Iter ont été calculées afin d'atteindre ces objectifs. Comme la puissance générée dépend en partie de la taille de la machine, Iter sera le plus grand tokamak jamais construit. Iter est l'un des projets technologiques le plus avancé de l'histoire et la plus large collaboration scientifique au monde. Pour avoir un ordre d'idée de la taille d'Iter, nous avons rassemblé ci-dessous les dimensions relatives des tokamaks Tore Supra et JET par rapport à Iter. Le grand rayon R d'un tokamak correspond à la distance entre l'axe central et le milieu de la chambre à vide. Le petit rayon a se rapporte quant à lui au rayon moyen de l'anneau de plasma.
Pour être économiquement rentable, un facteur d'amplification de l'ordre de 20 à 30 est nécessaire à un futur réacteur industriel afin de génèrer suffisamment de puissance pour compenser toutes les pertes.(récupération et transport de la chaleurchaleur, conversion en électricité, etc.).
Iter ne produira pas d'électricité et la construction d'un démonstrateurdémonstrateur économiquement rentable (projet DEMO) est déjà en cours de considération pour « l'après Iter ».
4 - Sureté
Contrairement aux réactions de fission nucléairesfission nucléaires utilisées dans les réacteurs actuels, le produit de la réaction de fusion deuterium-tritium n'est pas radioactif. Il s'agit d'un gazgaz inerte : l'hélium.
Toutefois, le réacteur expérimental Iter utilise comme combustiblecombustible un élément radioactif, le tritium. A ce titre, l'installation qui est basée sur le sol français doit répondre aux normes nationales en matièrematière de sécurité nucléaire. Iter sera ainsi classifié au sens du droit français comme Installation Nucléaire de Base (INB), au même titre qu'une centrale électronucléaire. La conception, la construction, l'exploitation et le démantèlement sont réglementés. L'installation sera soumise aux autorisation et contrôle de l'autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de la direction régionale de la recherche, de l'industrie et de l'environnement (Drire). [Source : questions-réponses de l'agence Iter France http://www.itercad.org/question_2.php ]
Les plasmas d'Iter ne contiendront que quelques grammes de tritium à un temps donné. Des démonstrateurs de couvertures tritigènescouvertures tritigènes à base de lithiumlithium, capables de générer du tritium à partir des flux de neutronsneutrons, seront testés dans Iter afin de concevoir les couvertures des futurs réacteurs11 .
Les réactions nucléairesréactions nucléaires qui seront produites à l'intérieur de la chambre à vide du tokamak Iter produiront des neutrons de haute énergie, qui activeront les parois du réacteur. Différentes enceintes, emboitées les unes dans les autres, serviront de barrière de protection. La maintenance et les réparations éventuelles des éléments activés seront réalisés grâce à des outils de télé-manipulation afin de limiter l'exposition du personnel. Un murmur de bétonbéton de deux mètres d'épaisseur viendra finalement entourer le tokamak.
La nocivité des éléments activés diminue avec le temps (ce qui n'est pas le cas des déchetsdéchets chimiques industriels classiques). Les déchets issus de remplacements ou du démantèlement d'Iter seront principalement des déchets dits « à vie courte », c'est-à-dire de l'ordre d'une centaine d'année. Au bout de cette période, leur radioactivitéradioactivité sera comparable à la radioactivité naturelle12.
Les neutrons générés dans Iter ont une énergie de 14,1 MeV et sont beaucoup plus énergétiques que ceux obtenus dans les réacteurs à fission. Les impacts de ces neutrons avec les matériaux des premières parois d'un réacteur peuvent endommager leurs structures atomiques et dégrader leurs performances. Les flux de neutrons attendus dans Iter seront acceptables pour les parois du réacteur. Toutefois, la réalisation de matériaux résistants aux conditions d'un futur réacteur fonctionnant en continu demeure un défi technologique. Une installation expérimentale, nommée IFMIF (International Fusion Materials IrradiationIrradiation Facility), permettra de générer des neutrons de haute énergie afin de tester les nouveaux matériaux susceptibles d'équiper les futurs réacteurs.
Enfin, la réaction de fusion ne risque à aucun moment de s'emballer et de produire une réaction en chaîneréaction en chaîne non maîtrisée conduisant à une catastrophe comme celle de Tchernobyl. En effet, nous l'avons vu, les réactions de fusion ne peuvent se produire que dans des conditions de températures et de pressionpression parfaitement contrôlées. La moindre perturbation a pour effet immédiat de refroidir le plasma et ainsi d'arrêter les réactions de fusion. Le problème d'un réacteur à fusion n'est donc pas d'éviter la surchauffe comme dans les réacteurs à fission, mais au contraire d'éviter que le plasma ne se refroidisse. Par conséquent, les risques liés à un réacteur fusion seront très limités.
8 - http://www.ambafrance-ca.org/spip.php?article1440
9 - http://www.iter.org/proj/Pages/BuildingITER.aspx
10 - Source AFP : Nuclear fusion power project to start in 2018: official (AFP) - Jun 18, 2009
11 - Pour plus de renseignements : http://www.iter.org/Pages/Safety.aspx
12 - Iter débat public, « analyse des risques ». http://www.debatpublic-iter.org/docs/pdf/dossier-mo/iter-2.pdf