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La science, de plus en plus, ennuie et rebute les jeunes. Ses débouchés ne les attirent plus. Les étudiants des filières S&TT se raréfient... Alors que la connaissance scientifique est passionnante et représente un enjeu capital dans un monde de plus en plus technique, comment contrer cette désaffection ? De nombreux scientifiques, enseignants, responsables de centres de science ont décidé de prendre cette morosité à bras le corps. L'enseignement informel, les sites InternetInternet ludiques, la formation continue, la pédagogie active sont autant de pistes pour sortir de cette léthargie.
"J'étais loin d'être un bon élève, et puis j'ai eu un professeur de math et de physique qui m'a donné envie de travailler. Je faisais des expériences chez moi, je regardais des émissions scientifiques à la télévision, et parfois je savais de quoi il s'agissait en arrivant au cours, avant qu'on ne nous l'explique... Après cela, ce fut un chemin en ligne droite." Cette ligne droite a conduit Florian Berberich à étudier la physique à l'Université Ludwig-Maximilians de Munich et présenter un doctorat au Research Center de Rossendorf (DE) avant de se lancer dans un travail de chercheur à l'ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) de Grenoble.
- Retendre les ressorts
En sciences, comme en bien d'autres matières, l'école représente une rampe de lancement essentielle. Mais elle semble manquer de ressort. Beaucoup s'alarment aujourd'hui du désamour des jeunes générations pour la S&T. Deux enquêtes récentes consacrées au sentiment des Européens dans ce domaine (Les Européens, la science et la technologie - Eurobaromètre 55.2 Décembre 2001 (sondage dans les Etats membres) et Eurobaromètre - Pays candidats 2003) sont révélatrices. Dans les pays candidats, ce sont les salaires et les perspectives de carrière (52%, contre 40% dans l'UE) qui décourageraient principalement les étudiants des filières scientifiques. Dans l'Union, 67,3% des jeunes interviewés expliquent leur désintérêt par le manque d'attrait des cours de sciences et 58,7% leur trop grande difficulté.
"La question de la désaffection pour la science est complexe, estime pour sa part Antonella deldel Rosso, physicienne possédant une formation d'enseignante, responsable pédagogique au CERN (voir encadré, RecyclageRecyclage au CERN). Les cours de science sont en général perçus comme très ardus. Si un choix est possible, on les évite. Sinon, on les suit sans vraiment les comprendre, en tentant de s'en tirer."
Conséquence directe en aval : au niveau universitaire, les filières scientifiques "dures" sont en chute libre. En France, par exemple, alors qu'elles comptaient 133 000 jeunes en 1996, elles n'en mobilisaient plus que 98 000 en 2001-2002. Selon le rapport européen Strata-Etan (Benchmarking National R&D Policies, Human Resources in RTD, Strata-Etan expert working group, Final report, 21.08.02), les sciences "basiques" (chimiechimie, mathématique, physique) ont perdu au cours de ces dernières années, un tiers d'adeptes en moins en Allemagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Avec, toutefois, un déplacement qui compense un peu ce constat négatif : les chiffres se maintiennent - voire augmentent - dans des disciplines « jeunes », comme la biologie, l'informatique, les sciences de la Terre et de l'environnement.
- L'éducation informelle
Comment remonter le courant ? A travers l'Europe, de nombreuses initiatives favorisant une pédagogie active et inventive ont pour objectif de "soutenir" l'enseignement des sciences. Elles vont des propositions ludiques pour enfants du plus jeune âge à la "formation permanente" des professeurs. Ainsi, les musées et centres de science débordent d'imagination, les expositions circulent, les bonnes idées fourmillent, les concours fusent. Leurs responsables croient fermement au bénéfice de cette "'éducation informelle", susceptible de vivifier, par d'autres biais, l'intérêt pour la science - et pourquoi pas ses métiers.
Encore faut-il, bien sûr, pour entraîner ses élèves au musée, ne pas être enseignant en zone (trop) rurale, "caler" des visites extra-scolaires dans ses horaires, faire accepter ces dépenses par les parents, etc. Néanmoins... Les possibilités offertes via Internet permettent de télécharger des documents, de s'inscrire à des clubs, de faire participer son école à des concours virtuels, de trouver d'excellentes idées pour rendre la science séduisante.
L'enjeu est de taille. "La science appartient à la culture générale d'une civilisation », estime Antonella del Rosso. « Et cela d'autant plus qu'aujourd'hui la technologie est imbriquée dans notre quotidien et qu'il n'y a pas de technologie sans recherche préalable. Le danger est grand d'une perte de contact avec notre monde si nous n'arrivons plus à former les futures générations sur l'évolution scientifique de ce qui nous entoure."