Découvrez ici les propriétés physiques et chimiques du mercure, ce métal si surprenant qui a la particularité d'être liquide sous les conditions normales de température et de pression.

Le cinabre est une espèce minérale composée de sulfure de mercure. Il se distingue du vermillon qui est un pigment minéral artificiel produit par synthèse. © S_E, Shutterstock

Le cinabre est une espèce minérale composée de sulfure de mercure. Il se distingue du vermillon qui est un pigment minéral artificiel produit par synthèse. © S_E, Shutterstock

Le mercure, de symbole Hg

Le symbole du mercure est Hg. La teneur moyenne de l'écorce terrestre en mercure est de 0,05 ppm.

Du mercure natif. © <a href="http://www.exceptionalminerals.com/" target="_blank">Kevin Ward</a>, DR

Du mercure natif. © Kevin Ward, DR

Les minerais exploités contiennent de 0,5 à 5 % de Hg.

Cinabre. © Dave Barthelemy, tous droits réservés

Cinabre. © Dave Barthelemy, tous droits réservés

On en exploite 10.000 tonnes par an, dont seulement 20 % sont recyclés, ce qui laisse une bonne dose de mercure disponible pour la pollution...

Du métacinabre, une espèce minérale de sulfure de mercure avec des traces de zinc, sélénium, cadmium et fer servant de minerai de mercure. © <a href="http://www.nhm.org/site/join-us/gem-mineral-council/photo-atlas-minerals" target="_blank">Lou Perfoff</a> Webmineral, tous droits réservés

Du métacinabre, une espèce minérale de sulfure de mercure avec des traces de zinc, sélénium, cadmium et fer servant de minerai de mercure. © Lou Perfoff Webmineral, tous droits réservés

On trouve du mercure associé avec le réalgar (AsS) et l'orpiment (As2S3). Certaines roches peuvent se minéraliser en cinabre, c'est le cas de ce quartzite ! La couleur rouge est « prise » dans la roche elle-même.

Quartzite minéralisé en cinabre. © Webmineral, tous droits réservés

Quartzite minéralisé en cinabre. © Webmineral, tous droits réservés

Propriétés physiques du mercure

  • Masse volumique : 13.579,04 kg/m3 pour le mercure liquide à 25 °C mais 14,6 pour le mercure solide à 5 K et 14,2 à -39 °C ce qui implique une très brutale chute de densité au moment de la fusion à -38,8 °C
  • Structure cristalline : l'état cristallin a été étudié entre 5 et 206 K à P atm (atmosphère normale) ; le mercure est rhomboèdrique et un atome est entouré de 6 autres à une distance de 3 Å, ce qui correspond au double du rayon covalent de 1,48 Å.
  • Couleur : argenté blanc
  • Masse atomique : 200,59 u
  • Configuration électronique : Xe 4f14 5d10 6s2
  • États d'oxydation (oxyde) : 2, 1
  • Température de fusion : 234,32 K
  • Température de vaporisation : 629,88 K
  • Point triple : -38,8344 °C, point fixe de l'échelle internationale des températures (ITS-90)
  • Électronégativité (Pauling) : 2,00
  • Chaleur massique : 138,8 J/(kg.K)
  • Conductivité électrique : 1,04×106 S/m
  • Conductivité thermique : 8,34 W/(m.K)
  • Viscosité : 17,0×10-3 Pl. La viscosité dynamique μ (ou encore η) se mesure en pascal-seconde (Pa.s), cette unité ayant remplacé le poiseuille (Pl) qui a la même valeur.
  • Tension superficielle : 480 mN/m à 20 °C
  • Pression de vapeur : à 20 °C on a 0.26 Pa
  • Densité de vapeur relative (air = 1) : 6.93
  • Densité relative du mélange air-vapeur à 20 °C (air = 1) : 1.009
On voit ici l'évaporation du mercure sous cloche (en bas à droite de l'image). Les plumets présents dans l'alcôve sont destinés à recueillir le mercure liquide. © DR

On voit ici l'évaporation du mercure sous cloche (en bas à droite de l'image). Les plumets présents dans l'alcôve sont destinés à recueillir le mercure liquide. © DR

Les vapeurs de mercure sont nocives. On notera que le mercure est le seul élément en dehors des gaz rares à exister sous forme de vapeur monoatomique. La pression de vapeur saturante P* du mercure est donnée en kilopascals par les formules suivantes :

  • log P* = 7,149 - 3212,5/T entre 273 et 423 K
  • log P* = 7,003 - 0,000197(T-273) - 3141.33/T entre 423 et 673 K

Ces données sont importantes, compte tenu de la nocivité des vapeurs de ce métal.

Appareil à sublimer. © DR

Appareil à sublimer. © DR

Limites d'exposition professionnelle (LEP)

D'après les fiches de sécurité chimique internationales, les Limites d'exposition professionnelle (LEP) sont :
TLV : 0.025 mg/m³ TWA ; (peau) ; A4 ; BEI publié ; (ACGIH 2004).
MAK: 0.1 mg/m³ ; Sh ; Classe de limitation des taux les plus élevés : II(8) ;
Catégorie de carcinogénicité : 3B ; (DFG 2003).

Isotopes du mercure

Selon Debeler, voici les isotopes du mercure :

  • 189 : période 30 mn
  • 190 : période 90 mn
  • 191 : période 57 mn
  • 192 : période 6 h
  • 193 : période 6 h
  • 194 : plus ou moins stable
  • 195 : période 9,5 h
  • 196 : 0,156 % stable
  • 197 : période 66 h
  • 198 : 10,12 % stable
  • 199 : 16,99 % stable avec un isomère métastable
  • 200 : 23,07 % stable
  • 201 : 13,27 % stable
  • 202 : 29,64 % stable
  • 203 : période de 46-47 jours
  • 204 : 6,79 % stable
  • 205 : période 5,5 mn

On sait aujourd'hui que le mercure peut donner... de l'or. En effet, l'isotope 197 de Hg se transforme en isotope 197 de l'or, stable, en passant par un état métastable.

Le mercure, un métal liquide

Sous les conditions normales de température et de pression, le mercure est le seul métal à l'état liquide. Pourquoi ?

Cette propriété physique résulte de sa température de fusion de - 39 °C, donc il est solide pendant l'hiver sibérien ! Les éléments voisins dans le tableau périodique sont tous solides, mais ductiles et malléables... et ils ont des températures de fusion relativement basses, par exemple le cadmium est mou et fond à 321 °C, le zinc est tendre et fond à 420 °C.

L'atome possède 80 électrons dont 2 situés sur la couche électronique externe ; ces deux électrons, bien qu'occupant la sixième couche, sont très liés au noyau atomique, de sorte qu'ils ne sont pas partagés avec ceux de la couche correspondante d'un atome voisin : la liaison atome-atome est très faible et facilement rompue par un petit apport de chaleur. Pour la même raison, le mercure est un mauvais conducteur thermique et électrique.

Mercure et alliages : les amalgames

Le mercure forme des alliages avec presque tous les métaux communs, à l'exception du fer, du nickel et du cobalt et il est difficile avec le cuivre, le platine et l'antimoine. Ces alliages sont appelés « amalgames ».

De l'eugénite Ag<sub>9</sub>Hg<sub>2</sub>. © <a href="http://www.dakotamatrix.com/" target="_blank">Tom Loomis</a> Webmineral, tous droits réservés

De l'eugénite Ag9Hg2. © Tom Loomis Webmineral, tous droits réservés

Propriétés chimiques du mercure

Solubilité dans l'eau : 0,02 à 0,03 mg/L à 20 °C, soit environ 10-7 at-g/L et 0,06 à 100 °C, le tout à l'abri de l'air. Un équilibre s'établit entre le mercure dissous, le mercure liquide non dissous et la vapeur de mercure.

Potentiel redox :

Hg 2+ + 2e → Hg° avec E° = 0,85
Hg22+ + 2e → 2 Hg° avec E° = 0,79
2 Hg 2+ + 2e → Hg22+ avec E° = 0,92

Ne réagissent pas avec le mercure dans les conditions normales :

  • l'hydrogène,
  • les gaz rares,
  • l'oxygène ou l'air très secs,
  • l'eau,
  • HF,
  • HCl,
  • HI, HBr et NH3 s'ils sont secs.

En revanche, les halogènes se combinent tous directement au mercure et l'ozone réagit très rapidement, de même que l'oxygène si l'atmosphère est humide, s'il y a des UV ou si la température est élevée.

Le soufre, le selenium et le tellure se combinent facilement avec le mercure ainsi que de nombreux métaux. NH3 réagit très fortement si l'atmosphère est humide à pression ordinaire et donne un composé rouge brun explosif dans lequel l'oxygène est fourni par l'eau : (Hg2N) O (NH3) x

Les acides réagissent, par exemple HCL dilué en présence d'oxygène :

2Hg + 2 HCl + O2 → Hg2Cl2 + H2O2 suivi de
2Hg + 2 HCl + H2O2 → Hg2Cl2 + 2H2O

L'acide sulfurique réagit de même que l'acide nitrique mais pas l'acide phosphorique. L'eau régale attaque aussi le mercure : du mercure HgCl2 est alors produit.

Le mercure tend à former des liaisons covalentes avec les composés soufrés. Les thiols étaient autrefois nommés « mercaptans », du latin mercurius captans.

Les solutions salines sont nombreuses à réagir avec le mercure : iodure de K de Zn donnent du iodure mercurique rouge, le persulfate de Na, le chlorure ferrique, le chlorure cuivrique, etc.

Mais les sels de mercure réagissent aussi facilement avec l'ammoniac en présence d'ammonium et on obtient des ammines (attention : Ici « ammine » a 2 m parce qu'il s'agit de composés inorganiques par coordination entre l'ammoniac et un sel métallique), par exemple :

  • des diammines du type Hg(NH3)2Xn, où X= NO3, SCN, SO3, S2O3
  • ou des tétrammines du type Hg(NH3)4Xn, où X= NO3, SCN, SO3, S2O8, ClO4.

Les propriétés remarquables du mercure l'ont rendu utile dans une foule de domaines :

Mais certaines de ces utilisations sont tombées en désuétude à cause de la toxicité et la difficulté d'emploi du mercure.

Découvrez à présent quelques composés du mercure intéressants : le calomel, le chlorure mercurique HgCl2, les oxychlorures, les organomercuriels et la base de Millon.

Le calomel

Le chlorure mercureux Hg2Cl 2 : le calomel.

Calomel. © <a href="http://tw.strahlen.org/" target="_blank">Thomas Witzke</a> Webmineral, tous droits réservés

Calomel. © Thomas Witzke Webmineral, tous droits réservés

Le chlorure mercureux se forme par action directe du chlore sur le mercure par voie sèche ou humide. Par voie sèche par exemple :

HgSO4 + Hg + 2NaCl → Hg2Cl 2 + Na2SO4

Lavé à l'eau tiède, essoré, séché à 100 °C à l'abri de la lumière, on le purifie par l'éther qui dissout seulement le chlorure mercurique formé. Ce fameux calomel forme les électrodes de référence en électrochimie.

Une électrode à calomel est constituée d'une électrode de mercure en contact avec du calomel lui-même mélangé intimement à du mercure pour lui éviter la formation de chlorure mercurique, et baignant dans un électrolyte, habituellement du KCl. On a ainsi la chaîne Hg / Hg2Cl2 / KCl.

L'avantage de cette électrode est qu'elle reste identique à elle-même quel que soit le sens du courant !

En effet si elle sert d'anode :

2 Cl- → Cl2 +2e et
Cl2 + 2 Hg → Hg2Cl2

de cathode :

Hg22+ + 2e → 2 Hg
Schéma d'une électrode au calomel. © DR

Schéma d'une électrode au calomel. © DR

Mais l'emploi de cette électrode n'est pas recommandé si la température est élevée.

Le chlorure mercurique HgCl2

Le chlorure mercurique HgCl2 est soluble dans de nombreux solvants organiques. Il est aussi soluble dans l'eau légèrement acide avec des ions Cl-, c'est-à-dire pratiquement toutes les eaux potables ! Et on obtient des ions chloromercurates (HgCl3)- ou (HgCl)4 2-.

Les oxychlorures

Les oxychlorures sont : 

  • HgCl2.3HgO, principal constituant de la kleinite hexagonale et de la mosesite cubique
  • HgCl2.2HgO, ou Hg(OHgCl)2 (autre formule du même composé), peut être rouge s'il est hexagonal et noir s'il est monoclinique.

Ces oxychlorures existent donc à l'état naturel, de même que HgCl2.4HgO ou Hg4Cl4Hg6O8, dont les formes et les couleurs sont très diverses.

Les organomercuriels

Avec les amines ou d'autres composés azotés on peut obtenir très facilement des combinaisons analogues à celles obtenues avec NH3 qui ont un atome d'azote lié au mercure par exemple avec :

  • l'hydroylamine : Hg (NH2OH)2 Cl-
  • la pyridine : Hg (C5H5N)2 Cl-

de même avec la quinoléine, l'urée, la méthionine ou l'histamine...

La base de Millon

Le mercure peut former une base en réagissant avec une solution ammoniacale dans certaines conditions et on obtient le composé suivant :

Image du site Futura Sciences