La guerre de Cent Ans représente un tournant dans l'histoire de France. Retour sur ce conflit qui dura de 1337 à 1453. Voyons ici les causes profondes de cette guerre.

    Quelles sont les dates clés de la guerre de Cent Ans ? Ici, représentation du combat des Trente (1351). © Octave Penguilly L'Haridon, <em>Wikimedia Commons</em>, DP
    Quelles sont les dates clés de la guerre de Cent Ans ? Ici, représentation du combat des Trente (1351). © Octave Penguilly L'Haridon, Wikimedia Commons, DP

    En réalité il n'y eut pas vraiment « une » guerre de Cent Ans, mais plutôt une série de conflits étalés sur plus d'un siècle entre dirigeants issus de deux familles puissantes rivales :

    • les Capétiens, rois de France ;
    • les Plantagenêts, rois d'Angleterre.

    Avant la guerre de Cent Ans, les vieux royaumes de France et d'Angleterre semblaient avoir jusqu'alors une relation plutôt harmonieuse. Richard Cœur de Lion (1157-1199) et Philippe Auguste (1165-1223) avaient combattu côte à côte aux croisades. La dynastie des Plantagenêts découlait des ducs de Normandie qui, au XIe siècle, avaient établi le royaume d'Angleterre moderne en vainquant les rois saxons à la bataille d'Hastings, en 1066.

    Causes de la guerre de Cent Ans

    Mais c'est justement cette parenté qui va rapidement poser problème : les rois d'Angleterre sont toujours, en théorie, ducs de Normandie. Ainsi, d'un côté, le roi de France supporte mal qu'un roi étranger possède l'un de ses plus grands fiefs et, de l'autre côté, le roi d'Angleterre est humilié d'être le vassal d'un autre roi.

    Représentation de la bataille de Bouvines gagnée par Philippe Auguste en 1214, soit plus d'un siècle avant le début de la guerre de Cent Ans. © PHGCOM, <em>Wikimedia Commons</em>, DP
    Représentation de la bataille de Bouvines gagnée par Philippe Auguste en 1214, soit plus d'un siècle avant le début de la guerre de Cent Ans. © PHGCOM, Wikimedia Commons, DP

    Dans ce dossier, nous verrons que cette question va agiter les deux familles et provoquer une première série de conflits quand Philippe Auguste chasse le successeur de Richard Cœur de Lion, le roi anglais Jean sans Terre, de ses possessions françaises. Après la bataille de Bouvines (1214), Philippe Auguste ne laisse grosso modo au roi d'Angleterre qu'un petit territoire en Gascogne. Mais les Plantagenêts auront leur revanche...

    À lire aussi sur Futura :


    1337 : début de la guerre de Cent Ans

    1337 marque le début de la guerre de Cent Ans. Comment les royaumes de France et d'Angleterre en sont-ils arrivés là ? Retour sur les origines de cette guerre ainsi que sur ses débuts.

    1337 marque le début de la guerre de Cent Ans. Ici, la bataille de Crécy, en 1346. © Jean Froissart, <em>Wikimedia Commons</em>, DP
    1337 marque le début de la guerre de Cent Ans. Ici, la bataille de Crécy, en 1346. © Jean Froissart, Wikimedia Commons, DP

    En 1223, le roi de France Philippe Auguste décède. Ses fils puis les successeurs de Philippe IV le Bel (les « rois maudits ») se déchirent pour la couronne et déclenchent une crise de succession.

    À la mort du roi Charles IV le Bel, en 1328, les Capétiens directs ont disparu. Deux candidats sont alors possibles : son cousin, Philippe de Valois, ou son neveu, Édouard III, roi d'Angleterre. C'est Philippe de Valois qui accède au trône, devenant Philippe VI de Valois, roi de France.

    Le conflit aquitain est rouvert et atteint son paroxysme en 1337 : Philippe VI de Valois décide, par mesure de rétorsion, de confisquer la Guyenne (sud-ouest de la France) à Édouard III, roi d'Angleterre. Celui-ci réplique en revendiquant la couronne de France. C'est le début de la guerre de Cent Ans.

    Bataille de Crécy et conquête de l'Aquitaine

    Dans un premier temps, les Anglais rencontrent de très nets succès. Ils écrasent l'armée française à la bataille de Crécy (1346), prennent la ville de Calais (1347) et conquièrent l'Aquitaine (1356). Les Anglais sont généralement plus unifiés que les fiefs français et l'on cite également la qualité de leurs archers (qui utilisent la technologie du longbow) pour expliquer leur supériorité au combat. Français et Anglais se battent également pour la Bretagne, dont le titre de duc est lui aussi en proie à une guerre de succession : chacun des deux camps a son favori pour accéder à la tête du duché.

    Le roi de France Jean II ne sut pas empêcher l'invasion anglaise et fut capturé en 1356. © DR
    Le roi de France Jean II ne sut pas empêcher l'invasion anglaise et fut capturé en 1356. © DR

    Jean II le Bon succède à Philippe VI en 1350. Le nouveau roi de France est capturé en 1356 lors de la bataille de Poitiers (à l'issue de la chevauchée dévastatrice menée par le Prince Noir, fils d'Édouard III). Sa libération contre une rançon très élevée pousse les Français à accepter une première trêve.


    1380 : mort de Charles V

    En 1360 est signé le traité de Brétigny et, avec lui, la paix, qui durera neuf ans. En 1369, la guerre reprend sur ordre du roi de France Charles V. C'est la reconquête française. Mais en 1380, Charles V meurt et son successeur, Charles VI, est atteint de folie. La guerre civile entre Bourguignons et Armagnacs éclate peu après. Retour sur ces évènements.

    Charles V meurt en 1380. © Gillot Saint-Evre, <em>Wikimedia Commons</em>, DP
    Charles V meurt en 1380. © Gillot Saint-Evre, Wikimedia Commons, DP

    La paix signée à Brétigny en 1360 donne à Édouard III une grande portion de l'ouest de la France, mais l'exclut lui-même du trône. Cependant, le nouveau roi de France, Charles V, ne fait pas confiance à son rival et considère que le traité n'est qu'une trêve.

    La reconquête française

    En 1369, la guerre reprend sur ordre du roi de France Charles V. C'est la reconquête française. Bien que la guerre de succession de Bretagne ait vu la victoire du candidat anglais, celui-ci ne tarde pas à se réconcilier avec le roi de France et devient un allié important. Le général breton Bertrand du Guesclin joue ainsi un rôle prépondérant dans les succès de l'armée de Charles V.

    Édouard III est trop vieux pour faire la guerre et ses généraux les plus puissants dont son fils, le Prince Noir, meurent au combat ou sont capturés. Bientôt, des troubles internes en Angleterre (révolte du pays de Galles, conflits avec l'Écosse) et l'accession au trône du fragile Richard II poussent les Anglais à accepter une paix beaucoup plus favorable aux Français.

    Édouard III, roi d'Angleterre. © <em>National Portrait Gallery, Wikimedia Commons</em>, DP
    Édouard III, roi d'Angleterre. © National Portrait Gallery, Wikimedia Commons, DP

    Guerre civile entre Bourguignons et Armagnacs

    Mais le royaume de France ne tarde pas à rencontrer lui aussi des problèmes internes. Charles V décède en 1380 et son successeur, Charles VI, est atteint de folie. Deux personnages ambitieux en profitent pour prendre le contrôle du royaume de France : son frère Louis d'Orléans et le puissant duc de Bourgogne Jean sans Peur. Les deux hommes s'affrontent pour obtenir l'ascendant sur Charles VI : c'est la « querelle des Armagnacs et des Bourguignons ». Dans ce contexte, la France évite de chercher le conflit avec l'Angleterre.

    L'assassinat de Louis d'Orléans par les partisans de la Bourgogne est le sommet de la lutte entre les deux partis. © DR
    L'assassinat de Louis d'Orléans par les partisans de la Bourgogne est le sommet de la lutte entre les deux partis. © DR

    Mais quand les Anglais eux-mêmes retrouvent leur stabilité sous le règne d'Henri V, ils trouvent la situation propice pour attaquer une France déchirée. C'est le début de la phase la plus célèbre du conflit...


    1415 : la bataille d'Azincourt et ses conséquences

    Henri V, roi d'Angleterre, débarque avec son armée en 1415 en Normandie. La même année, sur le site d'Azincourt, il rencontre une armée française beaucoup plus puissante. Mais, à la surprise générale, Henri V écrase littéralement les Français. Quelles sont les conséquences de cette défaite ?

    La bataille d'Azincourt est la plus grave défaite française de la guerre de Cent Ans (1415). © Chroniques d’Enguerrand de Monstrelet,<em> Wikimedia Commons</em>, DP
    La bataille d'Azincourt est la plus grave défaite française de la guerre de Cent Ans (1415). © Chroniques d’Enguerrand de Monstrelet, Wikimedia Commons, DP

    La bataille d'Azincourt : importante défaite des Français face aux Anglais

    Après la défaite d'Azincourt (1415), la France se trouve pratiquement sans défense et Henri V circule librement entre Caen et Calais : un vaste territoire autour de la Normandie passe entre les mains anglaises.

    Voir aussi

    Azincourt 1415, les raisons de la défaite française

    L'alliance des Bourguignons et des Anglais

    Pour couronner le tout, le puissant duché de Bourgogne saisit l'occasion de s'allier aux Anglais. Rêvant de devenir un royaume indépendant à son tour, la Bourgogne ne fait rien pour aider son suzerain le roi de France. Bien au contraire, tout ce qui peut affaiblir la couronne française est bon pour les projets d'indépendance des ducs de Bourgogne. En 1420, la Bourgogne et les Anglais envahissent Paris et le roi Charles VI doit accepter le mariage d'Henri V avec sa fille. En outre, son propre fils, le dauphin, est exclu de la succession : le roi anglais Henri V vient d'obtenir que ses enfants soient les futurs rois de France.

    Le dauphin, réfugié dans le centre de la France, n'accepte pas cette décision et décide de continuer la lutte contre les Anglais et les Bourguignons. Les anciens membres du parti des Armagnacs le soutiennent et une armée écossaise vient également à son secours. Alors que les Anglais assiègent la ville d'Orléans, un personnage particulier va venir au secours du dauphin...


    1429 : arrivée de Jeanne d'Arc et reprise d’Orléans

    L'histoire de Jeanne d'Arc est bien connue : ayant reçu ce qu'elle appelle un message divin, elle quitte son village pour rencontrer le dauphin et le persuader de mener son armée à la victoire.

    En 1429, Jeanne d'Arc arrive et reprend Orléans. © August Gustav Lasinsky (1811–1870), <em>Wikimedia Commons</em>, DP
    En 1429, Jeanne d'Arc arrive et reprend Orléans. © August Gustav Lasinsky (1811–1870), Wikimedia Commons, DP

    L'arrivée de Jeanne d'Arc

    Au moment où Jeanne arrive devant le dauphin en 1429, les Anglais ont déjà cessé leur avance : à Orléans, ils ont assez de forces pour assiéger la ville, mais pas assez pour l'envahir ni continuer plus loin sur le territoire français. 

    L'armée française est déjà renforcée et proche de la ville, mais le moral est bas. Pour l'essentiel, l'arrivée de Jeanne d'Arc représente un retour à l'esprit offensif : Orléans est reprise. L'armée française sécurise ensuite la Loire en reprenant la plupart des ponts et, surtout, vainc les troupes anglaises de John Talbot à Patay. Cette défaite, la première des longbows (archers) anglais, est un tournant car désormais la route de Reims est libre. Or, c'est à Reims que le dauphin doit être sacré pour devenir roi de France.

    Le dauphin est sacré à Reims

    Accompagné de Jeanne d'Arc, dont la popularité va grandissante, Charles traverse le territoire occupé par les Anglais et les Bourguignons et gagne la cathédrale de Reims, où il devient le roi Charles VII le 17 juillet 1429. Cependant, peu de temps après, Jeanne d'Arc est capturée par les troupes bourguignonnes qui tenaient encore les environs de la ville. Livrée aux Anglais, elle est jugée pour hérésie et brûlée en place publique à Rouen.

    Jeanne d'Arc fut principalement un bonus au moral des troupes françaises, mais il faut croire que c'est tout ce qui leur manquait : après son apparition, la France ira de victoires en victoires. © DR
    Jeanne d'Arc fut principalement un bonus au moral des troupes françaises, mais il faut croire que c'est tout ce qui leur manquait : après son apparition, la France ira de victoires en victoires. © DR

    Essentiellement symbolique, Jeanne d'Arc continue à jouer un rôle important après sa mort. Mais son importance sur le champ de bataille ne doit pas être exagérée. Le principal succès de Charles VII est diplomatique : en 1435, il parvient à convaincre le duc de Bourgogne d'abandonner l'alliance anglaise pour, au contraire, soutenir la France. Paris est rendue aux Français en échange de gains territoriaux aux Bourguignons.


    1453 : fin de la guerre de Cent Ans

    La guerre de Cent Ans s'achève en 1453. Cette année est celle de la bataille de Castillon, qui voit la victoire décisive des Français sur les Anglais. Retour sur ces évènements et sur les conséquences de la guerre de Cent Ans.

    La guerre de Cent Ans prend fin en 1453. Ici, représentation nous plongeant au cœur de la guerre, un siècle avant la fin des combats, en 1356, lors de la bataille de Poitiers, à Nouaillé-Maupertuis (chroniques de Froissart, manuscrits de Gruuthuse). © Bibliothèque Nationale de France, DP
    La guerre de Cent Ans prend fin en 1453. Ici, représentation nous plongeant au cœur de la guerre, un siècle avant la fin des combats, en 1356, lors de la bataille de Poitiers, à Nouaillé-Maupertuis (chroniques de Froissart, manuscrits de Gruuthuse). © Bibliothèque Nationale de France, DP

    Le roi de France Charles VII est à l'origine d'une armée permanente et centralisée qui échappe à la vieille tradition féodale. À la tête de ses troupes, il reprend Rouen en 1449 et, bien vite, après la bataille de Formigny (1450), Caen repasse du côté français. Au final, seule Calais reste anglaise. La guerre de Cent Ans se termine en 1453 lors de la bataille de Castillon, qui voit la victoire décisive des Français sur les Anglais.

    Conséquences de la guerre de Cent Ans

    La guerre de Cent Ans a des conséquences terribles pour les deux pays. La population française aurait diminué de moitié pendant le conflit, la peste ayant sévi à cette époque étant plus dévastatrice que la guerre.

    En Angleterre, la dynastie des Plantagenêts est fragilisée et l'armée anglaise démobilisée cherche le conflit. C'est l'origine d'une guerre civile anglaise entre les deux branches des Plantagenêts que sont les York et les Lancastre : ce sera la guerre des Deux-Roses.

    On considère par ailleurs que la guerre a donné le jour à des sentiments nationaux très forts qui n'existaient pas auparavant. Le risque de disparition du royaume de France fut bien réel pendant un temps et les Anglais craignaient que les Français ne débarquent sur leur île. Ce qui commença comme une dispute entre deux rois pour une seule couronne devint la lutte de deux peuples pour leur survie.

    La bataille de Formigny (1450) est une bataille décisive de la guerre de Cent Ans. © DR
    La bataille de Formigny (1450) est une bataille décisive de la guerre de Cent Ans. © DR

    Après la guerre de Cent Ans, la France se concentra sur le continent et l'Angleterre sur les îles britanniques. Par conséquent, les deux pays bataillèrent moins souvent. Les Anglais allaient toutefois connaître plusieurs guerres civiles pour affronter Écossais et Irlandais. Quant à la France, elle allait s'opposer aux véritables vainqueurs de la guerre de Cent Ans : les puissants ducs de Bourgogne.