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Vanguard enfonce le clou
Entre-temps, le projet Vanguard avait vu le jour. Ce lanceur exclusivement civil de 1,14 mètre de diamètre à la base et 23 mètres de hauteur comprenait trois étages à propergols liquides. Le premier (7.661 kgkg) brûlait un mélange de kérosène et d'oxygène, le deuxième (2.164 kg) fonctionnait à l'acideacide nitrique et UDMH et le troisième (210 kg), chargé de la mise à poste du satellite, utilisait un carburant solidesolide.
Le nouveau lanceur avait été testé à deux reprises en vol suborbitalsuborbital, c'est-à-dire sans tentative de mise en orbiteorbite, les 1er mai et 23 octobre 1957, où il avait atteint respectivement l'altitude de 175 et 194 km. Le vol historique fut programmé pour le 6 décembre.
La mondovision n'existait pas encore mais des journalistes de la planète entière étaient venus assister à l'évènement, qui s'annonçait grandiose. Le monde libre allait démontrer qu'il valait aussi bien que le monde communiste, diabolisé à l'extrême en cette période de guerre froide.
Vanguard 1, petite sphère d'aluminiumaluminium qui ressemblait à son confrère Spoutnik 1Spoutnik 1 mais avec seulement 15,2 cm de diamètre pour une massemasse de 1,36 kg, était juchée sur le troisième étage de son lanceur. Il comprenait deux émetteurs de 10 et 5 mW alimentés l'un par une pile au mercuremercure, le second par six cellules solaires. Deux thermo-résistancesrésistances devaient mesurer la température à bord de l'engin.
Le satellite Vanguard. Crédit Nasa
Lorsque le compte à rebours atteignit zéro, la fuséefusée sembla s'élever lentement dans un panache de fumée, puis retomba en s'inclinant vers l'arrière, heurtant violemment la structure de lancement. Eventrés, les réservoirs libérèrent leurs propergols qui explosèrent immédiatement. Propulsé à quelques dizaines de mètres, le petit satellite continua aussi imperturbablement qu'inutilement d'émettre sa ritournelle à destination des scientifiques atterrés...
Explosion du lanceur Vanguard. Crédit Nasa
Christopher Colombus Kraft, authentique explorateur spatial au nom étonnamment prédestiné même s'il n'a jamais participé à aucun vol, qui a ouvert la voie à l'astronautiqueastronautique du futur en mettant au point, notamment, le rendez-vous en orbite, apprit l'échec en direct sur la radio d'un taxi à Washington. Il déclarera lors d'une conférence de presse : « Je crois que ce fut une des journées les plus tragiques de l'épopée spatiale américaine. J'en fus réellement malade et je me mis à douter des possibilités des Etats-Unis. Et cela même avant que je ne participe au programme spatial ».
L'échec eut une répercussion énorme parmi les hautes sphères de Washington. Le Président donna l'ordre à l'Armée d'envoyer, dans le plus grand secret, par bateau, la fusée JupiterJupiter-C de Von Braun à Cap CanaveralCap Canaveral. Elle fut installée sur une rampe de lancement soigneusement entourée de palissades, afin d'éviter que les journalistes puissent l'apercevoir à la jumelle.