Les astronomes continuent d'analyser les données collectées par la mission astrométrique Gaia concernant presque deux milliards d'étoiles dans la Voie lactée. Elles ont révélé de curieuses structures qui pourraient être les restes fossiles d'anciens bras spiraux de notre Galaxie.
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La mission Gaia est une mission principalement d'astrométrie, c'est-à-dire dont le but est de mesurer les positions et les vitesses des étoiles dans la Voie lactée aussi précisément que possible. GaiaGaia a établi des records parce qu'elle a fait ces déterminations sur plus d'un milliard d'étoiles dans notre Galaxie. Ces mesures impactent toute l'astronomie et même la cosmologie car ces données servent à estimer les distances et les luminositésluminosités des étoiles, ce qui permet par exemple de mieux calibrer les chandelles standardschandelles standards que sont les Cépheides, ces étoiles qui sont cruciales pour calibrer la fameuse loi de Hubble-Lemaître sur laquelle repose toute la cosmologie.
Gaia, c'est également un moyen de mieux connaître la structure de la Voie lactée avec ses bras spiraux, les déformations de son plan galactique ou la présence de courants d'étoiles trahissant des effets de maréemarée arrachant des étoiles à des galaxies nainesgalaxies naines qui seraient passées trop proches de notre grande Galaxie spiraleGalaxie spirale. Bref, Gaia permet donc de faire de l'archéologie galactique pour plonger dans les stratesstrates de l'histoire de notre Voie lactée.
Dans cette édition de Space, nous partons dans les étoiles : les astronomes qui utilisent le télescope spatial européen Gaia ont élaboré un catalogue d'un milliard d'étoiles de la Voie lactée, ouvrant la voie à de nouvelles décennies de découvertes. © European Space Agency, ESA
Les distributions d'étoiles gardent en effet en mémoire des interactions passées entre elles et d'autres concentrations d'étoiles et nul doute que la collision qui est prévue dans quelques milliards d'années avec la galaxie d’Andromède en laissera aussi. On soupçonne d'ailleurs pour cette raison qu'elle s'est déjà plus ou moins produite dans le passé.
Aujourd'hui, une équipe internationale d'astronomesastronomes, dirigée par le chercheur Chervin Laporte, de l'Institut des sciences du cosmoscosmos de l'Université de Barcelone (ICCUB-IEEC), a utilisé les données de la mission spatiale Gaia pour créer une nouvelle carte du disque externe de la Voie lactée et elle est tombée sur une surprise comme elle l'explique dans un article publié dans le célèbre journal Monthly Notices of the Royal Astronomical Society et que l'on peut trouver en accès libre sur arXiv.
Des perturbations gravitationnelles dans un fluide d'étoiles
Les astronomes ont découvert l'existence dans la Voie lactée de nombreuses structures filamenteuses en rotation auparavant inconnues au bord de son disque. Il se trouve que les simulations numériquessimulations numériques prédisent la formation de telles structures filamenteuses dans le disque externe à partir d'interactions avec des satellites passés proches de notre Galaxie dans le passé. Mais la quantité de sous-structures révélée par cette carte dressée à partir des mesures disponibles depuis décembre 2020 ne résultait d'aucune des simulations précédentes.
Les astronomes ont émis deux hypothèses pour expliquer ces structures. Dans tous les cas, il s'agit des effets de perturbations gravitationnelles et des forces de maréeforces de marée exercées dans le passé entre notre Voie lactée et des galaxies naines.
Il a ainsi été avancé que ces structures sont les équivalentes des crêtes des anneaux d'une onde se propageant dans une mare dans laquelle on aurait jeté un caillou. Les étoiles dans le potentiel gravitationnel de la Galaxie se comportent en effet comme un fluide auto-gravitant et tout comme dans le cas d'un fluide, des ondes peuvent y être formées selon plusieurs modes d'excitation. On pense d'ailleurs que les bras spiraux des galaxies sont de telles ondes dites de densité dans ce fluide. Sur toutes ces questions et d'autres, on consultera avec profit les cours au Collège de France de Françoise Combes.
L'autre hypothèse proposée suggère carrément qu'il s'agit de restes de bras spiraux fossilesfossiles de la Voie lactée, bras engendrés par les forces de gravitégravité là aussi de galaxies naines passées trop près de son disque. De nos jours, la galaxie naine du Sagittaire qui contient quelques dizaines de millions d'étoiles, est actuellement en train d'être cannibalisée par notre Voie lactée et elle est donc précisément en train de perturber notre Galaxie. On spécule d'ailleurs sur sa possible quasi-collision avec la Voie lactée il y a de cela de 300 à 900 millions d’années.
Comment départager ces deux hypothèses ? Peut-être en utilisant le télescope William Herschel sur les îles Canaries afin d'étudier plus en détail les propriétés des populations stellaires dans chaque sous-structure. Un programme d'observation avec du temps sécurisé pour cet instrument a été accepté et sera mené dans un futur proche.