C’est dans un amas d’étoiles, aux confins de notre Voie lactée, que des astronomes ont observé un objet mystérieux. Trop lourd pour être une étoile à neutrons et pas assez pour être un trou noir. Qu’il s’avère être l’un ou l’autre — ou même autre chose d’encore inconnu —, la découverte n’a pas fini de faire couler de l’encre.
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Les trous noirs les plus légers ont une masse d'au moins cinq fois celle de notre Soleil. Les étoiles à neutrons les plus lourdes, elles, ne dépassent pas deux fois sa masse. Et entre les deux, il se passe quoi ? Difficile de la savoir. En effet, les astronomesastronomes n'ont, jusqu'ici, jamais observé d'objet compact de masse intermédiaire. Jusqu'ici. Parce que, grâce au radiotélescope MeerKAT (Afrique du Sud), ils viennent de mettre la main sur un objet mystérieux qui pourrait bien s'avérer être le trou noir le plus léger jamais détecté ou l'étoile à neutrons la plus lourde qu'ils connaissent. Ou pourquoi pas... autre chose ?
C'est dans notre Voie lactéeVoie lactée que les astronomes ont fait la découverte. Au cœur de l'amas globulaireamas globulaire NGCNGC 1851. Du côté de la constellationconstellation de la Colombe. À quelque 40 000 années-lumièreannées-lumière de nous. Un système de deux objets qui tournent l'un autour de l'autre en sept jours, en réalité. Deux objets séparés de seulement 8 millions de kilomètres.
Un pulsar et une étoile à neutrons ou un trou noir autour de lui
Mais l'un des deux objets a été formellement identifié par les chercheurs. Une étoile à neutrons dotée d'un puissant champ magnétiquechamp magnétique et qui tourne très rapidement autour d'elle-même. PSR J0514-4002E, comme les astronomes l'appellent, nous envoie ainsi plus de 170 impulsions radio par seconde. Une véritable horloge cosmique ultraprécise.
Ce sont les infimes différences de fréquencefréquence de ce pulsar -- des différences dues à son mouvementmouvement orbital -- que les chercheurs ont utilisées pour caractériser son compagnon. La piste de la simple étoile a rapidement été éliminée. « Il n'apparait rien sur les images renvoyées par le télescope spatial Hubbletélescope spatial Hubble », remarque Prajwal Voraganti Padmanabh, chercheur à l'Institut Max-PlanckPlanck de physiquephysique gravitationnelle (Allemagne), dans un communiqué ; et le signal du pulsarpulsar reçu par le radiotélescope n'est pas non plus marqué par un ventvent stellaire.
Comment cet objet mystérieux a-t-il pu voir le jour ?
Tout indique donc que l'objet mystérieux est le reste extrêmement dense d'une étoile effondrée. Un trou noir ou une étoile à neutrons. Mais les calculs des astronomes concluent à une masse, pour l'objet mystère, comprise entre 2,09 et 2,71 masses solaires. Pile entre l'étoile à neutrons et le trou noir. « S'il s'agit d'un trou noir, ce sera le premier système pulsar-trou noir connu. Un Graal ! S'il s'agit d'une étoile à neutrons, cela aura des implications fondamentales pour notre compréhension de l'état inconnu de la matièrematière à ces densités incroyables », commente Paulo Freire de l'Institut Max-Planck de radioastronomie.
Dans la revue Science, les chercheurs avancent leur théorie quant à la manière dont cet étonnant système a pu se former. Selon eux, l'environnement dense en étoiles anciennes de l'amas globulaire NGC 1851 n'y est pas étranger. Il permet en effet les interactions et les collisions entre étoiles et même entre objets denses.
Les astronomes imaginent ainsi d'abord une étoile à neutrons qui aspire de la matière d'une étoile compagne. Ce faisant, sa rotation s'accélère, donnant naissance à un pulsar -- de type PSR J0514-4002E -- accompagné d'une naine blanchenaine blanche. La configuration est banale dans la Voie lactée. Les chercheurs expliquent ensuite que deux étoiles à neutrons ont pu entrer en collision un peu plus loin et fusionner pour former soit un trou noir de faible masse, soit une nouvelle étoile à neutrons supermassive. Cet objet-là -- notre objet mystère -- a finalement dû rencontrer le duo pulsar/naine blanche. Une rencontre au cours de laquelle la naine blanche a sans doute été expulsée de l'orbiteorbite. Ne laissant plus que le système observé aujourd'hui par les astronomes.
« Découvrir la véritable nature du compagnon de PSR J0514-4002E marquera un tournant dans notre compréhension des étoiles à neutrons, des trous noirs et de tout ce qui pourrait se cacher dans l'intervalle, s'enthousiasme Arunima Dutta, chercheur à l'Institut Max-Planck de radioastronomie. Nous n'en avons pas fini avec ce système ».