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On trouve encore plusieurs erreurs assez répandues dans l'esprit du Grand Public au sujet de la cosmologie. Le Big Bang par exemple n'est pas une explosion à strictement parler du point de vue de la physique. Surtout, pour autant que nous le sachions, il ne s'est pas produit dans un espace et un temps déjà existant mais coïncide, si l'on peut dire, avec la naissance de l'espace et du temps. On peut, et les cosmologistes modernes ne s'en sont pas privés, considérer tout de même des modèles d'avant Big Bang où ce que nous appelons notre univers observable n'était effectivement qu'une partie d'une région particulièrement dense dans un espace-temps peut-être éternel et infini qui serait entrée, pour une raison inconnue, en expansion.
Mais que veut-on dire exactement là aussi par univers observable ? Les dernières observations et mesures en cosmologie, notamment celles de la mission Planckmission Planck, nous indiquent que l'univers serait âgé d'environ 13,8 milliards d'années. Comme on le sait, il existe une vitesse limite pour la propagation d'un signal dans le cosmoscosmos dont la valeur est celle de la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière. On pourrait naïvement en conclure que le rayon de notre univers est aujourd'hui de 13,8 milliards d'années-lumièreannées-lumière. Comme les cosmologistes le savent bien depuis des décennies, c'est totalement faux !
Rien ne fixe en effet la vitesse d'expansion de l'espace en relativité généralerelativité générale, la théorie de la gravitation d’Einstein. Pour prendre une analogieanalogie, si l'espace est un tissu élastique sur lequel se déplacent des insectesinsectes, ce serait un tissu exotiqueexotique qui peut s'étirer ou se contracter à des vitesses arbitraires, mais où le son et les insectes ne peuvent pas se déplacer plus vite qu'une certaine vitesse limite.
Dans le cas de notre univers, il en découle par exemple que les régions d'où sont parties les photonsphotons du rayonnement fossilerayonnement fossile 380.000 ans environ après l'hypothétique temps zéro, et qui forment une surface dont l'observateur est le centre quelle que soit la taille réelle de l'univers, se trouvent en fait aujourd'hui à une distance d'un peu plus de 45 milliards d'années-lumière du fait de l'expansion de l'univers observable. Ce nombre peut varier en fonction des caractéristiques du modèle cosmologique employé pour décrire le cosmos, c'est-à-dire notamment son contenu précis en matièrematière, qu'elle soit baryonique ou noire, la valeur de la constante cosmologiqueconstante cosmologique ou encore la topologie de l'espace.
Un fabuleux voyage à travers l'univers observable, de la Terre jusqu'à la sphère de dernière diffusion dont nous parviennent aujourd'hui les plus vieux photons de l'univers. Toutes les distances sont à l'échelle et les objets sont représentés avec le plus d'exactitude possible. © Digital Universe, American Museum of Natural History/Youtube. Musique : Suke Cerulo
Un univers visible plus petit de 0,7 %
Ce que l'on appelle l'horizon cosmologiquehorizon cosmologique n'est donc pas lié directement au rayon géométrique de l'univers, comme le serait le rayon d'une sphère ou ceux associés à un tore, mais correspond à la limite du volumevolume d'espace d'où l'on peut recevoir du rayonnement, où plus précisément un signal (par exemple des ondes gravitationnellesondes gravitationnelles, se déplaçant à la vitesse de la lumière). La taille de l'horizon cosmologique évolue avec le temps et ce n'est pas difficile de le comprendre si on prend pour analogie la taille d'une région sur Terre d'où un marcheur peut nous rejoindre en fonction du temps qui passe.
L'horizon cosmologique ne doit pas être confondu avec l'horizon des événementshorizon des événements qui, dans un modèle cosmologique donné, correspond à la limite d'une région de l'espace pour un observateur au-delà de laquelle, de toute éternité, aucun signal ne pourra jamais lui provenir.
Toujours est-il que le célèbre site de vulgarisation scientifique IFLScience vient de mettre en ligne un curieux article au sujet de l'horizon cosmologique. Il fait état d'une déclaration faite initialement par le physicienphysicien états-unien Paul Halpern qui semble, a priori, quelqu'un de crédible. Sauf que le chercheur fait état d'un article qu'il a écrit avec un certain Nick Tomasello, probablement un de ses étudiants à l'University of the Sciences à Philadelphie. Leur travail est publié dans un périodique nommé Advances in Astrophysics dont il est clair qu'il ne fait pas partie des revues réputées, ne serait-ce que parce qu'il n'en est encore qu'à son deuxième numéro et aussi parce qu'on y trouve des publications de personnes que l'on a la tentation de qualifier de « crackpot » dans le langage des Anglo-saxons, c'est-à-dire des scientifiques qui, dans le meilleur des cas, ont « pété un câble ». On a l'impression que l'on est typiquement confronté au cas d'un auteur dont le papier a été refusé par tous les journaux sérieux et qui se rabat sur une voie de publication douteuse.
Donnons-lui quand même le bénéfice du doute car il ne s'agit après tout que d'un calcul bien innocent, genre exercice facile pour étudiant en master dont la publication ne pouvait probablement pas se justifier dans des revues de haut niveau.
En utilisant les données de WMAP, le précurseur de Planck, les cosmologistes étaient arrivés à calculer une valeur de 45,66 milliards d'années-lumière, non pas exactement pour le rayon de l'horizon cosmologique mais pour la distance nous séparant aujourd'hui des régions où a été émis le rayonnement fossile. Tout comme la surface du SoleilSoleil nous empêche de voir son intérieur, le plasma dans l'univers de l'époque nous empêche de voir jusqu'aux limites de l'horizon cosmologique qui est à plus de 46 milliards d'années-lumière. Selon Halpern et Tomasello, en se basant sur des calculs utilisant les données de Planck, le rayon de l'univers observable avec des photons est plus petit d'environ 320 millions d'années-lumière soit 45,34 milliards d'années-lumière.
En théorie, seules les ondes gravitationnelles nous permettent de sonder les limites de l'horizon cosmologique.