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Maquette grandeur nature du vaisseau Kliper lors de sa présentation officielle à Moscou
Lors d'une récente interview, Anatoli Perminov s'est d'abord félicité de la volonté de son pays à entreprendre des missions d'importance en direction de la Lune et de Mars, avant de souligner le fait que la Russie avait reçu des propositions des Etats-Unis, d'Europe, d'Inde, de Chine, dans le cadre d'une coopération internationale dans le domaine de l'exploration planétaire. Puis il a ajouté : "Si nous prenons la décision d'explorer d'autres planètes, nous ne le ferons que d'égal à égal et dans le cadre d'un partenariat international global
".
Le Dr Karash fait remarquer que Perminov semble ne pas tenir compte d'une déclaration, faite quelques jours auparavant par Michael Griffin, directeur de la Nasa, qui affirmait que toute coopération internationale dans le programme lunaire américain ne concernerait strictement que la surface de la Lune, et qu'elle ne prévoyait que la participation à la constructionconstruction de l'infrastructure d'une base lunaire américaine, à l'exclusion de tous les éléments principaux du vol vers notre satellite, qui devront être réalisés sous l'unique responsabilité et maîtrise d'œuvre des Etats-Unis.
Si on ajoute à cela que les Américains ont l'intention d'abandonner définitivement la Station Spatiale Internationale vers 2015-2017, après avoir entre-temps mis en service le CEV (Crew Exploration VehicleCrew Exploration Vehicle) destiné à remplacer les navettes, on comprend aisément qu'ils n'auront plus aucune utilité des vaisseaux SoyouzSoyouz. Et du coup, cette déclaration prend une signification toute différente.
En effet, l'ensemble de la coopération technologique entre les USA et la Russie repose actuellement sur la double composante des lanceurs (Soyouz, Proton), et surtout des vaisseaux Soyouz pour la desserte de l'ISS, dont ils financent presque totalement la construction. Cette double collaboration menacée, comment interpréter la déclaration de Perminov affirmant qu'une coopération ne pourra s'effectuer que "d'égal à égal et dans le cadre d'un partenariat international global
", et n'est-elle pas plutôt destinée à mettre une croix sur tout projet d'avenir, considérant que les développements futurs sont subordonnés à des conditions irréalisables ?
Ou alors, autre hypothèse, Anatoli Perminov ne ferait-il pas un appel du pied aux partenaires non-américains, dont tous, sans exception, ont tout intérêt à ce que ne disparaisse pas l'astronautiqueastronautique russe, et l'important réservoir de savoir-faire et d'expérience qu'elle a accumulé en un demi-siècle de vols habitésvols habités ?
L'Europe en particulier, privée de CEV pour la même raison de non participation au programme américain, privée de Soyouz par des Russes n'ayant plus les moyens financiers d'en construire sans aide extérieure, répondra-t-elle à cet appel, ou préférera-t-elle abandonner la suprématie totale de l'espace habité aux Etats-Unis ? Certes, on ne peut dénigrer l'avantage des missions automatiques dans la recherche spatiale et l'exploration du Système solaireSystème solaire. Mais est-il raisonnable, ou même concevable, de se priver complètement de la possibilité d'envoyer des hommes en orbiteorbite ? Car tous les vols habités sont actuellement subordonnés à la politique spatiale américaine, directement ou indirectement, ce que l'on peut considérer comme un quasi-monopole de fait.
On peut rêver d'une nouvelle concertation entre les agences spatiale européenneagences spatiale européenne et russe et d'une reprise de la collaboration pour la conception et la mise au point du vaisseau KliperKliper, coopération actuellement au point mort. Est-ce un rêve ? Le futur de l'Europe de l'Espace est peut-être à ce prix.