Le 15 janvier 2006, la sonde Stardust de la NASA atterrissait dans le désert de l'Utah après avoir passé sept années dans le Système solaire, recueillant des échantillons de poussières interstellaires et surtout, le 2 janvier 2004, en collectant de la matière dans la queue de la comète Wild 2.

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Stardust lors de sa construction. En haut, la capsule de retour d'échantillons. Nasa/JPL.

Stardust lors de sa construction. En haut, la capsule de retour d'échantillons. Nasa/JPL.

Les grains de matière étaient emprisonnés dans un aérogel spécialement conçu pour la mission, qui devait les capturer et les maintenir isolés de toute contamination jusqu'à leur récupération au sol. Cet aérogel forme une mosaïque de petits parallélépipèdes de quelques centimètres de côté, contenus dans une "grille" en forme de raquette de tennis, exposée successivement sur ses deux faces au vide spatial afin de mieux différencier la provenance des échantillons récoltés. Tous ces dispositifs ont parfaitement fonctionné, et les échantillons ont ensuite été distribués au compte-gouttes dans 50 laboratoires répartis dans le monde entier. Aujourd'hui, c'est l'heure des premiers résultats.

Raquette d'aérogel (avant remplissage). Nasa/JPL/Johnson Space Center.

Raquette d'aérogel (avant remplissage). Nasa/JPL/Johnson Space Center.

La première analyse, effectuée au laboratoire de conservation d'échantillons planétaires situé au centre spatial Johnson à Houston, a révélé plus de mille grains de taille supérieure à 5 µm, dont le recensement et l'examen se poursuivent toujours.

Scannage de l'aérogel après récupération. Nasa/JPL/Johnson Space Center.

Scannage de l'aérogel après récupération. Nasa/JPL/Johnson Space Center.

Lorsqu'un de ces grains heurte l'aérogel à la vitesse de la sonde, c'est-à-dire 6 km/seconde, il y creuse un petit cratère dont le diamètre est proportionnel à sa taille. Leur examen a révélé une prédominance importante de grains de diamètre inférieur à 3 microns, ainsi que la présence au fond de ces cratères de résidus minéralogiques intéressants. Quelquefois, ces cratères sont regroupés en amas.

Examen d'un bloc d'aérogel au microscope après récupération au centre spatial Johnson.

Examen d'un bloc d'aérogel au microscope après récupération au centre spatial Johnson.

Une étude minéralogique des grains démontre qu'une partie a été endommagée par l'échauffement produit au moment de l'impact avec l'aérogel. Cependant, les grains demeurés intacts présentent une structure cristalline bien nette, composée de silicates (olivine, pyroxène), de spinelles d'aluminium et de sulfures. L'examen de leur microstructure démontre qu'ils ont été portés à très haute température, et leur composition minéralogique suggère un important brassage au sein de la matière primitive formant le disque d'accrétion protoplanétaire avec échanges entre les zones internes et externes du Système solaire en gestation.

Deux grains plus importants en provenance de l'environnement de Wild 2 ont été examinés par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier et spectroscopie Raman. Un des objectifs est de différencier le carbone minéral du carbone organique, tout en détectant les principales familles de molécules organiques (linéaire, cyclique, ramifiée...). Les résultats préliminaires confirment la nature primitive de la matière organique de la comète dont la composition est proche de la poussière interstellaire. Quelques contaminants issus de l'aérogel ont toutefois été détectés par spectroscopie et cette donnée devra être intégrée lors des analyses ultérieures.

Altération et analyse isotopique

L'analyse des traces d'oxygène et d'hydrogène laissées le long de la pénétration dans l'aérogel montre une altération progressive des grains durant leur capture.

Trace laissée par un grain de poussière cométaire lors de la pénétration dans l'aérogel. Nasa/JPL/Johnson Space Center.

Trace laissée par un grain de poussière cométaire lors de la pénétration dans l'aérogel. Nasa/JPL/Johnson Space Center.

Aussi, des fragments sub-micrométriques ont-ils été prélevés autour du point d'entrée afin d'en déterminer la composition isotopique en carbone et en azote. Celle-ci révèle une composition de type "solaire", semblable aux météorites de type chondrite carbonée, comprenant quelques rares composés volatils rappelant le milieu interstellaire.

De plus, la présence à ce niveau de traces d'hélium et de néon de composition isotopique intermédiaire entre les compositions terrestre et solaire démontre que des éléments volatils ont survécu à la capture des grains cométaires.

Une autre étude menée par Kevin McKeegan de l'université de Californie à Los Angeles, a porté sur 11 échantillons. Une particule, en particulier, était une gemme.

Le matériel en provenance de notre système solaire se caractérise par une valeur isotopique des atomes d'oxygène bien particulière. Ceux-ci peuvent être de trois masses différentes, selon le nombre de neutrons formant le noyau. Or un des échantillons cométaires renferme un taux d'isotope lourd de l'oxygène plus important de 150% que ce qui est rencontré dans le voisinage du Soleil.

"Cela nous démontre qu'il ne vient pas d'ici", déclare Frank Stadermann, chercheur de l'Université de Washington. "Il s'avère qu'il s'agit bien de la seule particule parmi tous les échantillons de Stardust analysés jusqu'ici dont la formation remonte avant celle du Système solaire".

"L'examen préliminaire des échantillons cométaires ne représente que la première étape et nous continuerons à les étudier durant les années à venir", déclare Christine Floss, aussi de l'Université de Washington. "Il y a encore tant de questions au sujet du Système solaire dont les réponses sont encore enfuies au sein de ces minuscules grains de poussière", conclut-elle.