Non seulement l'énergie sombre existe réellement, mais elle alimente l'Univers depuis ses premiers instants et provoque son expansion accélérée, selon Adam Riess, professeur d'astronomie à l'Université John Hopkins et chercheur à l'institut scientifique du Télescope spatial Hubble.

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L'énergie sombre, aussi appelée l'énergie du vide, c'était un peu l'arlésienne des astronomes. Cette idée ne datait pas d'hier, puisqu'elle avait été émise d'abord par Albert Einstein sous la forme d'une force de répulsion pour expliquer pourquoi l'univers ne s'effondrait pas sur lui-même sous sa propre force d'attraction gravitationnelle. Puis en 1929, Edwin Hubble, l'astronome dont le Télescope spatial a hérité du nom, a démontré l'expansion de l'univers. Du coup, Einstein a abandonné le concept d'énergie sombre, à tout jamais semblait-il.

Mais en 1998, celui-ci refaisait surface avec une étude consistant à utiliser des explosions de supernovas pour mesurer l'expansion de l'Univers. La physique de ces phénomènes est aujourd'hui bien connue, et leur constance dans les niveaux d'énergie produite permet d'en quantifier avec beaucoup de précision distance et vitesse de récession. Exactement comme si l'on disposait de phares éloignés ou mieux, de sondes aux frontières du cosmos.

Une supernova peut briller comme des dizaines de milliards de soleils, c'est à dire plus que la galaxie qui l'abrite. Source NASA / Lick Observatory

Une supernova peut briller comme des dizaines de milliards de soleils, c'est à dire plus que la galaxie qui l'abrite. Source NASA / Lick Observatory

Et justement, c'est en étudiant au moyen du télescope spatial 23 supernovas situées à une distance de 13,7 milliards d'années que l'équipe dirigée par Riess a effectué une observation surprenante. Ces supernovas, les plus éloignées de la Terre connues à ce jour, mais aussi les plus "jeunes" puisque la lumière permettant leur observation a été émise peu de temps après la naissance de l'Univers, sont animées d'une vitesse de récession bien moindre que leurs consoeurs plus rapprochées, donc plus anciennes. D'où la conclusion qui s'impose: la célérité des supernovas anciennes étant plus élevée que celle des supernovas jeunes, les étoiles qui leur ont donné naissance accélèrent au cours du temps ! Et retour à la case départ, c'est-à-dire à l'idée d'Albert Einstein et de sa force de répulsion, autrement dit dans notre langage moderne, l'énergie sombre.

Mais surtout, cette observation tend à infirmer une des hypothèses émises jusqu'ici, qui postulait que l'énergie sombre n'était peut-être pas contemporaine de la naissance de l'Univers, mais serait progressivement apparue au cours de son évolution. Grâce à Riess et son équipe, il apparaît clairement qu'au contraire, la force de répulsion qui tend à accélérer l'expansion de l'Univers était déjà présente lorsque les supernovas observées ont explosé, soit une époque pratiquement contemporaine de sa genèse.

Reste à découvrir la nature de cette force mystérieuse, qui est loin d'être anecdotique puisqu'elle représente environ 70% (peut-être plus) de la masse de l'univers. Deux hypothèses semblent actuellement en concurrence, celle qui ferait de cette force une propriété de l'Espace, hypothèse d'Einstein, ou alors une sorte de champ électromagnétique de nature encore inconnue. A moins qu'il ne s'agisse tout simplement d'une caractéristique encore ignorée d'une des lois les plus importantes de notre Univers, la force de gravitation.

La supernova de 1054 dite 'du Crabe' du nom de la constellation où elle se situe, plus brillante que Vénus malgré une distance de 7000 années-lumière. Source : ESO

La supernova de 1054 dite 'du Crabe' du nom de la constellation où elle se situe, plus brillante que Vénus malgré une distance de 7000 années-lumière. Source : ESO