Le spectromètre OMEGA (IR Mineralogical Mapping Spectrometer), fonctionnant dans le visible et le proche infrarouge, a analysé la minéralogie de la surface de Mars et a livré des informations capitales sur le cycle de l'eau, la couleur et l'histoire de la planète rouge. D'après les dernières analyses, l'eau y aurait été présente en abondance pendant cent millions d'années.
Les missions futures sur Mars viseront des zones riches en argile C'est là que les scientifiques ont le plus de chance de trouver des reliques d'une ancienne vie martienne

Les missions futures sur Mars viseront des zones riches en argile C'est là que les scientifiques ont le plus de chance de trouver des reliques d'une ancienne vie martienne

L'eau a-t-elle joué un rôle dans la coloration rouge de Mars ?<br />Contre toute attente, la réponse est non <br />(Crédits :ESA)

L'eau a-t-elle joué un rôle dans la coloration rouge de Mars ?
Contre toute attente, la réponse est non
(Crédits :ESA)

Mars n'est pas "rouillée"

On savait déjà qu'une grande partie du sol de Mars était oxydée, et que ses oxydes ferriques étaient la cause de sa couleur caractéristique. Le spectromètre OMEGA, qui a permis d'obtenir des images de Mars dans 352 longueurs d'ondes différentes et de dresser ainsi des cartes spectrales de la planète rouge, a permis d'aller encore plus loin, en montrant que ces minéraux ne sont pas hydratés.

Par conséquent, contrairement à ce que l'on pensait jusqu'alors, l'eau liquide n'a joué aucun rôle dans le processus de coloration de Mars.

De l'eau en grande quantité dans le passé de Mars

Nous savons à présent que, très tôt dans son histoire, l'eau était présente en abondance sur Mars. En effet, l'instrument OMEGA a permis d'identifier à la surface deux sortes de minéraux hydratés :

Les premières conclusions concernant ces deux classes de minéraux sont édifiantes ; en effet, ils ont été formés par deux processus distincts, dans deux environnements climatiques différents, et à deux périodes disjointes de l'histoire martienne.

La présence de sulfates avait déjà été détectée par Opportunity (NASA/ROVER). Le spectromètre OMEGA l'a confirmée, en trouvant de nombreux dépôts de sulfates à la surface, notamment :

  • Sur le site d'atterrissage d'Opportunity : Terra Meridiani ;
  • Dans la vallée Marineris ;
  • Au niveau des dunes du Pôle Nord martien.

OMEGA a detecté dans la vallée Marineris de nombreux dépôts de sulfates <br />(Crédits : HRSC & OMEGA)

OMEGA a detecté dans la vallée Marineris de nombreux dépôts de sulfates
(Crédits : HRSC & OMEGA)

Quant aux argiles de type phyllosilicates, ils constituent l'une des découvertes majeures du spectromètre OMEGA. En effet, ces minéraux se forment lorsque des roches basaltiques sont plongées dans l'eau pendant une longue période, et sont à l'heure actuelle le meilleur indice de la présence d'eau en abondance dans le passé de Mars.

De plus, OMEGA a détecté ces phyllosilicates un peu partout sur la planète, dans des régions très anciennes remontant à la fin du Noachien (ère antérieure à 3.8 milliards d'années). Ainsi, cette découverte fondamentale tendrait à prouver qu'à cette période, des conditions comparables à celles de la Terre existaient sur Mars.

Ces résultats passionnants appellent des conclusions non moins passionnantes :

  • Les sulfates se seraient formés bien après les phyllosilicates, suite à la disparition du champ magnétique martien et à un important changement climatique, faisant passer la planète rouge d'humide à acide ;
  • Les terrains riches en argile de type phyllosilicates qui, contrairement à toute attente, ne sont pas situés dans les canaux mais à leur périphérie, auraient été les plus propices à l'émergence de la vie sur Mars ;
  • Ces minéraux argileux pourraient encore receler des fossiles ou des reliquats d'une hypothétique vie martienne.

Sites riches en argile de Marwth Vallis<br /> Etonamment, ces minéraux hydratés ne se trouvent pas dans les canaux, mais à leur périphérie<br /> (Crédits : HRSC,ESA)

Sites riches en argile de Marwth Vallis
Etonamment, ces minéraux hydratés ne se trouvent pas dans les canaux, mais à leur périphérie
(Crédits : HRSC,ESA)

Une chronique de l'eau martienne en deux actes

A partir de ces résultats, les scientifiques ont écrit une chronique de l'eau martienne en deux actes :

  • Juste après la formation de la planète, il y a quatre milliards et demi d'années, le bombardement cosmique est intense et l'atmosphère riche en gaz carbonique. Un effet de serre important et une pression atmosphérique élevée permettent à l'eau d'être présente en abondance à l'état liquide. C'est de cette époque que datent les phyllosilicates détectés par le spectromètre à la surface de Mars.
  • Ensuite, le champ magnétique de Mars tombe et l'effet de serre disparaît. L'eau abondante sur Mars se change en glace. Il y a 3.8 milliards d'années, une activité tectonique importante se manifeste, et les volcans éjectent de grandes quantités de soufre dans l'atmosphère. C'est à cette période que se sont formés les sulfates observés par Opportunity et OMEGA.

Lors de la conférence du 30 Novembre au siège de l'ESA, les scientifiques étaient d'accord sur les objectifs des missions futures sur Mars : se poser à proximité des terrains argileux, à la périphérie des canaux (Rover a oeuvré à plus de 1000 mètres de tout lieu argileux !), et y rechercher des fossiles ou une quelconque trace de vie martienne. L'aventure continue...