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Les propriétaires du restaurant voulaient simplement agrandir leur domaine. Mais comme la bâtisse, située dans le cœur historique de Canterbury, date du seizième siècle, il a fallu procéder à quelques fouilles préalables pour vérifier si des objets intéressant l'historienhistorien ne se trouvaient pas enfouis. Andrew Linklater, du Canterbury Archaeological Trust, s'est attelé à la tâche et a exhumé une multitudes de débris, essentiellement de poteries, qui l'ont persuadé de la nature de la trouvaille : un dépôt de détritus et de vaisselle cassée. La date a pu être située dans une fourchette : entre 1375 et 1425.
Au milieu de ces objets sans autre valeur qu'archéologique, Linklater a trouvé une curieuse plaque de cuivre gravée, de la forme d'un quart de cercle. Pour en déterminer la nature, il l'a apportée au British Museum, où les spécialistes ont, explique-t-il, levé les bras au ciel en criant « Oh ». L'objet a tout de suite été identifié et il est extrêmement rare : c'est d'abord un astrolabe, c'est-à-dire un instrument servant, comme un sextantsextant, à mesurer la hauteur du soleil afin de déterminer l'heure ou la latitudelatitude. Mails il s'agit plus précisément d'un astrolabe quadrant, c'est-à-dire d'un modèle portable, suffisamment petit pour être glissé dans une poche.
L'inventeur de ce quart d'astrolabe (un tel instrument doit en principe être circulaire) est Jacob ibn Tibbon, également connu sous le nom de Profeit Tibbon ou Prophace le Juif (en latin, Profatius Judeus), qui l'aurait mis au point en 1288. L'exemplaire de Canterbury n'est jamais que le huitième astrolabe quadrant découvert dans le monde.
Un quart de cercle, des graduations, deux trous (non visibles sur la photographiephotographie) : c'est un astrolabe quadrant, instrument hi-tech au Moyen Age servant à connaître l'heure ou la latitude. © Canterbury Archaeological Trust Ltd
Pointe de la technologie
Pour en savoir plus, les Britanniques ont confié leur trésor à Elly Dekker, une spécialiste danoise des instruments astronomiques médiévaux. Cette historienne a daté l'instrument à l'année près et affirme qu'il a été construit en 1388. L'instrument porteporte des lignes courbes gravées et deux trous à travers lesquels l'utilisateur visait le soleil. Un fil à plomb accroché à l'appareil indiquait la verticale. Pour qui maniemanie bien cet instrument, il peut servir à connaître l'heure mais aussi à déterminer les heures de lever et de coucher du soleil. A l'inverse, en connaissant l'heure solaire, on peut mesurer la latitude du lieu où l'on se trouve.
A l'époque où il a été construit, ce GPSGPS médiéval valait une fortune. On sait que ces modèle portables servaient notamment aux pèlerins durant leur voyage. Or, justement, le bâtiment où a été découvert celui-ci se trouve sur un chemin de pèlerinage partant de Canterbury. Mais que faisait donc cet instrument hors de prix dans les poubelles ? Les objets de ce genre ne sont presque jamais exhumés du sol. Ils ont le plus souvent été pieusement conservés par une longue succession de personnes et « on les retrouve généralement dans des greniers ou des collections privées » souligne Elly Decker. L'objet conservera sans doute son mystère...
Mais si cet astrolabe quadrant vous intéresse, sachez qu'il sera bientôt mis en vente. Comptez entre 90 000 et 150 000 euros. On peut plus modestement se rendre dans le restaurant de Canterbury, ou plus exactement dans l'extension, maintenant terminée et baptisée Quadrant Bar...