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Quelques années après la publication par Albert EinsteinEinstein de sa théorie de la relativité générale en 1915, deux physiciensphysiciens autrichiens, Josef Lense et Hans Thirring, en découvrent une implication curieuse mais logique : la rotation d'un objet génère un effet particulier sur l'espace-temps qui l'environne. En effet, d'après le principe d'équivalence à la base de la théorie d'Einstein, il n'est pas possible de savoir localement si l'on est au repos dans un champ de gravitation ou bien dans un référentiel accéléré, par exemple à l'intérieur d'une fuséefusée.
Localement toujours, on ne devrait pas, d'une certaine façon, distinguer l'accélération que subit un objet sur un disque en rotation et celle générée sur cet objet par un corps en rotation (sans le disque) dans un référentiel au repos autour de ce corps. Tout se passe donc comme si l'espace et ce référentiel étaient entraînés dans un mouvement de rotation, à l'instar de l'effet d'un tourbillontourbillon dans l'eau. Il en résulte en particulier qu'un gyroscopegyroscope en orbite autour de la Terre subira des modifications de la direction de son axe initialement pointé vers une étoileétoile, comme s'il était dans un référentiel en rotation. Connu sous le nom d'effet Lense-Thirringeffet Lense-Thirring, ce phénomène a finalement été mis en évidence grâce à l'expérience à bord du satellite Gravity Probe B en 2011.
XMM-Newton (XMM est l'abréviation de X-ray Multi-Mirror) est un observatoire spatial de l'Esa destiné à l'observation des rayons X. En orbite depuis 1999, il permet l'étude de la formation des étoiles, des amas de galaxies et des processus liés à la présence des trous noirs supermassifs au cœur des galaxies dans le domaine des rayons X à basses énergies. © Esa
Pourquoi l'émission de rayons X par certains trous noirs oscille-t-elle ?
Depuis le début des années 1990, les astrophysiciensastrophysiciens suspectaient que cet effet était peut-être la clé d'une énigme, celle de curieuses variations presque périodiques des émissionsémissions X de certains trous noirstrous noirs, découvertes au début des années 1980. Cete hypothèse semble accréditée par une récente publication sur arXiv de chercheurs qui ont utilisé les observatoires X en orbite, les satellites XMM NewtonNewton de l'Esa et Nustar de la NasaNasa.
À l'aide de ces deux instruments, ils ont observé un trou noir stellaire de notre Voie lactéeVoie lactée, H1743-322. Il fait partie d'un système binairesystème binaire situé à environ 28.000 années-lumièreannées-lumière du SoleilSoleil près du centre de notre GalaxieGalaxie. Ce trou noir est entouré d'un disque d'accrétiondisque d'accrétion constitué par la matièrematière qu'il arrache à son étoile compagne par sa force de gravitégravité. H1743-322 présente, depuis des années, des variations presque périodiques de ses émissions X, ou QPO (Quasi Periodic Oscillations)).
Parmi les hypothèses avancées pour expliquer ces QPO, l'une fait intervenir un effet Lense-Thirring particulièrement fort généré par le trou noir en rotation sur son disque d'accrétion. Sa partie la plus proche de l'horizon des événementshorizon des événements se mettrait à effectuer des mouvements de précessionsprécessions. Il en résulterait ces fluctuations transitoires et presque périodiques des émissions du plasma chaud de cette région, porté à plusieurs millions de degrés, observées sous forme de QPO.
Une vue d'artiste du disque d'accrétion autour du trou noir H1743-322. La partie centrale est constituée de plasma et elle effectue un mouvement de précession, ce qui la conduit à illuminer tel un phare les parties externes du disque d'accrétion. Le rayonnement du plasma, dans le domaine des rayons X, provoque une sorte de fluorescence des ions de fer présents dans ces parties externes du disque. © Esa, ATG Medialab
Un nouveau laboratoire pour tester les théories de la gravitation
Mais comment en être sûr ? L'astrophysicien Adam Ingram a eu l'idée avec ses collègues de mesurer une raie émise dans le domaine des rayons Xrayons X par des atomesatomes de ferfer ionisés présents dans la partie externe du disque. Cette raie est décalée périodiquement vers le rouge et vers le bleu par la rotation des ionsions autour du trou noir. Mais si la partie interne du disque effectue un mouvement de précession, elle doit s'élever partiellement au-dessus du disque et éclairer périodiquement chacune de ses parties. Cela conduit à des modifications supplémentaires de l'aspect de la raie d'émission des atomes de fer.
En utilisant 260.000 secondes de mesures avec XMM-NewtonXMM-Newton et 70.000 avec Nustar, les astrophysiciens ont mis en évidence des variations en bon accord avec les prédictions du modèle expliquant les QPO par l'effet Lense-Thrring. Celui-ci est 100.000 milliards de fois plus intense que celui observé autour de la Terre.
Il s'agit bien sûr d'un succès en soi mais l'important n'est peut-être pas là. On dispose maintenant en effet d'une fenêtrefenêtre observationnelle nouvelle permettant de tester les caractéristiques d'un champ de gravitation fort car proche de l'horizon d'un trou noir stellairetrou noir stellaire. Certaines théories relativistes de la gravitation proposées comme alternatives à celle d'Einstein font des prédictions peut-être testables dans l'environnement d'un trou noir. Les QPO de H1743-322 pourraient donc se révéler un outil précieux pour découvrir une nouvelle physiquephysique, notamment en rapport avec l'énergie noire.