Encore totalement inconnue du grand public en début de semaine, la chercheuse états-unienne Katie Bouman est devenue une vedette mondiale après la publication le 10 avril de la première image d'un trou noir. Sa contribution était importante, mais comme elle l'explique elle-même, elle n'est pas à l'origine d'un unique algorithme derrière le succès de l'Event Horizon Telescope, succès qui est avant tout un travail d'équipe de plus de 200 personnes dont environ 40 femmes.
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Triste emballement médiatique autour de la brillante Katie Bouman, actuellement en postdoctorat à la prestigieuse université de Harvard, et qui sera bientôt Professeure assistante au non moins prestigieux California Institute of Technology, l'alma mater du prix Nobel de physique Kip Thorne.
Ingénieure en génie électrique, elle s'est ensuite tournée vers l'informatiquevers l'informatique et l'apprentissage profondapprentissage profond révolutionné par les lauréats du Prix Turing 2019. Elle a été propulsée sur le devant de la scène médiatique par une photographiephotographie montrant son émotion au moment où l'un des superordinateurssuperordinateurs utilisés par les membres de la collaboration de l'Event Horizon Telescope (EHT) a livré la première image d’un trou noir supermassif, à savoir M87*M87* dans la galaxie M87.
Ses compétences remarquables dans les techniques informatiques de traitement des images l'avaient en effet conduit à intégrer il y a quelques années la collaboration EHT. En 2016, donc avant la prise de donnée en 2017 à l'origine de l'image de M87*, elle avait expliqué son travail dans une conférence TED, comme un exemple des algorithmes en cours d'élaboration pour traiter les énormes masses de données qui étaient attendues.
Si énormes, quatre pétaoctets, qu'il était plus rapide de les transmettre physiquement à l'aide de très nombreux disques dursdisques durs en provenance des huit radiotélescopes sur le Globe utilisés pour réaliser cet exploit. Ce fut fait via Fedex vers l'observatoire Haystack, dans le Massachusetts (USA), et vers l'Institut Max PlanckMax Planck de radioastronomie, en Allemagne.
Conférence TED où Katie Bouman explique une stratégie pour réaliser la première image d’un trou noir. © TED
Le talent incroyable d’une équipe de scientifiques du monde entier
Malheureusement les médias en ont fait la superstar à l'origine d'un unique algorithme utilisé pour traiter les données de l'EHT, ce qui a déchaîné des propos sexistes et misogynes sur les réseaux sociauxréseaux sociaux. Certains l'accusaient d'avoir voulu tirer la couverture à elle toute seule alors que l'essentiel du programme soi-disant utilisé proviendrait d'un de ses collègues dans la collaboration EHT, Andrew Chael, qui aurait écrit à l'occasion un programme de 850.000 lignes de code.
Katie Bouman n'étant absolument pas responsable de cette méprise (l'algorithme baptisé Chirp sur lequel elle travaillait en 2016 n'ayant finalement pas été utilisé comme l'explique un article du New York Times), elle a tenu à remettre les pendules à l'heure sur son compte FacebookFacebook où elle a posté un message et une photographie.
« Je suis tellement excitée que nous puissions enfin partager ce sur quoi nous travaillons depuis un an ! L'image montrée aujourd'hui est la combinaison d'images produites par plusieurs méthodes. Aucun algorithme ni aucune personne n'a créé cette image, il a fallu le talent incroyable d'une équipe de scientifiques du monde entier et des années de travail acharné pour développer l'instrument, le traitement des données, les méthodes d'imagerie et les techniques d'analyse nécessaires pour un exploit impossible, a-t-elle déclaré. C'est vraiment un honneur et je suis très chanceuse d'avoir eu l'occasion de travailler avec vous tous -- avec Chi-kwan Chan, Sara Issaoun, Dom Pesce, Thomas Krichbaum, Shoko Koyama, Maciek Wielgus, Lindy Blackburn, Kazu Akiyama et Daniel Palumbo ».
Elle est soutenue par ses collègues et en particulier Andrew Chael qui répondu de façon cinglante aux attaques contre Katie Bouman, soulignant également l'importance de son travail : « Katie a énormément contribué au logiciellogiciel... Cela n'aurait jamais fonctionné sans ses contributions et le travail de beaucoup d'autres » et il ajoute : « je n'ai pas écrit 850.000 lignes de code.... Le logiciel actuel contient environ 68.000 lignes, et peu importe le nombre de celles que j'ai personnellement écrites ».
Pour enfoncer le clou, le Caltech vient de mettre en ligne une conférence de Katie où elle détaille ce qui a été fait pour traiter l'image de M87*.
Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © caltech