Dmitri Rogozine, le chef de l'Agence spatiale russe Roscosmos, a alerté sur le risque d’une chute incontrôlée de la Station spatiale internationale en raison des sanctions infligées à la Russie. Selon ce proche de Vladimir Poutine, ces sanctions pourraient perturber le ravitaillement en carburant, rendant le complexe orbital incontrôlable. Ce qui est faux. Les sanctions n’empêchent pas le bon fonctionnement de l'ISS. D'ici quelques semaines, la Nasa testera un reboost de la station à l’aide d’un cargo Cygnus de façon à s'affranchir de l'aide des Russes pour cette manœuvre.
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Dans une nouvelle série de tweets, Dmitri Rogozine, le chef de l'Agence spatiale russe Roscosmos, affirme que les sanctions contre la Russie pourraient provoquer la chute de la Station spatiale internationale (ISS). Et de publier une carte du monde où l'ISS pourrait tomber, en ne manquant pas de souligner qu'une très grande partie du territoire russe était à l'abri.
Ces sanctions infligées à la Russie sont très ciblées. Elles visent des banques, des entreprises, des oligarques et des proches du pouvoir russe avec une vigueur sans précédent pour faire fléchirfléchir l'économie russe de façon à contraindre Vladimir Poutine à renoncer à sa guerre en Ukraine. Elles ne ciblent pas la Station spatiale et n'ont donc évidemment pas pour but d'empêcher le bon fonctionnement du segment russe ni les opérations de contrôle.
La Station spatiale, qui se trouve sur une orbite basse à environ 400 kilomètres de la Terre, doit régulièrement remonter en altitude et manœuvrer grâce à des impulsions données par les cargos Progress russes, qui la ravitaillent régulièrement. En laissant entendre que le segment russe de la station, qui sert notamment à corriger l'orbite de la station, pourrait ne plus être ravitaillé, le patron de Roscosmos ment. Effectivement, si la l'ISS n'est plus ravitaillée en carburant, elle en deviendrait incontrôlable. Mais aujourd'hui ce n'est pas le cas.
Un cargo Cygnus testé pour remonter l'orbite de la Station spatiale
Dans cette éventualité, la Nasa doit expérimenter d'ici quelques semaines une solution pour suppléer une éventuelle défaillance russe, avec le module Cygnus OA‑17, amarré à l'ISS le 21 février. Ce cargo Cygnus est le premier à disposer de capacités améliorées qui doivent lui permettre d'effectuer un reboost, en utilisant ses moteurs pour ajuster l'orbite de la Station spatiale. Par ailleurs, Elon MuskElon Musk a répondu aux menaces de Rogozine en indiquant que SpaceXSpaceX pourrait également assurer le maintien en altitude de l'ISS. Ensemble, les cargos Dragon et Cygnus auraient la capacité théorique de fournir la poussée requise.
En attendant, malgré tout cela les rotations des équipages se poursuivent. Le 15 avril, la mission Crew 4 de SpaceX décollera avec à son bord quatre astronautes dont l'Européenne Samantha Cristoforetti qui sera la première femme européenne à prendre les commandes de la Station spatiale internationale. Le 18 mars, trois cosmonautes russes décolleront à bord d'un SoyouzSoyouz depuis le cosmodrome de BaïkonourBaïkonour pour rejoindre la Station. Le 30 mars, l'Américain Mark Vande Hei et les Russes, Anton Chkaplerov et Pïotr Doubrov, doivent revenir sur terre depuis l'ISS, à bord d'un vaisseau Soyouz. Enfin, la mission commerciale Axiom-1, dont le lancement est prévu le 30 mars n'est pas remise en cause. À son bord, trois astronautes privés et un astronaute professionnel qui séjourneront 10 jours à bord du complexe orbitalcomplexe orbital.
La Russie pourrait-elle vraiment faire tomber la Station spatiale sur les États-Unis ?
Article de Rémy DecourtRémy Decourt publié le 05/03/2022
Alors que de nombreuses personnes s'inquiètent du sort de la Station spatiale internationale, les experts militaires américains sont surtout préoccupés par le tir Asat du 15 novembre 2021, tant il est peu probable que la Russie « s'en prenne » au complexe orbital. Avec ce tir Asat, certains observateurs se demandent si les Russes n'ont pas préparé les hostilités dans l'espace en marge du conflit avec l'Ukraine. Nos explications.
Si, dans l'espace les relations entre les Russes et ses partenaires occidentaux et japonais dans le programme de la Station spatiale internationale (ISS) ont toujours été cordiales et pragmatiques, la situation a défavorablement évolué. Comme le rappelle l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne, engagée dans plusieurs programmes avec la Russie, « même en période de fortes tensions politiques, les missions spatiales ont toujours été des exemples de coopération pacifique et concrète dans le domaine de la science et de la technologie, au bénéfice de l'humanité ».
Mais, il est à craindre que demain, la coopération spatialecoopération spatiale avec la Russie dans de nouveaux programmes sera plus difficile, voire impossible. Cela dit, malgré les fortes tensions entre Poutine et Biden, il est évidemment très peu probable que le maître du Kremlin décide de « s'attaquer » à l'ISS comme pourraient le laisser le croire certaines déclarations d'officiels et de hauts responsables russes.
Si la Russie peut facilement perturber le bon fonctionnement du complexe orbital, voire le désorbiter de façon incontrôlée et le faire retomber sur Terre, ce n'est pas aussi simple que cela y parait. Comme expliqué dans un précédent article, en janvier 2031, date de la fin de vie de l'ISS, trois cargos russes Progress seront nécessaires pour le désorbiter de façon contrôlée au-dessus du point Nemo. Aujourd'hui, le seul cargo Progress amarré à l'ISS n'est pas suffisant pour cela.
Dans la pire des situations, Poutine pourrait ordonner aux cosmonautes russes à bord de l'ISS de l'évacuer, puis d'allumer les moteurs du Progress en accélérant très fortement avec un biais pour l'amener sur une orbite aussi basse que possible jusqu'à un stade où il ne serait plus possible de la remonter. Parmi les autres possibilités, celle de générer un très fort couple de façon à la faire tournoyer sur elle-même de façon irrattrapable.
Dans les deux cas, la Nasa ne pourrait rien faire. Elle a bien démontré la faisabilité théorique de remonter l'orbite de la Station à l'aide d'un cargo Cygnus sauf qu'ils ne sont d'aucune utilité pour ce type de manœuvre car les ports sur lesquels s'amarrent les Cygnus ne sont pas alignés dans le bon sens. C'est d'ailleurs pour cela que l'ATV de l’Agence spatiale européenne s'amarrait au même endroit que les cargos Progress russes pour remonter l'orbite de la Station.
Conflit en Ukraine : et si les Russes avaient aussi préparé les hostilités dans l’espace
Soyons réalistes, les Russes ne désorbiteront pas de force l'ISS car ils n'ont aucun moyen de contrôler sa rentrée de sorte que ce qui ne sera pas détruit lors de la traversée de l'atmosphèreatmosphère pourrait s'écraser sur le territoire russe, chinois ou sur l'un de ses alliés ! À cela s'ajoute que la partie russe vaut tout de même plusieurs milliards de dollars et qu'ils comptent l'utiliser jusqu'en 2030.
Néanmoins, les Russes ont bien un pouvoir de nuisancenuisance en orbite basse. Et c'est peut-être là que la situation pourrait être la plus problématique pour les Américains et les Européens. D'après plusieurs spécialistes, les Russes ont peut-être préparé une nouvelle forme de guerre asymétriqueasymétrique avec le tir Asat du 15 novembre 2021 quand un missilemissile a détruit un de leurs vieux satellites d'écoute électronique. En soit, la destruction d’un satellite en vol n'est pas nouveau mais ce qui a changé dans ce cas, et très peu de personnes s'en sont rendu compte dans un premier temps, c'est que ce tir Asat avait comme objectif caché de perturber le bon fonctionnement des satellites Starlink de SpaceX qui se trouvent sur une orbite complémentaire.
La distribution des débris telle que produite par l'explosion du satellite avait certainement pour but de contraindre les satellites StarlinkStarlink à réaliser de nombreuses manœuvres. Il faut savoir que les débris russes génèrent des salves, des grappes d'alertes pour de nombreux satellites ! Et ça, c'est inédit.
Un nuage de débris au comportement inédit…
Habituellement, après la destruction d’un satellite, le nuagenuage de débris a perdu toute sa cohésion au bout de 6 à 12 mois, ce qui ne semble ne pas être le cas avec ce nuage. Rétrospectivement, on peut penser que le tir Asat du 15 novembre a permis aux Russes, et c'est une hypothèse forte et plutôt surprenante, de s'entraîner pour la situation d'aujourd'hui. Pas pour menacer la Station spatiale internationale mais pour perturber le fonctionnement de nombreux satellites américains, qu'ils soient des satellites d'observation civils et militaires ou ceux de la constellationconstellation Starlink.
“…Pour perturber le fonctionnement de nombreux satellites américains, d’observation civils et militaires ou ceux de la constellation Starlink”
Il faut savoir que l'impact contre le satellite avait comme particularité des incrémentsincréments de vitessevitesse faibles de sorte que les débris ne se sont pas dispersés comme d'habitude. Force est de constater l'intelligenceintelligence de la manœuvre. Les débris, avec une inclinaison d'environ 82 ° sont aussi complémentaires de l'inclinaison à 98° qui est l'inclinaison des satellites héliosynchroneshéliosynchrones.
Cette orbite est utilisée par de nombreux satellites d'observation, météorologiques ou de télédétection par exemple. Résultat, cela donne un très grand nombre d'alertes de risques de collision avec, potentiellement, des collisions de face par paquetpaquet. Comme si une mitraillette tirait plusieurs centaines de débris en grappe en direction d'un satellite !
Concrètement, plutôt que d'attaquer frontalement un satellite militaire américain, typiquement de type Keyhole, l'idée serait de détruire un satellite russe qui se trouve à proximité, de sorte que le nuage de débris généré, soumette le satellite à un « mitraillage » de débris en règle...
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