Il n’y a pas que les instruments des humains qui enregistrent. La nature le fait aussi, mais différemment. Dans les cernes de ses arbres, par exemple. Et certains d’entre eux semblent aujourd’hui révéler que la Terre a essuyé une tempête solaire hors norme il y 14 300 ans !


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    En 1859 s'est produit celui que les astronomesastronomes appellent l'événement de Carrington. La plus grosse tempête solaire jamais enregistrée. « Enregistrée », sous-entendu par des instruments développés par les humains. Or, la nature aussi « enregistre ». Même si elle le fait de manière différente. Ainsi des travaux publiés par une équipe internationale de chercheurs dans la revue Philosophical Transactions of the Royal Society A Mathematical Physical and Engineering Sciences montrent que dans les Alpes françaises, des arbresarbres ont enregistré une tempêtetempête solaire bien plus importante encore que celle qui a été à l'origine de l'événement de Carrington.

    En analysant les cernes d’arbres subfossiles -- comprenez que le processus de fossilisationfossilisation n'est ici pas allé à son terme -- incroyablement bien préservés sur les berges du Drouzet, près de Gap, les chercheurs -- parmi lesquels le Collège de France, le Centre européen de Recherche et d'Enseignement en Géosciences de l'Environnement, l'Institut méditerranéen de biodiversitébiodiversité et d'écologieécologie marine et continentale de l'université d'Aix-Marseille Université -- ont en effet mis à jour un pic de radiocarbone -- le fameux carbone -14 -- datant de 14 300 ans. Et cela mérite quelques explications.

    Sur les berges du Drouzet, les troncs d’arbres subfossiles que les chercheurs ont étudiés. © Cécile Miramont, IMBE, Université d’Aix-en-Provence
    Sur les berges du Drouzet, les troncs d’arbres subfossiles que les chercheurs ont étudiés. © Cécile Miramont, IMBE, Université d’Aix-en-Provence

    Les tempêtes solaires enregistrées dans les cernes des arbres

    Il faut d'abord savoir qu'en frappant le haut de notre atmosphèreatmosphère, les rayons cosmiques produisent constamment du radiocarbone. Un radiocarbone qui, comme n'importe quel autre carbone, est finalement consommé par les arbres et autres plantes. Mais il y a peu, les scientifiques ont découvert que les éruptions solaires et les éjections de masse coronale peuvent provoquer des explosions de particules dans notre atmosphère qui se traduisent par d'importantes productions de radiocarbone. Des pics.

    C'est après comparaison de leur pic de radiocarbone avec des mesures du bérylliumbéryllium-10 que l'on trouve dans les carottes de glacecarottes de glace du Groenland -- un isotopeisotope a priori produit de façon similaire -- que les chercheurs ont proposé qu'il a pu être provoqué par une tempête solaire massive qui aurait éjecté d'énormes volumesvolumes de particules énergétiques dans l'atmosphère terrestre. Un peu comme ces neuf autres que les chercheurs avaient déjà identifiés sur les 15 000 dernières années. Les fameux événements Miyake, baptisés en l'honneur du chercheur de l'Université de Nagoya (Japon) qui a découvert les premiers. Les deux plus récents se sont produits en l'an 774 et en l'an 993. Mais les chercheurs estiment que celui d'il y a 14 300 ans a dû être deux fois plus puissant que ces deux-là. Comprenez, entre 10 et 100 fois plus puissant que des événements du type événement de Carrington !

    Ici, des cernes d’arbres comme ceux qui ont permis aux chercheurs de mettre à jour la plus grosse tempête solaire jamais enregistrée. © Cécile Miramont, IMBE, Université d’Aix-en-Provence
    Ici, des cernes d’arbres comme ceux qui ont permis aux chercheurs de mettre à jour la plus grosse tempête solaire jamais enregistrée. © Cécile Miramont, IMBE, Université d’Aix-en-Provence

    Une tempête solaire à fort impact sur notre société technologique

    Dans le fond, les astronomes ignorent encore comment se produisent les événements Miyake. Ils ne savent pas ce qui cause des tempêtes solaires aussi extrêmes. D'autant qu'aucune n'a encore pu être observée directement. Et c'est peut-être heureux. Car la survenue d'une telle tempête solaire pourrait être catastrophique pour notre société technologique moderne. Elle pourrait anéantir nos services de télécommunications, nos systèmes satellitaires et nos réseaux électriques. Les pannes qui en résulteraient pourraient durer jusqu'à plusieurs mois !

    Voir aussi

    Des tempêtes solaires d’une rare intensité ont frappé plusieurs fois l’humanité. À quand la prochaine ?

    C'est pourquoi les chercheurs jugent qu'il est essentiel de continuer à étudier la question. Parce qu'il reste beaucoup à apprendre. Et que mieux comprendre l'histoire de la Terre et les événements critiques qu'elle a affrontés est essentiel pour, dans un premier temps, prédire avec précision ce qui nous attend à l'avenir et, dans un second temps, trouver des solutions d'adaptation aux risques.