L'ennui a parfois du bon au travail : d'après un récent travail de recherche, à petite dose, il stimulerait la créativité et la productivité ! À condition, bien sûr, de faire ça dans les règles, modèrent les chercheurs.
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Les signataires d'un travail de recherche publié dans la revue Journal of Applied Psychology sont arrivés à une conclusion surprenante après avoir mené trois études différentes. L'une d'entre elles consistait à demander à des couples à double carrière de répondre à plusieurs sondages par jour, afin que les chercheurs puissent déterminer si l'ennui avait une incidenceincidence sur les capacités cognitives et la productivité sur le long terme.
Il est apparu que l'ennui peut avoir du bon. Cette émotion peut stimuler la créativité en nous poussant à observer ce qui nous entoure et à rechercher des idées nouvelles pour modifier la situation. C'est pourquoi il ne faut pas chercher à la combattre à tout prix, selon Casher Belinda, professeur associé de management au Mendoza College of Business de l'université de Notre Dame et auteur principal de l'étude. « Comme dans le jeu du chat et de la souris, le fait de minimiser l'ennui au cours d'une tâche entraîne des déficits d'attention et de productivité qui se manifestent au cours des tâches suivantes. Paradoxalement, le fait d'essayer de chasser l'ennui prolonge la durée de vie de ses effets néfastes », explique-t-il dans un communiqué.
L'organisation, première arme contre l'ennui
Toutefois, il est possible de minimiser les effets négatifs de l'ennui pour que cette émotion ne devienne pas une source de souffrance professionnelle. Casher Belinda et ses confrères affirment qu'il faut organiser sa journée de travail de façon à ce que les tâches ennuyeuses ne se succèdent pas. « Après une première tâche ennuyeuse, les employés ont intérêt à s'atteler à d'autres tâches plus enrichissantes pour retrouver l'énergie perdue », affirme M. Belinda. Ainsi, ne passez pas votre matinée à répondre à des mails si cette activité ne vous stimule pas sur le plan intellectuel. Consacrez quelques heures à cette activité avant de vous consacrer à des missions qui constituent davantage le cœur de votre métier.
L'ennui est, avant tout, une conséquence de nos actions. Cet état émotionnel survient quand on peine à être absorbé par l'activité que l'on entreprend. La meilleure stratégie à adopter est donc de réfléchir à ce qui le provoque pour pouvoir agir sur le cours des événements, et éviter de s'enfermer dans la passivité. Car l'ennui est problématique quand il devient chronique. Les salariés qui viennent tous les jours au travail avec des pieds de plomb peuvent ressentir un sentiment d'impuissance et de lassitude qui les conduit au « bore-outbore-out ».
Gare au « bore-out » !
Cette expression, inspirée du mot « boring » (« ennuyeux », en anglais), est communément utilisée pour désigner le syndromesyndrome d'épuisement professionnel par l'ennui. Cette pathologiepathologie est particulièrement difficile à chiffrer tant il est tabou de se plaindre d'être payé à ne rien faire. Christian Bourion, auteur de Le Bore-out syndrom: Quand l'ennui au travail rend fou (Albin Michel, 2016), estime que 30 % des Français souffriraient de ce syndrome. Si les causes du bore-out peuvent être diverses, les salariés qui s'ennuient à leur poste ressentent souvent un profond sentiment d'inutilité et de démotivation. Ils ont tendance à perdre confiance en eux, à culpabiliser et à s'isoler. À terme, aller au travail devient, pour eux, un véritable supplice.
Comme toujours en entreprise, il est primordial de parler de son mal-être à ses supérieurs et aux responsables des ressources humaines pour éviter qu'il ne nous ronge. L'ennui est le résultat de défaillances managériales qui enferment le salarié dans une routine professionnelle faussement confortable. Il est tout à fait possible de le dépasser en demandant de nouvelles missions ou en suivant une formation. Faire un bilan de compétences peut aussi s'avérer très utile pour essayer de rebondir, que ce soit dans son entreprise actuelle ou ailleurs.