Par-delà la tombe, Cassini continue de nous livrer son héritage. Grâce aux données collectées par la sonde durant sa mission, une nouvelle cartographie de la haute atmosphère de Saturne a pu être réalisée, expliquant potentiellement pourquoi la planète est si chaude.

Le 15 septembre 2017, Cassini disparut à jamais des radars. Dans un dernier élan héroïque, la sonde se laissa tomber et brûler dans la haute atmosphère de Saturne, sous les acclamations de ceux qui l'avaient suivie depuis le début. Deux ans et demi après cette fin spectaculaire, les données collectées par l'appareil ont permis de constituer la cartographie la plus exhaustive à ce jour de la haute atmosphère de Saturne, offrant de nouveaux indices capables d'expliquer pourquoi cette dernière est si chaude.

Image en fausses couleurs capturée par Cassini en 2005, l'aurore est visible en bleue aux pôles de Saturne. © Nasa, JPL, <em>University of Colorado</em>
Image en fausses couleurs capturée par Cassini en 2005, l'aurore est visible en bleue aux pôles de Saturne. © Nasa, JPL, University of Colorado

De l'électricité dans l'air de Saturne

L'origine de la chaleur émise par l'atmosphère des géantes gazeuses constitue depuis longtemps un mystère pour les scientifiques. Bien que la température de l'atmosphère terrestre soit justifiée par sa proximité avec le Soleil, la distance à l'astre solaire de planètes comme Saturne, Jupiter, Uranus ou Neptune ne permet pas d'expliquer pourquoi les couches supérieures de leurs atmosphères sont plusieurs centaines de degrés au-dessus de ce que l'on pourrait attendre. Néanmoins, une nouvelle étude parue dans la revue Nature semble avoir identifié le coupable derrière cet étrange phénomène : les aurores.

Visibles aux pôles de Saturne, ces rubans de lumière ionisés sont la résultante de l'interaction entre les vents solaires et les particules chargées émanant des lunes saturniennes. D'après les données des chercheurs, les aurores contribueraient à réchauffer considérablement l'air aux pôles. Cet air chaud serait ensuite redistribué au niveau de l'équateur par le système de vents de la planète, multipliant par deux les températures que l'on pourrait attendre d'un simple réchauffement par le Soleil.

L'héritage de Cassini

Avant son grand saut dans l'atmosphère de Saturne, Cassini a effectué 22 orbites au plus proche de la planète, au cours d'un ultime voyage baptisé « le Grand Final ». C'est durant cette phase que la sonde a pu collecter les données nécessaires à l'étude qui vient d'être réalisée. En observant les changements de luminosité des étoiles lorsque celles-ci apparaissaient et disparaissaient derrière l'horizon, les scientifiques ont ainsi pu mesurer la densité de l'atmosphère saturnienne. Cette dernière est conditionnée par deux facteurs : l'altitude et la température. L'équipe a donc comparé les variations de densité à différents points pour déduire que les températures étaient plus élevées aux pôles de la planète, suggérant que les aurores seraient directement responsables de ce réchauffement. Ces calculs, une fois effectués, ont par la suite permis de déduire la vitesse des vents, invalidant la thèse selon laquelle les forces de Coriolis empêcheraient la redistribution de chaleur à l'équateur.

« Ces résultats sont cruciaux pour notre compréhension globale des hautes atmosphères planétaires, et sont une part importante de l'héritage de Cassini, commente Tommi Koskinen, membre de l'équipe chargée du spectrographe d'imagerie ultraviolet de Cassini (Cassini's Ultraviolet Imaging Spectograph ou UVIS). Ils nous aident à expliquer pourquoi la partie supérieure de l'atmosphère est chaude tandis que le reste - du fait de l'importante distance au Soleil - est froid. »