Pour préparer la Coupe du monde de ski alpin cet automne, les organisateurs sont prêts à tout, même à raboter et découper un glacier, et à jouer avec la légalité. On prend de la hauteur pour mieux voir l’étendue du chantier d’une véritable aberration écologique.


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    On a tous vu les images des Jeux olympiques d'hiverhiver en Chine, sur fond de neige artificielle et de montagnes rasées. On se souvient aussi du choix ubuesque de l’Arabie saoudite pour héberger les prochains Jeux asiatiques d’hiver. Cette fois-ci, la nouvelle aberration est européenne, et traverse la frontière entre la Suisse et l'Italie, dans le domaine skiable de Zermatt/Cervinia, au pied du Cervin.

    Petit à petit, une langue blanche apparaît dans la roche du versant italien du domaine. La compétition est prévue en novembre, mais faute de neige, les fondations de la piste sont en neige artificielle, ou avec la glace du glacier du Théodule. Les images ont été prises entre le 28 septembre et le 18 octobre. © Copernicus, ESA, Daniel Chrétien, Futura
    Petit à petit, une langue blanche apparaît dans la roche du versant italien du domaine. La compétition est prévue en novembre, mais faute de neige, les fondations de la piste sont en neige artificielle, ou avec la glace du glacier du Théodule. Les images ont été prises entre le 28 septembre et le 18 octobre. © Copernicus, ESA, Daniel Chrétien, Futura

    Un glacier raboté à la pelleteuse

    C'est un chantier qui se trouve à plus de 3 000 mètres d'altitude et qui fait scandale. L'affaire a été révélée le 15 octobre par 20 Minutes, nous montrant des images de pelleteuses en train de raboter le glacierglacier de Théodule, littéralement à la frontière entre la Suisse et l'Italie, pour construire la piste de « la première course transfrontalière de l'histoire de la Coupe du monde de ski », selon les organisateurs.

    En zoomant sur les images, on distingue bien une progression blanche, qui est celle du rabot du glacier par les pelleteuses. En contrebas, à gauche, la neige artificielle a été étalée dans les derniers jours. © Copernicus, ESA, Daniel Chrétien, Futura
    En zoomant sur les images, on distingue bien une progression blanche, qui est celle du rabot du glacier par les pelleteuses. En contrebas, à gauche, la neige artificielle a été étalée dans les derniers jours. © Copernicus, ESA, Daniel Chrétien, Futura

    Le chantier est tellement grand qu'on peut le suivre depuis l'espace, grâce aux images des satellites Sentinelsatellites Sentinel du programme Copernicus de l'Union européenne. Sur les images, on voit notamment des gros tas de neige artificielle parsemant le tracé sur la moitié basse de la piste « Gran Becca », côté italien. La moitié du côté suisse est sur le glacier, utilisant partiellement des pistes déjà existantes du domaine.

    Voici la section à problème. La partie du glacier en arrière-plan n'aurait pas dû être rabotée pour installer la piste car elle ne se trouverait pas dans la zone autorisée. © Keystone, Jean-Christophe Bott
    Voici la section à problème. La partie du glacier en arrière-plan n'aurait pas dû être rabotée pour installer la piste car elle ne se trouverait pas dans la zone autorisée. © Keystone, Jean-Christophe Bott

    Un chantier illégal ?

    Sur les images Copernicus, on voit les éboulementséboulements des morceaux de glace creusés par les pelleteuses, qui sont ensuite « nivelés » de sorte à produire des fondations de la piste avant d'être recouverte de neige. Les images satellitaires attestent les révélations de 20 Minutes disant que le chantier a lieu en dehors des zones affectées au ski, ce qui n'est pas autorisé. Information démentie par les organisateurs.

    Le tracé de la « Gran Becca ». © Brutal Güet GmbH
    Le tracé de la « Gran Becca ». © Brutal Güet GmbH

    Les révélations ayant eu beaucoup d'écho, la Commission cantonale des constructionsconstructions a ordonné jeudi l’arrêt des travaux dans cette section. Trop tard, dans un communiqué, les organisateurs ont indiqué que les travaux de la « Gran Becca » sont terminés et que les entraînements vont débuter. La compétition est censée se dérouler du 11 au 19 novembre prochain. En dépit des nombreux appels, la Coupe du monde de ski alpin ne sera pas repoussée.