L'Agence spatiale européenne a récemment réussi l'essai d'un prototype de moteur spatial fonctionnant sans carburant embarqué. Il utilise des molécules de l'atmosphère ! De quoi réaliser des satellites évoluant très près de la surface terrestre, à moins de 200 kilomètres d'altitude.

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    L'ESA, qui travaille à développer un moteur ionique capable de collecter son carburant dans l'atmosphèreatmosphère, a réalisé une première mondiale en testant un prototype qui peut récupérer les molécules utiles à son fonctionnement en traversant simplement certaines couches de l'atmosphère. Une technologie qui pourrait ouvrir la voie à des satellites tournant autour de la Terre à très basse altitude pendant plusieurs années.

    Le saviez-vous ?

    Des moteurs ioniques et des propulseurs à effet Hall ont déjà été testés avec du diazote (N2), du dioxygène (O2) ou de l’air mais les performances sont médiocres, à cause de l’énergie d’ionisation de l'azote et de l'oxygène inférieure au xénon et des pertes dans la dissociation. De plus, la masse de l’azote et l’oxygène est faible, et donc la quantité de mouvement produite aussi.

    Cela dit, aussi attrayante soit-elle, cette technologie est loin d'être maîtrisée et son intérêt n'est pas aussi grand qu'il y paraît, en tout cas très limité, sauf peut-être pour quelques missions très spéciales, sans doute scientifiques, à très basse altitude. Cette propulsion pourrait néanmoins trouver des débouchés autour d'autres planètes, notamment Mars, mais à des échéances éloignées.

    Un concept séduisant mais...

    Si récupérer l'air résiduel évite d'avoir à embarquer du carburant de type xénon, il nécessite un système complexe, lourd, guère flexible et génère de la traînée supplémentaire. À ces contraintes s'ajoute qu'il ne peut fonctionner que sur des orbites très basses, ce qui limite son emploi. En effet, pour que ce type de moteur fonctionne et que le collecteur n'ait pas des dimensions gigantesques, il faut suffisamment d'atmosphère résiduelle, typiquement aux environs de 150 à 200 kilomètres d'altitude. Mais pas trop non plus, car la traînée freinerait alors le satellite jusqu'à le désorbiter.

    Le prototype de l'ESA d'un moteur sans carburant, dans la chambre sous vide de Sitael, à l'intérieur de laquelle il a été testé. © ESA

    Le prototype de l'ESA d'un moteur sans carburant, dans la chambre sous vide de Sitael, à l'intérieur de laquelle il a été testé. © ESA

    Quant au prototype de l'ESA, réalisé par la société italienne Sitael, il a été testé dans une chambre sous vide qui reproduisait l'environnement atmosphérique que l'on trouve à 200 kilomètres d'altitude. Lors de cet essai, le prototype a fonctionné normalement, avec une alimentation classique du moteur ioniquemoteur ionique avec du xénon. Ensuite, celui-ci a été partiellement remplacé par un mélange d'air composé d'oxygèneoxygène et d'azoteazote. La dernière phase a consisté à couper l'arrivée du xénon pour n'utiliser que des molécules d'oxygène et d'azote de l'atmosphère.

    « Ce résultat signifie que la propulsion électrique à air pulsé n'est plus simplement une théorie mais un concept de travail concret, prêt à être développé, pour servir un jour de base d'une nouvelle classe de missions », souligne Louis Walpot, ingénieur aérospatial de l'ESA, impliqué dans ce projet.

    Mais pour Stéphane Mazouffre, directeur de recherche au CNRS au sein du laboratoire Icare, à Orléans, qui travaille sur une nouvelle génération de moteurs électriques, certes « le concept est séduisant et présente potentiellement un intérêt pour les satellites à très basse altitude. Cependant il reste encore de nombreuses étapes à franchir pour arriver à un modèle de vol : il faut que les performances en conditions réelles soient adéquates (poussée, impulsion spécifiqueimpulsion spécifique et rendement notamment), le système robuste et fiable et le coût raisonnable ». Avant d'avoir un système prêt à voler, il y a beaucoup d'étapes de développement à franchir, dont, parmi les points durs en suspens, le problème du neutraliseur (la source d'électronsélectrons qui neutralisent le faisceau d'ionsions) et la mise au point d'un émetteur d'électrons qui supporte l'oxygène et qui fonctionne avec un plasma d'air.