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En rouge, le signal du modèle standard pour la réaction de production de bosons W avec deux jets hadroniques. Le signal en bleu montre une bosse vers 144 GeV en abscisse. Il s'agirait d'une nouvelle particule inconnue jusque-là. © CDF Collaboration
La rumeur commence à se répandre dans la blogosphère. Si l'on en croit un séminaire donné tout récemment en France lors des célèbres Rencontres de Blois, l'anomalieanomalie trouvée dans le signal enregistré par le détecteur de particules CDF du Tevatron, et signalée officiellement par la publication d'un article sur ArxivArxiv il y a deux mois, serait en train de devenir une véritable découverte. Il faut encore rester très prudent, car on ne sait toujours pas ce qu'a vu l'autre détecteur équipant le collisionneur de protons et d'antiprotons du Fermilab, le détecteur DØ.
En tout état de cause, la collecte de nouvelles données et l'analyse plus approfondie de celles déjà enregistrées avec CDF ont fait passer l'écart entre les prédictions du modèle standard et les observations de 3,2 sigma à 4,1 sigma. Selon les chercheurs, il devient donc beaucoup plus difficile de croire qu'il s'agit d'une simple fluctuation statistique dans le détecteur ou les collisions étudiées, qui disparaîtra lorsque la quantité de données enregistrées aura augmenté. Ils semblent également confiants au sujet du bruit de fond, c'est-à-dire l'ensemble des particules et des réactions produites selon des processus découlant des équations du modèle standard. Il a été modélisé, et une fois soustrait du signal enregistré par CDF, le désaccord entre prédiction et observation s'est révélé proche des 5 sigma qui permettent d'affirmer la découverte d'une nouvelle particule.
Sur son blog, Résonaances, le physicien Adam Falkowski analyse diverses interprétations possibles au signal trouvé au Tevatron avec CDF. Dans le détecteur, il se manifeste par la production de deux jets de hadrons (j j sur le diagramme de Feynman ci-dessus) avec un boson W se désintégrant en neutrinos et autre leptons chargés l. Les jets pourraient provenir de la désintégration d'un boson Z'. Les lettres u et d correspondent aux quarks et antiquarks (avec une barre horizontale sur la lettre) présents dans les protons et antiprotons des faisceaux en collision au Tevatron. © Adam Falkowski
Si DØ annonçait une découverte similaire et si les détecteurs Atlas et CMSCMS du LHC confirmaient la réalité des observations du Tevatron à 5 sigma au moins, il faudrait alors en conclure qu'il existe bel et bien dans la nature une particule dont la massemasse est de l'ordre de 144 GeVGeV.
Diverses explications possibles au-delà du modèle standard
Il ne peut s'agir du boson de Higgsboson de Higgs mais cela pourrait bien être une particule présente dans certaines théories de technicouleur. Ces dernières font intervenir une force ressemblant à l'interaction nucléaire forte mais se manifestant à des énergiesénergies plus élevées que celles intervenant dans les expériences habituelles avec des baryonsbaryons. Postulées pour décrire le boson de Higgs, elles sont aussi utilisées pour expliquer la matière noire.
L'hypothèse la plus intéressante est qu'il s'agirait d'un boson Z', une particule que l'on trouve entre autres dans la théorie des supercordesthéorie des supercordes. Certains théoriciens ont d'ailleurs déjà interprété ce signal dans le cadre de la théorie des D-branes avec une énergie de l'ordre du TeV. S'ils ont raison, il faudrait alors probablement s'attendre à la création de minitrous noirs au LHC. Les prochains mois seront peut-être passionnants...